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états-unis - Page 49

  • Prince des ténèbres (1987)

    Un film de John Carpenter

    3866235069_bb3ee3b0d0_m.jpgFilm de genre, film d’épouvante, Prince des Ténèbres s’assume comme tel de bout en bout. Malgré l'introduction d'une possible romance, l’ambiance n’est pas adoucie pour autant. Le métrage voit l’affrontement de deux mondes : le religieux et le scientifique, le technique et la croyance. Un prêtre est mort, un autre vient enquêter, assisté par une équipe de chercheurs. Dans le domaine scientifique, le spectateur est prévenu : "Oubliez tout ce que vous savez de la réalité" nous dit le professeur Birack. La réalité du film, dès lors, n’est pas régie par les lois dont nous avons l’expérience, et nous emmène sur les terres du surnaturel. Les deux mondes coexistent durant tout le film, dans un huis clos qui enferme l’équipe de scientifique dans une église. Deux dialogues contradictoires s’affrontent ici, celui d’une pensée empirique et d’une croyance.

    La tension est entretenue continuellement, par des artifices que Carpenter connaît bien : la musique, qui crée une ambiance, un arrière-plan narratif qui guide le spectateur vers les moments clés du film. Les cinq premières minutes du film sont sur ce point vraiment bien ficelé, sans paroles, sur fond de la musique synthétique de Carpenter. Beaucoup de ses films commencent par un passage entièrement  musical, comme une introduction qui touche directement le spectateur par la tension propagée, sèche et implacable. Halloween (1978), New-York 1997 (1980), The Thing (1982), Vampires (1996) et j'en passe, débutent tous par ce procédé. Cette tension est accentuée dans Prince des ténèbres par la situation particulière d’un huis-clos. L’équipe est en effet maintenue à l’intérieur de l’église car dehors, veillent des sbires du mal. Pour le peu de protagonistes qui sortent, c’est la mort assurée. Malgré cette apparente dichotomie, la distinction dedans/dehors est quasiment égale du point de vue du danger encouru ; en effet, à l’intérieur même de l’église, lieu de refuge par excellence, sévit le mal provoqué par une incarnation du malin. C’est alors plutôt l’opposition seul/ensemble, autre grande caractéristique du film d’épouvante, qui est utilisée ici. L’impossibilité de s’échapper du lieu central (aussi bien pour les personnages que pour le spectateur) est bien rendue par la vaine tentative du héros, qui se retrouve cerné par une horde de zombies.

    C’est le monde scientifique qui vient s’installer dans l’église, et non pas l’inverse. On comprend alors que les scientifiques sont prisonniers sous la domination des croyances religieuses qu’ils connaissent peu et auxquelles ils n’adhèrent pas (voir le scepticisme avec lequel sont reçues les explications du prêtre).  L’équipe se retrouve face un objet qu’ils ne comprennent pas, un cylindre dans lequel tournoie un mystérieux fluide verdâtre, auquel ils tentent d’appliquer leur savoir scientifique. Cette tentative de décodage est néanmoins inutile et désespérée,  car le mal s’est emparé de la terre.

    La représentation de cette emprise est créée par une omniprésence organique dans le film : les vers qui grouillent sur la terre, les fourmis et autres insectes qui rampent sur les corps et les visages des êtres possédés.  Les personnages possédés sont livides, à l’image des zombies cher à George Romero.  Leur caractéristique reste l’immobilité, qui s’oppose au mouvement organique incessant, et à l’attitude des quelques passants qu’il nous est donné de voir, qui ne sont pas atteints. Ce qui nous indique que le diable choisit ses apôtres : ce sont le plus souvent des laissés pour compte, des sans abris, des individus qui vivent dans la rue. D’une façon assez dérangeante, le malin s’approprie les symboles chrétiens, comme la blessure qu’il inflige à un protagoniste de l’histoire, qui s’illustre par une croix sur son bras. Cette blessure indique encore une fois le choix du mal : c’est par elle qu’il passera, l’utilisant comme un vaisseau pour permettre au diable d’apparaître sur Terre. On peut encore noter le pigeon épinglé sur une croix, témoin de la présence des possédés autour de l’église. Le mal est aussi marqué physiquement par la laideur, le repoussant, comme Carpenter va encore l'utiliser dans son film suivant, Invasion Los Angeles (1989). Ainsi, la décomposition de la femme prise comme réceptacle pour l’incarnation du mal, qui passe par tous les états, d’une grossesse d’un autre monde à une détérioration de ses propres chairs, laisse apparaître un crâne d’écorchée.

    Film horrifique, Prince des ténèbres n’en est pas moins parsemé de touches humoristique (personne ne se rappelle de quoi a l’air la radiologue), mais à chaque court-circuité par le pessimisme et la noirceur des autres individus (les blagues du personnage du scientifique chinois tombent immanquablement à l’eau).  Dans le film, si le soleil montre son éclat, ce n’est que dans l’optique d’un répit d’autant plus difficile à apprécier qu’on le sait de courte durée.  Et Carpenter de livrer avec son Prince des ténèbres un véritable spectacle, dérangeant, oppressant, d’une dureté à toute épreuve : une œuvre forte, qui, sans égaler ses plus grands films (Halloween, New-York 1997, The Thing, L’antre de la folie), est un vrai moment de cinéma.

    Source image : affiche américaine du film © Universal Pictures

  • Bonnie & Clyde (1967)

    Un film d'Arthur Penn

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    La sortie de Public Enemies (Michael Mann) m’a décidé à enfin découvrir le Bonnie & Clyde d’Arthur Penn, tant certains aspects me semblaient similaires entre les deux films (j’espérais ainsi voir un film très réussi, au contraire de celui de Mann, surévalué comme à l’accoutumée).

    Film choc, film du changement (une des amorces du Nouvel Hollywood), Bonnie & Clyde marque dans plusieurs camps : film de gangsters (et film noir), road movie, romance ; de ces trois dimensions, présentes quasi à égalité dans le film, on ressent surtout la dernière, pleine de contrariétés (malgré des "préliminaires" suggestifs, Clyde reste prostré et semble impuissant) et d’un élan romanesque significatif. Clyde a déjà de la prison au compteur quand il rencontre Bonnie Parker, fille de riche qui s’ennuie. C’est l’amour fou en un instant, en même temps qu’une pulsion de mort, destructrice.

    Au rayon film de gangsters, le film offre des fusillades tonitruantes (ils ne comptent pas leurs balles), mais surprend à plusieurs reprises par les coups manqués du duo. En effet, certains plans de Clyde se soldent par une banque en faillite, et jamais il ne s’en sort avec de gros butins. La philosophie de Clyde n’est d’ailleurs pas celle du gros-coup-qui-pourra-le-mettre-à-l’abris-du-besoin, comme on pourrait le croire quand l’alliance commence. Ainsi, quand Bonnie en a assez et voudrait tout arrêter, elle demande à Clyde ce qu’il ferait si toute l’ardoise était effacée. Et Clyde de mettre au point une nouvelle stratégie... toujours pour braquer des banques. C’est un véritable mode de vie pour Barrow. Il a néanmoins bon fond (notez que Public Enemies reprend in extenso un échange de paroles entre Clyde et un épargnant à la banque, quand il lui dit "Range ton argent, c’est la banque qu’on vole, [pas toi]." L’hommage va un peu loin, et Mann pousse le vice à l’intégrer dans sa bande-annonce ! Bref. Mais le parcours de Bonnie & Clyde se voit aussi comme une fuite en avant.

    Car le film est également un road-movie dans sa plus pure expression. Traversant les états pour ne plus être poursuivis, le gang Barrow, désormais enrichi d’un pompiste, du frère et de la belle-sœur de Barrow, fait les 400 coups. La réalisation épouse cette cavalcade effrénée, Penn filmant souvent les acteurs cheveux au vent, libres mais toujours dans l’urgence. De même, l’enivrante course contre le temps des bandits est accompagnée d’une multitude de cris (de joie, de peur) assourdissants et d’une musique country, totalement inhabituelle dans le genre, qui souligne cette folle danse d’amour et de mort. Public enemies reprend également cette musique à son compte, mais d’une façon beaucoup moins naturelle : la répétition inlassable du même morceau, calé sur les images sans (a)ménagenent, brute, souligne un côté fabriqué.

    Enfin, malgré qu’il s’agisse d’un film d’époque, le film ne peut faire abstraction d’une peinture mentale de la fin des années 60 : l’assassinat de JFK, qui a traumatisé toute l’Amérique, occupe les moments les plus violents du film :on y voit un homme recevoir une balle dans la tête en gros plan, plutôt rare à cette époque, l’hémoglobine coule de ses gros flots rouges, et le frère de Clyde (joué par Gene Hackman) connaîtra une fin qui ressemble à s’y méprendre à celle du président américain. La séquence finale, clôturant le film dans une apothéose de violence, symbolise l’éclatement d’un système qui est conscient de sa fin, tel celui des studios de cinéma américain. En effet, Bonnie & Clyde marque aussi un point de non-retour, ouvrant la voie aux jeunes réalisateurs inspirés par le cinéma européen : pour une nouvelle façon de faire des films.

    Source image : capture dvd Warner Bros.

  • L'enfer du dimanche (2000)

    Un film de Oliver Stone

    Oliver Stone sait faire très fort. Il l’a prouvé par de véritables uppercuts cinématographiques dont j’estime l’apogée avec JFK (1991), magnifique film-enquête passionné et passionnant qui se débat avec l’Histoire, les complot et une vraie dimension paranoïaque. Avec L’enfer du dimanche, c'était loin d'être gagné, le football n’étant pas, pour le dire simplement, un très grand intérêt personnel.

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