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40's - Page 2

  • La double énigme (1946)

    Un film de Robert Siodmak

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    Du réalisateur, les films noirs sont fameux ; Phantom Lady (alias Deux mains la nuit lors de sa sortie sur les écrans français) et sa mystérieuse jeune femme qui disparaît, Pour toi j'ai tué et ses amants tourmentés, jusqu'à son sommet, Les tueurs et sa structure en flash-back (tournée la même anné que La double énigme), relativement nouvelle pour l'époque. 

    La double énigme commence de but en blanc comme un polar, par sa scène de meurtre dans un noir d'ébène. Les indices convergent extrêmement rapidement vers une jeune femme, aperçue par de nombreux témoins, sans doute possible. Il s'agit d'une femme affable voire très gaie, qui tient un bureau de presse ; mais, aussi vite qu'elle avait progressé, l'enquête marque le pas, lorsque la police rend visite à la jeune femme : les enquêteurs y découvrent sa sœur jumelle. Devant le silence du duo, il apparaît impossible de départager qui de l'une ou de l'autre a commis l'odieux crime. Entretenant une illusoire similarité physique, elles s'habillent dans leurs premières scènes communes de tenues identiques en tout point : étoffes, couleurs, coiffure. L'époque, antérieure aux relevés d'empreintes et aux relevés d'ADN, poussent les enquêteurs dans des retranchements ambigües : car s'ils ne peuvent identifier la coupable avec certitude, une certitude aussi importante s'impose du même coup, l'une des deux étant forcément la meurtrière. On voit bien là les deux limites du film : trop de possibilités induites par deux personnes physiquement interchangeables, et un suspense inexistant car l'on connaît par avance la meurtrière. Deux pièges que Siodmak va réussir à transcender.

    Du film policier, même du film noir pur jus, l'on passe  à une déclinaison très en vogue dans le Hollywood des années 40 : le film de psychanalyse. La même décennie voie Le secret derrière la porte de Fritz Lang et La maison du docteur Edwardes de Hitchcock, qui aimera à utiliser les ressorts psychanalytiques dans plusieurs de ces films (Vertigo, 1958,  Psychose, 1960, Pas de printemps pour Marnie, 1964). Jamais pourtant, autant que dans La double énigme de Siodmak, l'on ne nous aura expliqué de façon plus directe les principes de base utilisés par Freud. Associations d'idées, test de Rorschach ou encore l'importance des traumas vécus dans l'enfance. Un des buts du film semble clairement l'appropriation par les public des concepts de la psychanalyse, ou en tous cas la compréhension des pratiques phares. Le test de Rorschach est notamment décrit et expliqué avec moult détails par le médecin qui va se charger d'analyser les deux sœurs, en collaboration discrète avec la police. Pour achever le tableau, le médecin est amoureux d'une des deux sœurs, l'innocente bien entendu ; son travail n'est donc pas aussi désintéressé qu'on peut le croire, tant il veut avant tout découvrir laquelle est l'élue de son cœur pour pouvoir se déclarer. Au fil du récit, les deux femmes vont se différencier de plus en plus ; on pensera à d'autres film explorant cette dualité, Faux-semblants de David Cronenberg (1988) ou encore Sisters (1973) de Brian De Palma.

    Chaque pièce est en place, et chacun joue son rôle à la perfection ; mais les effets de surprise restent malgré tout très présents, notamment grâce à Olivia de Havilland qui réussit à habiter deux personnages complètement opposés ; l'on se demande même souvent laquelle est devant nos yeux, tant elles peuvent tromper  la fois les personnages du film, et nous-même. Siodmak et son directeur photo Milton R. Grasner (ce dernier avait éclairé l'année précédente La rue rouge, grand film noir de Fritz Lang) utilisent astucieusement les deux profils de l'actrice afin de dessiner des différences d'ombres, de regards, d'expression, comme un double inversé pas tout à fait raccord. Les nombreuses scènes de multi-expositions (où deux Olivia de Havilland sont présentes dans le même plan) sont bluffants. Dans un ensemble somme toute assez balisé, mais extraordinaire de maîtrise formelle, l'acte final est superbe, ménageant tout  la fois le suspense et bannissant un véritable happy end. La double énigme est finalement un ravissement au propos trop didactique. Mais quels grands moments !

  • Les enchaînés (1946)

    Un film de Alfred Hitchcock

    6206878894_0f85524862_m.jpgHitchcock ne disait-il pas, à propos du meilleur thème du cinéma, "Boy meets girl" ?

    Il applique ici sa formule maîtresse à la lettre, Ingrid Bergman tombant instantanément amoureuse d'un Cary Grant apparemment imperturbable. Ah, Bergman qui vous dit en face, ne vous connaissant alors même pas, "You know what ? I like you." Ça aurait de quoi faire réagir n'importe quel homme (être humain?) d'une façon électrique. Cary, lui, est sous les ordres. FBI, ça ne rigole pas. Il n'est pas payé pour tomber amoureux fou d'une fille d'espion nazi, que le Bureau veut recruter par son entremise.

    La belle histoire est ainsi contrariée par une mission, dont sera chargée l’héroïne : découvrir le fin mot dans une affaire de trafic de minerais… Pour cela, elle devra faire tous les sacrifices : renouer avec un ancien ami, se marier avec lui ( ! ), avec le consentement expéditif mais étrange de son amoureux, qui au fond de lui, n’aime pas du tout cette affaire. Son problème ? Il n’ose jamais s’avouer la vérité : oui, il est dingue de cette fille. Mais s'en apercevra-t-il assez tôt ?

    Comme souvent chez Hitch, la caméra est la véritable star du film. Contre-plongées, déformations optiques, caméra subjective, … Hitchcock sort toute sa panoplie pour nous servir un bon suspense, raffiné et cruel. Voir la séquence des bouteilles de champagnes, où un même plan incessant vient compter les bouteilles restantes lors d'une soirée chez le nouveau mari de Ingrid Bergman -l'infâme mais si courtois Claude Rains. Ou encore, ce plan où tout change pour l'héroïne, lorsqu'elle découvre la vérité de sa condition : pas de musique, juste un zoom rapide sur son visage décomposé, contrastant avec le contre-champs de ces bourreaux insouciants. La mécanique du suspense est déjà totalement acquise, comme Hitchcock le démontrera à de nombreuses reprises ; on se rappelle de la partie de tennis dans L'inconnu du Nord-Express (Strangers on a train, 1951), où les coups sont montés en parallèle avec la tentative désespérée de Bruno pour récupérer une montre bien compromettante. Hitchcock, ou la solution (une des …) à la question cruciale : comment passer un bonne soirée ?

  • Le Faucon maltais (1941)

    Cliquer sur l'image pour accéder à la chronique du film :

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  • Sherlock Holmes et la Clef (1946)

    Un film de Roy William Neill

    4695688426_8557a56552_m.jpgLe réalisateur attitré de la saga sera resté fidèle au personnage du détective jusqu’au bout, depuis Sherlock Holmes et l’arme secrète, jusqu’à ce Dressed to kill, dernière (ouf !) adaptation de Sherlock Holmes par la Universal dans ces années 40. Me concernant, il nous aura fallu neuf semaines, une quinzaine d’heures de projection, 9000 mots, pour traiter de la série dans son intégralité : une aventure qui m’aura passionné, et que vous aurez eu plaisir à suivre, j’espère.

    Pour sa dernière affaire, Holmes est confronté à un vol de boîtes à musique apparemment banales ; elles ont été fabriquées en série par un prisonnier qui purge la fin de sa peine. Malgré cela, on a vite compris l’importance de ces boîtes : leur possesseurs ne leur survivent pas bien longtemps. Sur cette trame somme toute très traditionnelle, se greffent des éléments des nouvelles originales de Conan Doyle et d’autres, provenant des autres films de la saga.

    Des nouvelles de Conan Doyle, on retient les références à Un scandale en Bohème et Irene Adler, "la" femme selon Holmes (que l’on retrouve aussi dans le film de Guy Ritchie) ; mais l’affaire de la cycliste solitaire est aussi directement nommée par Watson, ce dernier occupant le rôle de "biographe romancier" de son célèbre compagnon. Au détour de plusieurs conversations, des éléments de certaines enquêtes de Holmes refont surface ; le VR (Victoria Regina, la Reine) tracé au pistolet dans leur appartement, ou ces boîtes à musique qui provoquent les plus meurtrières pulsions : l’affaire des Six Napoléons fonctionnait sur la même logique, un trésor ayant été dissimulé dans l’une des copies du Napoléon (précédemment adapté par Roy William Neill avec La perle des Borgia).

    Mais le film, et c’est là toute la valeur de cette saga, fonctionne aussi sur des références internes au corpus d’œuvres cinématographiques. Dans Sherlock Holmes et la clef, on retrouve une intrigante digne des vamp de films noirs que se sont évertué à placer les scénaristes dans beaucoup de titres de la série (Le train de la mort, La femme aux araignées, La femme en vert, ...). L’éparpillement des objets qui reconstituent, une fois rassemblés, un seul et même appareil déterminant, avait aussi été utilisé dans Sherlock Holmes et l’arme secrète, où trois scientifiques cachaient chacun une partie d’un viseur mortel. Les films donnent aussi la part belle aux leçons d’optimisme un brin sentencieuses de Holmes à chaque fin d’aventure ; le message final étant là guidé par une nécessité contemporaine (donner de l’espoir à la population minée par la guerre). Les déguisements (qui ont mis la pédale douce sur la fin), les gueules cassées, l'époque Sherlock Holmes contre les Nazis (loin d'être la plus inspirée...), le décorum gothique, les whodunnit et leurs amoncellement de cadavres, c'est tout cela, Sherlock Holmes by Rathbone & Bruce (& Neill!).

    Enfin, comme souvent dans la série, c’est Watson qui, naïvement, souffle sans le savoir la clef de l’énigme à Holmes. Son air continuellement ahuri, presque benêt, est bien loin de la personnalité originale des nouvelles ; à ce titre (et à bien d’autres, malgré ce qu’ont pu dire certains critiques), l’adaptation est bien plus fidèle et cohérente dans le dernier film de Guy Ritchie, où Jude Law incarne un Watson fort, homme à femmes et maternant parfois Holmes lors de ces périodes de dépression.

    Un dernier opus en forme d’hommages multiples, cependant loin d’égaler les grandes réussites du cycle que sont La griffe sanglante, La maison de la peur ou Le chien des Baskerville. A bientôt, Sherlock !

    Lectures affiliées :

    Sherlock Holmes (2010)
    Le Chien des Baskerville partie 1 et 2
    Les aventures de Sherlock Holmes
    Sherlock Holmes et la voix de la terreur
    Sherlock Holmes et l'arme secrète
    Sherlock Holmes à Washington
    Échec à la mort
    La femme aux araignées
    La perle des Borgia
    La griffe sanglante
    La maison de la peur
    Mission à Alger
    Sherlock Holmes et la femme en vert
    Le train de la mort