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états-unis - Page 61

  • Planète interdite en DVD

    91927planete_interdite.jpgPlanète interdite, chef d'œuvre SF jusque là inédit en DVD zone 2, était sorti dans une relative indifférence promotionnelle en août dernier, perdu au sein d'une nouvelle collection proposée par la FNAC. Malgré tout, les cinéphiles, attendant la parution du film de Fred McLeod Wilcox depuis des lustres, avaient provoqué la rupture de stock du produit dans la semaine suivante. Réassorti ces derniers jours, la perle rare est à nouveau disponible, uniquement à la FNAC.

    Comment ce film des années 50 est devenu un classique révéré du 7ème art ? Ce qui le différencie du tout venant de la production science-fictionnelle de l'époque se trouve d’abord dans l’originalité de sa trame narrative, inspirée de La Tempête, une des dernières pièces de Shakespeare ; ou comment associer un idéal d'art littéraire avec un genre considéré comme une sous-culture, de plus à l'intérieur d’un médium (le cinéma) qui commençait à peine à avoir la reconnaissance d’une forme d’art. D'autres aspects contribuent à élever le film, décidément pas banal : un beau Scope couleur, qui contraste avec le noir et blanc plein cadre généralement utilisé pour ce type de série B ou encore les décors de studio dont l’artificialité assumée apporte une forme de poésie visuelle à l’ensemble, notamment avec ses ciels turquoises et ses paysages désertiques dans le lointain. Les effets spéciaux sont convaincants, notamment lors d'une saisissante apparition monstrueuse filmée en animation image par image ; enfin des artefacts qui permettent d'ancrer l’imaginaire du spectateur dans une autre dimension : l'intérieur d’une soucoupe volante, des objets produisant des sonorités étranges et Robby le robot, devenu une mascotte, une icône pour les enfants des foyers américains, réapparaissant périodiquement dans divers programmes familiaux.

    La philosophie du film est fortement influencée par la psychanalyse, notamment via le personnage de Morbius, scientifique  solitaire sur une planète désertée ayant pour seule compagnie sa fille, qu’une mission de sauvetage vient ramener sur Terre. Ses expériences sur le cerveau humain, les manifestations de l’inconscient, et des dialogues au sens ambigu finissent de faire de Planète interdite un film rare, étonnant et très étrange.

    De l'autre côté de l’Atlantique, les américains bénéficient d’un coffret DVD métal somptueux, qui illustre bien la place du film au sein de la culture populaire américaine, au même rang que La vie est belle (de Capra) ou qu'un Magicien d'Oz, dont les références parsèment tout un pan de leur patrimoine culturel.

  • Mission (1986)

    Un film de Roland Joffé

    Mission a fait couler beaucoup d'encre à sa sortie en 1986. Palme d’or controversée à Cannes et Oscar de la meilleur photo, le film de Roland Joffé était attendu après le très bon La déchirure, qu'il avait réalisé deux ans plus tôt. Cette histoire véridique d'une mission d’évangélisation sur le territoire des indiens Guarani reste toujours aujourd’hui un film d’une puissance rare, par la beauté des images, la grâce divine de la musique d'Ennio Morricone et un très bon duo d’acteurs aux personnalités antagonistes, Jeremy Irons - frère Gabriel, prêtre jésuite, et Robert De Niro - Rodrigo Mendoza,  ancien marchand d’esclaves cherchant sa rédemption dans la religion. Il est intéressant de considérer La Mission du titre comme polysémique, pouvant illustrer mission évangéliste envers les indiens, mission du jésuite pour sauver l'âme de Mendoza, et enfin mission de Mendoza pour mener à bien son dernier combat : tout est mission.

    La lutte entre deux conceptions du monde est le centre vital du film, opposant nature et civilisation, nature et religion. Pendant un temps, la fusion opère d'ailleurs plutôt bien, dans un endroit qu’on croirait sorti d'un livre d’images, et qui s'impose comme un paradis terrestre. Mais l'évangélisation n’est pas le seul but des pays dits civilisés, il s'agit aussi de partager les terres entre espagnols et portugais. Dès lors, les autochtones seront chassés de leur terre, une terre certainement trop belle pour eux de l'avis des ecclésiastes et des politiques. Cependant on pressentait depuis le début que de cette invasion, de cette lutte entre des éléments antagonistes, toutes les forces en présence y perdraient beaucoup. On pourrait ici rapprocher cette impossibilité de nature avec le propos du Narcisse Noir, grand film anglais du duo Powell-Pressburger, les deux œuvres se clôturant par le même constat d’échec. L'extrême cruauté (quoi de pire que l’indifférence au sort d’autrui ?) côtoie donc la plus grande beauté, chaque plan alignant certaines des images les plus splendides jamais vues sur un écran. Le coup de génie du film est sûrement dans le choix du lieu de tournage, les chutes d'Iguaçu, encastrées entre le Brésil et l’Argentine ; somptueuses, quasiment surréelles, elles sont magnifiées par l’art du chef-opérateur Chris Menges. La forêt, envahissante, et les chutes d’eaux, au vacarme tonitruant semblant venir des temps les plus reculés, semblent avoir raison de l’ambition des hommes à les conquérir.  Et la musique de Morricone, entre envolées aux accents religieux et mélodies indiennes, de souligner toute la douloureuse beauté d’un film qui constitue, à n'en point douter, une grande réussite.

  • Quantum of Solace (2008)

    Un film de Marc Forster

    quantum of solace1.jpgLe nouveau James Bond étonne tout en faisant état d’une continuité évidente. Il constitue le premier film de la franchise à être une suite directe du très bon Casino Royale. Dans le rappel de ce simple fait, on décèle un changement plus profond que cela paraît : la dimension toute serialesque chère à James Bond, avec lequel une aventure complète nous était proposée à chaque film, et chez lequel on retrouvait des caractéristiques récurrentes. Rappelons ici que nous sommes au cœur d’un renouvellement complet de la franchise, Casino Royale et Quantum of Solace représentant un épisode 0 dans la caractérisation d’un nouveau Bond. En effet, on peut se demander dans quel mesure on assiste à un James Bond movie : pas de gadgets (rupture déjà amorcée par Casino Royale, radicalisée ici), pas de frivolités avec la gente féminine (Bond ne flirte même pas avec Olga Kurylenko), impasse sur l’humour, pas de "My name is Bond, James Bond". Entre tradition et (r)évolution, le nouvel opus signé Marc Forster semble avoir choisi son camp. Quantum of Solace fait montre d’une rudesse qui saute à la gorge, de rugosité, voire d’austérité, loin des fastes du passé (décors, voitures, ...).

    Le plus connu des agents secrets poursuit une quête de vengeance personnelle froide et limite aveugle, devenant une machine à tuer incontrôlable digne d’un Terminator, pour qui le respect des ordres donnés par sa hiérarchie est... aléatoire. C’est là que Quantum of Solace paye un trop lourd tribut à la trilogie Bourne. L’agent de l’écrivain Robert Ludlum et ses adaptations cinématographiques ont dépeint de façon trop évidentes sur les scènes d’action du métrage, rendues illisibles par un excès de tremblements et de sur-découpages : sans plan de référence montrant l’ensemble de la scène, on est perdu alors même que seulement deux protagonistes se battent ou se coursent à l’écran. Bond, dissident au sein même de l’organisation qui l’emploie, rappelle le parcours de Timothy Dalton alias James Bond dans le violent Permis de tuer (John Glen, 1989). Pour être un Bond crédible dans le film d’espionnage d’aujourd’hui, il doit se poser en rebelle, en électron libre au sein d’un système où toutes les cartes sont truquées d’avance. Le monde dépeint dans le film s’affranchit de toute notion prédéfinie de bien ou de mal, et privilégie une théorie du complot où les membres les plus importants des états dominants font affaire avec des truands notoires en connaissance de cause. La note d’intention est bien un réalisme à outrance, moins charmant mais plus (trop ?) crédible. On se retrouve donc dans une configuration de pur récit d’espionnage, empli de couvertures, d’infiltrations, et d’un certain flou dans les motivations de chacun. On perd cependant beaucoup du charme d’un Bond classique (couleurs chaudes, belles voitures, lieux paradisiaques, une fenêtre de fantaisie et de rêve).

    A l’image du monde actuel, James Bond subit des transformations d’importance : il est un des témoins révélateurs de notre époque, le changement dans la continuité ; à chacun de choisir dans quel époque ils préfèrent vivre.

  • Tonnerre sous les tropiques (2008)

    Un film de Ben Stiller

    tropic thunder1.jpgTonnerre sous les tropiques avait eu droit à une promotion efficace, à base d'affiche parodique Rambo-style, et d'une bande annonce dont le plus grand effet spécial était Robert Downey Jr. : grimé en noir pour un "relooking extrême" dont même la pire émission de télé-réalité n'aurait pas pu rêver, il bouffait déjà l’écran. Après une prestation empreinte de charisme, d'intelligence et surtout d'un grand sens de l’humour dans le bon Iron Man, on l’a enfin accepté comme un acteur au grand potentiel comique, aux côtés de deux poids lourds (Jack Black et Ben Stiller) dans Tonnerre… C’est d’ailleurs lui la vraie star du show, dégaine impayable, répliques ultimes, accent parodique sur fond de réflexions désopilantes sur le métier d’acteur. Son association avec les deux trublions sus-cités promettaient d’ailleurs beaucoup aux aficionados d'humour énaurme assumé jusqu’au bout.

    Acteur-réalisateur (cas rare dans l’univers de la comédie), Ben Stiller paye de sa personne les gags les plus lourds (ce n’est pas négatif) mais aussi et surtout les plus humiliants. Déguisé en singe agitant des cimbales ou hennissant avec un gars sur le dos dans Zoolander, il nous joue ici deux trucs qui constituent la patte Stiller : un panda trucidé par sa faute dont il porte la tête en casquette (je vous laisse imaginer) et une performance comme Hollywood les aime : Stiller joue un malade mental et devient l’idole d'une bande de parrains locaux dont c’est le seul film qu’ils aient jamais connu. A part ces scènes tellement over the top qu’elles en deviennent géniales, à quoi peut-on s’attendre sur la durée ? L’idée de base paraissait déjà trop foutraque pour tenir sur un format long-métrage -des acteurs venus tourner le film de guerre ultime se retrouvent catapultés dans une vraie jungle où des caméras cachées sont censées prendre leurs émotions sur le vif- et c’est vrai qu'après que le réalisateur de ce chef d’œuvre guerrier (dans le film) disparaît en fumée, on a l'impression d'assister à un spectacle tourné un peu en roue libre, assez efficace cependant dans la parodie (les fausses bandes-annonces du début sont excellentes) mais un peu trop relâchées dans l'enchaînement des péripéties : une fois que le petit groupe est dans la jungle (soit les 2/3 du film), il ne se passe plus grand-chose.

    Hollywood ne sort pas grandi de cette (petite) charge politiquement incorrecte : acteur shooté, producteur mono-maniaque et agent qui n’en glande pas une à part jouer à la console ; mais la tendance geek de Stiller lui intime de réellement tourner son film de guerre, et non plus la parodie qu'il était parti pour trousser. La dernière partie laisse donc l'humour de côté pour nous plonger dans le film dont on était censé voir la parodie : malgré de très bons moments, Tonnerre sous les tropiques aurait pu être bien meilleur.

  • Vicky Cristina Barcelona (2008)

    Un film de Woody Allen

    Le cinéma de Woody Allen a changé. C'est un fait établi depuis, disons, Match Point. Cette bifurcation, moins comique, plus thriller intimiste, apportait alors beaucoup de fraîcheur au parcours d’un cinéaste prolifique mais au renouvellement quasi absent. Avec son dernier film en date, présenté à Cannes 2008 dans l’euphorie de la présence simultanée à l’écran de deux bombes anatomiques, Johansson et Cruz, on semble arriver à un point de non-retour, un moment où s’étiole déjà (Match Point date de 2005) le renouveau Allen. Osons le dire, Woody est carrément en vacances. Au moins c’est raccord avec le thème du film (Vicky et Cristina passent l’été à Barcelone : comment ça, tout est déjà dans le titre ?)

    Le Woody 2008, c’est relâche : scénario déjà vu sur lequel on a constamment trois temps d’avance, mise en scène absente où Allen se contente de filmer Barcelone et ses personnages à la touriste - Javier Bardem et Scarlett Johansson ne semblent pas vraiment concernés par ce qu'il se passe- ; personnages pour lesquels on ne peut avoir aucune empathie : tous guidés par des pulsions "incontrôlables" -seule raison invoquée : Barcelone est chaude, colorée et pleine d’architectures bizarres, et il y a Javier Bardem-, ils se détruisent eux-mêmes dans des abîmes de réflexions auto-analytiques (la palme à Vicky, qui a un peu de mal à jouer Woody Allen) sur le sens de l’amour. C’est ici et juste ici qu'on se dit : une mise en scène touriste, un scénario déjà vu, tous plein de défauts et cette tendance "ménage à trois, so modern !" : le film de Woody Allen est en fait le film de Cristina (Johansson), qui dit avoir joué et réalisé un film sur "la difficulté de l'amour" de 12 min. ! Celui-là, on ne le verra pas, bien sûr. Pour illustrer la jeunesse, l’inexpérience et –sûrement- la prétention de la réalisatrice, il aurait raté son film exprès (ou du moins, on ne pourra pas lui reprocher le résultat : c’est le film de Cristina !). Cette réflexion ne manquera sûrement pas d'être relevée par les adorateurs du cinéaste (Télérama anyone ?) pour crier au génie d'une mise en abîme invisible. N'empêche, le film est un gros ratage.

    Cerise sur le tùron, la structure du métrage est bordélique dans sa façon de contrôler le récit, la faute à une voix-off insupportable qui vient déjouer à chaque fois le peu de tension dramatique qui pourrait poindre. En totale contradiction avec le reste du film –et dirait-on, comblant des explications que Woody Allen n'aurait pas eu le temps de tourner-, elle semble indiquer que le film est une comédie, ce qui est pourtant loin d’être évident.

    Bref, quand on s’est ennuyé ferme tout du long, l'apparition de Penelope Cruz et sa scène sensuelle avec Johansson, baignée dans un rouge sur-signifiant inutile, ne suffisent pas à empêcher une des plus grandes déceptions de l’année.