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horreur - Page 5

  • Triangle (2011)

    Un film de Christopher Smith

    5959082058_dc0453c204_m.jpgAprès l'horreur à l'italienne d'Argento et ses mouches bien mystérieuses, faisons un saut dans le temps jusqu'à nos jours, où l'on découvre une toute autre conception du genre horreur / fantastique, où les sensations ne sont pas générées par des visions cauchemardesques, mais plutôt sur la construction même de la narration. Ainsi, à l'instar d'un Inception, et encore plus de TimeCrimes ou d'un épisode de la séminale Quatrième Dimension, Triangle est attendu sur le terrain de sa structure même. 

    Difficile de parler de Triangle sans éventer son principe : celui d'un récit qui tourne sur lui-même, se répète, à chaque fois avec un changement de point de vue. Ce qui n'est effectivement pas sans rappeler le vertigineux TimeCrimes, que Smith confesse pourtant ne pas connaître. A cette structure en emboîtements, qui voit un groupe d'amis prendre la mer pour une ballade ensoleillée et anodine, se superpose un véritable film d'horreur. Surpris par le manque de vent et un phénomène météorologique anormal (ils tombent tout à coup en pleine tempête, faisant chavirer leur voilier), ils trouvent refuge dans un bateau désert. Le groupe d'amis se faisant rapidement tuer par un mystérieux individu. 

    La déambulation dans les couloirs rappelle irrémédiablement Shining de Kubrick (comme le souligne le clin d'oeil de la cabine 237), et la trajectoire du personnage principal est comme encadré par un fond de mythologie (celui de l'éternel recommencement), ce qui assoit bien le film, mais n'efface jamais vraiment deux ou trois erreurs de construction dramatique. D'abord, il est difficile de croire une seconde que Jess (Melissa George, bien meilleure que dans 30 jours de nuit) s'engage de son plein gré dans cet engrenage infernal, pas plus qu'elle tue accidentellement un de ses compagnons, en n'arrêtant pas de le seriner qu'elle ne lui veut pas de mal. Le déroulé d'une structure narrative aussi complexe a deux écueils : ceux d'oublier les personnages, ce qui n'est heureusement pas le cas ici, et d'autre part, d'enfermer les destinées des personnages dans des schémas préconstruits qui devront rester immuables. Là-dessus, Triangle accuse un milieu carrément flottant, les événements se répétant à trois reprises, et, bien que beaucoup d'éléments changent, l'on est que peu surpris... tant qu'on est sur ce fameux bateau.

    Ce qui fait finalement la réussite de Triangle, c'est de pousser dans ses derniers retranchements sa terrible logique. En effet, loin d'arrêter la boucle temporelle à la répétition de la première image du film, Smith laisse filer et développe encore plus le personnage de Jess, donnant à voir un des univers les plus pessimistes qui soient, où les humains ne sont que pantins, jouets d'un destin réglé pour l'éternité. Smith nous aura prévenu avec ces premiers long-métrages, et a continué avec le très bon Black Death : ses histoires sont noires, très noires. Et ça lui réussit ! Black Death et Triangle n'ont, malgré tout, pas connu de sortie en salles dans nos contrées. Nous ne souhaitons qu'une chose à l'avenir : que l'histoire ne se répète pas et que les prochains films de Christopher Smith sortent bien... au cinéma !

  • Event Horizon, le vaisseau de l'au-delà (1997)

    Un film de Paul W.S. Anderson

    Étiqueté réalisateur de films d'action, Paul W. S. Anderson signait après Mortal Kombat (1995) cette bande ambitieuse qui en surpris plus d'un. Hommage à une kyrielle de films fantastiques, Event Horizon étonne par sa propension à balancer au visage du spectateur des plans impressionnants, faisant montre d'un raffinement esthétique inhabituel, en même temps que certains détails gore peu ragoûtants. Le résultat devait d'ailleurs être bien plus horrifique, les producteurs obligeant Anderson à couper son film d'une demi-heure après une projection-test désastreuse.

    L'histoire à comme un air de déjà-vu : un équipage de sauvetage vient à la rescousse d'un vaisseau ayant disparu sept ans auparavant... après la captation d'un étrange message. Les caractères, antagonistes, s'affrontent et enrichissent la dramaturgie. L'horreur surgit rapidement... Si la référence la plus évidente est l'exceptionnel Alien (Ridley Scott, 1979), mariant parfaitement suspense, horreur et science-fiction, d'autres chef d’œuvres du genre sont mis à contribution : Shining (Stanley Kubrick, 1980), pour la dimension "maison hantée" et d'autres clins d'oeil très directs (des flots de sang, des cadrages symétriques froids et précis, une réplique de la scène de la chambre 237), mais également La maison du diable (Robert Wise, 1963), ainsi qu'une citation de Suspiria (Dario Argento, 1977). On pense également au segment de l'omnibus Memories réalisé en 1995 par Koji Morimoto, La rose magnétique -qui doit également beaucoup à l'implication du regretté Satoshi Kon en tant directeur artistique. Ces glorieuses références prennent place dans un vaisseau aux formes religieuses marquées, les symboles de croix abondant un peu partout (vaisseau, vitres, marques diverses), qui s'offrent un luxe de détails ahurissant. Baignant dans une ambiance gothique, le visuel est vraiment réussi, car misant avant tout sur des effets spéciaux physiques (même le cœur du système, un gigantesque globe autour duquel tournoient trois anneaux : très réussi). Lorsqu'il opte pour des effets spéciux numériques, pas très développés à l'époque, on a du bon (le couloir aux lames de rasoirs) et du mauvais (les yeux rouges). La direction artistique est, dans tous les cas, à féliciter. L'usage récurrent du grand angle a part contre malheureusement tendance à étirer les personnages en longueur, une déformation parfois pas du plus bel effet.

    L'emballage ne cache cependant pas longtemps une intrigue bien trop légère (tout est téléphoné, il manque des enjeux forts, et une impression de réalisme qui pourrait faire durer la suspension d'incrédulité induite par le genre fantastique), et une narration plus progressive -le personnage de Sam Neill en fait malheureusement les frais.

    Il n'aurait pas fallu grand chose pour que Event Horison transforme l'essai, et la relative indulgence de la critique à son égard a sûrement à voir avec la carrière autrement nanardesque de son réalisateur. Et l'on peut dire en effet que Event Horizon est son film le plus fréquentable. Entre un Mortal Kombat qui nous peut-être fait marrer à l'époque à coups d'humour involontaire, ou d'un Resident Evil recyclant à peu près tous les trucs de Matrix, voire du calamiteux Alien Vs. Predator, le choix est vite fait. 

    Reste aujourd'hui un film techniquement abouti, mais qui manque d'un scénario solide. Est-ce que la version longue, que l'on ne verra jamais, aurait pu améliorer tout cela ? Rien n'est moins sûr... Anderson n'est cependant pas dupe des défauts de son film, il suffit d'écouter son très bon commentaire audio présent sur le DVD pour s'en convaincre. C'est déjà ça...

  • Pontypool (2008)

    Un film de Bruce McDonald

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    Dans un climat actuel relativement morose en ce qui concerne les films d'horreur réussis (les découvertes récentes de 30 jours de nuit et de Laisse-moi entrer ont eu du mal à faire émerger un quelconque intérêt), la découverte d'un petit film sans prétention, mais à l'efficacité et l'originalité indéniable, est tout à fait agréable. 

    Grant Mazzy, voix d'une radio locale, est pris avec la petite équipe qui l'entoure (sa productrice et la standardiste) dans un déchaînement d'événements horrifiques qu'ils vivent de l'intérieur, enfermés dans le studio d'enregistrement.

    Dès le prologue, l'ambiance a quelque chose de tout à fait unique, Mazzy (excellent Stephen McHattie, vu notamment dans Watchmen - les gardiens) déclamant à son micro une petite histoire banale qui finit dans un maelstrom de mots qui semble effacer à la parole toute signification propre, ne laissant la place qu'à une suite de syllabes incompréhensibles. Pendant ce temps, on suit à l'écran les circonvolutions d'une courbe d'oscilloscope qui frémit à la moindre parole. La séquance donne le ton (et bien plus) du film, hanté par la voix caverneuse de Mazzy, dont l'assurance, déjà quelque peu mise à mal (ancienne gloire de la radio nationale, il doit se contenter de la petite ville de Pontypool), est rapidement émiétée par les violences imcompréhensibles que semble subir la ville, et dont notre groupe est le rapporteur aveugle. 

    La perception des personnages en huis-clos, sur des événements dont ils ne peuvent être q'auditeurs, est non seulement une excelllente idée, mais également une transformation de l'essai en film qui est tout sauf évidente. Un plan fixe sur la courbe de fréquence de voix du reporter, seul personnage à témoigner de l'extérieur, aurait pu tomber à l'eau ; c'étair sans compter sur les rapports de forces savamment dosés, ainsi que l'empathie pour tous les personnages que l'on peut éprouver, tour à tour.

    On perçoit, hors de l'influence capital du livre dont l'histoire est tirée ("Pontypool changes everything" de Tony Burgess), l'idée de reprendre l'idée d'Orson Welles pour adaptation radiophonique de La guerre des mondes : le film, nous offrant un portrait de la réalité défomé par le prisme de la radio, questionne notre crédulité sur les événements qu'on nous décrit. Comme si l'on avançait dans le noir et qu'on cherchait des astuces impossible pour se guider tout de même. Derrière l'économie de moyens (et l'unté de lieu) dont fait preuve le métrage, se rappelle à notre bon souvenir les épisodes mémorables de La Quatrième Dimension de Rod Serling, situations impossibles, paraboles du comportement humain. Un personnage supplémentaire, apparaissant dans un mouvement théâtral, éjecté par une trappe, viendra donner de l'eau au moulin des interrogations de la petite troupe, et confortera la lecture du spectateur. Fort de son idée, le film avance comme une flèche vers son dénouement, non sans accuser le coup ne fois a situation posée.

    Même si le film est moins palpitant dans son deuxième tiers, les indices semés et l'apparente raison de l'épidémie de violence qui sévit (hommes et femmes assaillant des bâtiments comme un seul homme, sans raison, s'entre-tuant en déblatérant un charabia incompréhensible) force l'admiration par sa portée métaphysique, quasi-mystique. Mazzy, tel un prêtre halluciné, finra le film d'une façon bien étrange, qui peut être interprété de bien des façons. 

    McDonald signe un bon là une très bonne surprise, tendue et noire comme l'enfer, tirant le meilleur parti de ces maigres moyens. 

  • Les Vampires (1956)

    Un film de Riccardo Freda & Mario Bava

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    Commencé par Freda et terminé dans l'urgence par Mario Bava suite à la défection surprise du réalisateur en titre, Les Vampires marque sans conteste une date dans l'histoire du cinéma d'horreur et d'épouvante. Considéré comme le premier film d'horreur post-seconde guerre mondiale, son esthétique gothique, ses personnages et son scénario ont influencé de nombreux cinéastes.

    Alors directeur photo sur le film, Mario Bava aura l'opportunité de réaliser la moitié du métrage en deux jours et demi, Riccardo Freda parti avec un retard conséquent sur le planning de tournage. Avec peu de temps devant lui et un casting réduit, il réorganise le film, et rien n'y paraît à l'écran, tant l'intrigue est cohérente. Un tueur, surnommé le vampire, laisse ses victimes exsangues, le seul point commun  : leur groupe sanguin. La police d'un côté, et un journaliste à l'affût du sensationnel de l'autre, vont mener l'enquête. 

    Leur pérégrinations les mène dans un château sinistre, magnifiquement éclairé par Bava, dévoilant des ombres envahissantes, des toiles d'araignées dans tous les coins, et qui offre une ressemblance frappante avec celui d'Eward aux mains d'argent (Tim Burton, 1991), jusque dans l'oiseau aux ailes décharnées à la base de l'escalier. Avec son savant fou et ses personnages tourmentés, il préfigure aussi le film de Georges Franju, le très beau Les yeux sans visage (1960), et toute une panoplie de films italiens gothiques à l'image du Moulin des supplices (Giorgio Ferroni, 1960). 

    Une comtesse, jeune et à la beauté glacée imparable, règne sur le château et poursuit de ses assiduités le journaliste, ce dernier lui opposant indifférence, sinon dégoût. On retrouvera le même type de personnage dans The Vampire Lovers (1970), production Hammer de Roy Ward Baker, le lien avec les vrais vampires aux crocs proéminents n'étant pas si lointain. Car, si le film de Freda et Bava lorgne dès son titre sur un sentier fantastique, il déjoue les idées reçues en choisissant une résolution qui n'appartient pas au strict plan vampirique.

    Une intrigue solide, donc, soutenue par un visuel inventif et qui montre peu les limites de ses moyens, si ce n'est quelques stock-shots et autres plans des rues de Paris, intégrés à la va-vite alors que le tournage s'est déroulé en Italie. Avec ces plans d'extérieur extra lumineux, à la limite de la saturation des blancs, et d'autres, où le noir de la pénombre a tendance à envahir le champ, Les Vampires oppose un monde diurne et l'autre nocturne, un monde d'en haut puis souterrain, ce dernier étant le domaine où tout est caché, préparé en secret, pour permettre au mal d'exister en plein jour, de se montrer au vu et au sus de tous sans danger. La peur sourde surgit d'autant mieux lors des rares scènes d'épouvante explicites, d'ailleurs épaulées par des effets de maquillages bluffants.

    Sans temps mort, utilisant au mieux une structure classique linéaire, Les Vampires est aujourd'hui un film toujours agréable à suivre, au mystère omniprésent et lancinant, comme dans un cauchemar dont ne sait pas si on s'est sorti. Le studio Titanus, producteur du film, renouvellera l'effort pour le vrai premier film signé de la seule main de Mario Bava, Le masque du démon (1960). Dix ans plus tard, c'est encore sous son égide que sortira le premier long métrage d'un certain Dario Argento, intitulé L'Oiseau au plumage de cristal... 

  • La secte sans nom (1999)

    Un film de Jaume Balaguero

    5343145663_e692662630_m.jpgUne mère traumatisée à vie (à mort) par le meurtre de sa petite fille reçoit cinq ans après ce terrible fait divers un coup de fil. Sa fille  l’appelle…

    La veine fantastique, lorgnant vers des terminaisons occultes est depuis la fin des années 90 une de leur grandes préoccupations du cinéma espagnol, comme l'ont prouvé chaque film de Jaume Balaguero (Darkness, 2002), ou l'anthologie Historias para no dormir, très efficace dans le genre. 

    Pour son premier long-métrage de cinéma, Balaguero n'y va pas par quatre chemins : il nous assomme littérallement avec une intrigue labyrinthique et sordide. Images et environnement sonore oppressants au possible, cette histoire relatant la folie de fanatiques de la pureté est à couper le souffle. Dès la vision de cet électrochoc, on ne peut s'empêcher de penser aux scénarios retors de Anthony Shaffer, l’artisan à l'origine de chefs-d’œuvre tels The Wicker Man (Robin Hardy, 1973), Frenzy (Alfred Hitchcock, 1972) ou Le limier (Joseph Leo Mankiewicz, 1972). Celui qu’on croit être le héros -qui est en tous les cas le personnage central de l’intrigue, celui qui suscite la plus grande empathie- se retrouve piégé comme un débutant, tout comme le spectateur, qui éprouve une sensation de malaise quand il se rend compte qu’il s’est fait berner. Le film n’en acquiert que plus de force. Le côté un peu malin-m'a-tu vu pourra rebrousser le poil de spectateurs récalcitrants, mais c'est le jeu proposé par le film.

    Ces scénarios, pour peu qu’ils soient troussés correctement, marchent à tous les coups car le spectateur ne peut, en aucun cas, voir le coup de théâtre arriver avant que la victime ne s’en rende compte. Ici, la seule victime, c’est nous. Le résidu fictionnel, tricotté uniquement dans le but de nous mener en bateau, n’existe pas réellement. Nous sommes ainsi les seules victimes (consentantes!) de l’ingéniosité du metteur en scène. 

    L’astuce de ce genre de film réside dans le fait de déplacer le suspense véritable vers celui que le réalisateur veut nous faire éprouver. Cette conception est exactement celle du grand Hitchcock, avec un film comme Psychose par exemple, où il fait croire à un début d’intrigue policière (le vol d’argent et la course-poursuite qui s’en suit), pour mieux faire surgir l’horreur là où l’on ne l’attendait pas. 

    En dehors de ce scénario qui fait tout le film, reste quelques trouvailles visuelles pour mieux nous faire frissonner. La présence de cassettes vidéos, qui font avancer la trame du film, est assez angoissante. Cette astuce est utilisée afin de démultiplier les points de vue. Quand on se rend compte que ce qu’on a vu l’a aussi été par quelqu’un d’autre, on se retrouve avec un double du spectateur, un témoin de la scène sous un autre angle. Le recours à la vidéo témoigne bien de l'ère télévisuelle, infestée par les enregistrements et les caméras de surveillance. Depuis le début des années 80, elle représente le côté un peu angoissant d’un enregistrement sur lequel on se pose tout un tas de questions légitimes : où, quand, comment ? Certains réalisateurs ont su en capter tout le potentiel : Nataka avec son Ring, ou Carpenter avec Prince des Ténèbres, même s'il est aujourd'hui trop systématiquement utilisé. Efficace, terrifiant : du grand cinéma de terreur.