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Actus ciné/DVD - Page 6

  • Annecy 2016 : Belladonna (1973)

    Un film de Eiichi Yamamoto

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    Ouf ! Il en aura fallu du temps pour que je me remette à écrire... Un temps qui avait disparu comme par un mauvais coup du sort. L'envie, également, manquait. Mais aujourd'hui, c'est surtout ne plus écrire qui me manque, ne plus lire de commentaires (même si je sais que les blogs ciné sont tout de même moins suivis qu'à une époque). Plus de sept ans depuis la création du Film était presque parfait, et c'est avec un plaisir renouvelé que j'écris aujourd'hui. Il fallait aussi un film extra-ordinaire, dans tous les sens du terme, pour me replonger dans l'écriture : ce fameux Belladonna, dont, jusqu'au programme du festival d'Annecy 2016, je n'avais jamais entendu parler.

    Jeanne, abusée par le seigneur de son village, pactise avec le Diable dans l'espoir d'obtenir vengeance. Métamorphosée par cette alliance, elle se réfugie dans une étrange vallée, la Belladonna…

    Le vintage, c'est mon dada, vous le savez si vous suivez ces lignes : en voilà une belle tranche, jugez plutôt : un film animé japonais mêlant romantisme torturé, supplices de toutes sortes, une orgie d'anthologie mais aussi des visuels magnifiques, entre art nouveau et trip musical sous acide, rappelant Yellow Submarine ou préfigurant The Wall.

    Belladonna est donc, dès le départ, pensé comme un film pour adultes ; il s'agit du troisième opus d'un cycle initié par Osamu Tezuka, nommé Animerama, une sorte d'anthologie du cinéma érotique en animé. Le concept ne marcha jamais vraiment, mais la singularité de Belladonna réside dans les sources d'inspirations du réalisateur, moyen-âgeuse et européenne. l'héroïne, Jeanne, resemble ainsi à une égérie-type des années 60 comme Catherine Deneuve. Les contraintes de production obligent Yamamoto à tourner la moitié du film en image fixe, ce qui donne une drôle de sensation ; celle de regarder un roman-photo sacrément barré. Lorsque l'animation se montre, elle est brutale, choquante même, pour ceux qui ne seraient pas familiers avec les films d'exploitation japonais de la période, comme La femme Scorpion, ou plus encore Le couvent de la bête sacrée. Une imagerie sexuelle totalement débridée s'étale sur l'écran : pénis qui parle, zoophilie, viols, tout un catalogue de perversions dans lequel Jeanne se transformera peu à peu en celle que les hommes surnomme la Sorcière (c'est aussi le titre du livre-scandale de Jules Michelet, adapté ici).

    Voir Belladonna, c'est être projeté dans un autre temps, dont la charge punk et féministe ne s'est pas émoussée. C'est, comme on dit, une véritable curiosité : il serait insensé de passer à côté. Pour les plus réticents, sachez que nul autre que l'immense Tatsuya Nakadaï (Yojimbo, Hara-Kiri, Kagemusha, Ran...) assure la voix ténébreuse du diable avec lequel pactise la belle Jeanne...

    Crédit image : Belladonna of Sadness © Cinelicious Pics

  • 007 Spectre (2015)

    Un film de Sam Mendes

    220px-Spectre_poster.jpgLe nouveau Bond était comme il se doit, attendu au tournant. Tournant qu'il n'a, pour une fois depuis le début de l'ère Craig, pas très bien négocié...

    Soyons clairs : sur certains passages obligés, Spectre fait le job : scène pré-générique impressionnante en pleine fête des Morts, générique dans la moyenne (mais pourquoi cette chanson ? Quand on sait que Lana Del Rey s'est -peut-être- vu refusé son morceau 24 autrement plus bondien, c'est à n'y rien comprendre), dépaysement assuré autour du monde, jolie voiture... Mais si tout cela n'était pas le contraire de ce qu'il fallait faire ? Expliquons-nous.

    La période Craig s'est toujours différencié par une nouvelle identité : un Bond plus jeune qui a l'air de n'en faire qu'à sa tête, mais avec tellement de classe. Ici, entre tradition et modernité, le réalisateur Sam Mendes n'a pas su trouver la juste mesure. Pourquoi ? Tout en continuant dans une veine sombre, il réinjecte des ingrédients des Bond d'antan : une armoire à glace qui rappelle Oddjob (Goldfinger), un grand méchant trop familier, l'humour - alors que Craig est jusque là dans le registre décalé du sarcasme ; tout cela ne sonne pas juste. L'expliquer autrement serait inutile : le ton ne fonctionne pas. La faute ne vient pas des acteurs, mais des éléments choisis de l'intrigue, ainsi que de leur présentation.

    Le jeune Bond a désormais des rides, et il rentre dans les bottes de ses incarnations passées... ce retour en arrière semble trop nostalgique pour être honnête. Alors que le coup de la vieille Aston Martin, apparue comme un éclat du temps passé dans Skyfall, clin d’œil  charmant à la mythologie qui illustrait le voyage dans le passé effectué par le personnage, Spectre figure une régression ; toute magie s'est évaporée.

    Où est la nouveauté ici, si ce n'est par les modèles de voitures, les girls ? A, si : la nouveauté, c'est que le film est le plus long de la franchise. Bien trop long en vérité, Car Mendes trousse des scènes d'une longueur, d'une langueur impossible, incompatible avec l'actioner exotique et sexy que Casino Royale avait su si bien incarner. Elle est où l'évasion, là ? Franchement.

    Disponibilité vidéo : DVD/Blu-ray - éditeur : Fox Pathé Europa

  • Ciné d'Asie : La diablesse aux mille visages (1969)

    Un film de Chung chang-Wha

    22474933077_a253d7e81f_z.jpgQuelques années avant le succès planétaire de La main de fer, le réalisateur coréen Chun Chang-Wha réalise pour le compte de la Shaw Brothers cette comédie d'action érotisante qu'est La diablesse aux mille visages. S'inspirant ouvertement des Fantômas de Hunnebelle pour le personnage principal et la trame narrative, puis des James Bond pour le visuel riche et grandiloquent, le réalisateur signe une bande pop en diable, dignement épaulée par une partition jazzy.

    Repaire souterrain, jeunes filles affriolantes, fumigènes colorés, torture électrique et riches hommes d'affaires se prélassant de spectacles  sexy dans des salons chics, tout convoque une certaine esthétique du plaisir et de la légèreté, à contre-courant des films de kung-fu aux personnages torturés que nous livrent d'habitude la Shaw. La même année sort d'ailleurs Le bras de la vengeance, suite au One-armed Swordsman de Jimmy Wang-Yu, où transparaît déjà l'ambiance serial (gadgets, surenchère sanglante). A notre connaissance, La diablesse aux mille visages montre pour la première fois chez la Shaw un aspect sexy assumé (gros plans sur petite culottes et soutiens-gorges bien remplis à la clé), qui sera plus tard prégnant dans le magnifique Intimate Confessions of a Chinese Courtesan (1972), du maître Chu Yuan.

    Totalisant une petite heure et seize minutes au compteur, La diablesse aux mille visages est donc un film atypique du studio, où la légèreté est le maître mot. Deux policiers fripons tirent le film vers la comédie et clôturent d'ailleurs le métrage sur une note hédoniste et coquine.

    Le montage, serré, donne aux séquences d'action une dynamique appropriée. Les quiproquos induits par les changements de tête de la diablesse sont bien amenés (la journaliste éprise de son homme deviendra ainsi le témoin, par écran interposé, de la tromperie involontaire de celui-ci, qui croit pourtant faire l'amour avec sa promise...). Pour déjouer cette erreur, l'homme trouvera un mode de détection infaillible ! Les femmes fortes ont le dessus dans cette aventure fantaisiste, où elles n'hésitent pas à faire usage de leur don inné pour le combat rapproché.

    Quelle bonne idée de la part d'Arte de diffuser en novembre cette petite perle psychédélique : si vous aimez les spectacles colorés, funky et un brin parodiques, vous savez ce qu'il vous reste à faire !

    La page dédié au film sur Arte

    Disponibilité vidéo : DVD - éditeur : Wild Side Video

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  • Dracula et les femmes (1968)

    Un film de Freddie Francis

    22546235616_f6743d1804.jpgLe film, première co-production entre la Hammer Films et Warner Bros. / Seven Arts, est sorti récemment sur support blu-ray en France, accompagné de sa suite directe, Une messe pour Dracula : c'est l'occasion de revenir sur ce Dracula et les femmes. Véritable troisième épisode de la saga Dracula par la Hammer Films -on exclut le mensonger bien qu'excellent Les maîtresses de Dracula, dans lequel le comte n'apparaît pas, au profit d'un autre vampire, le baron Meinster-, Dracula has risen from the grave devait également être réalisé par le grand cinéaste maison, Terence Fisher. Étant immobilisé après un accident de la route, c'est Freddie Francis, chef-opérateur de talent (Les innocents, Jack Clayton, 1960) également réalisateur, qui prend les rênes du projet. Un épisode délicat, car pré-vendu aux financeurs sur la présence de Christopher Lee, lequel n'était pas au courant. Soucieux de ne pas être catalogué, il accepta tout de même, à contrecœur et après d'âpres négociations, ce nouveau film, pour lequel il a des mots durs :

    "Je n'ai pas osé [le] regarder tant je suis convaincu que c'est une œuvre médiocre. [...] [Le film] a été tourné avec une absence complète de style, de goût ou de qualité de production."
    Christopher Lee Club Bulletin, février 1969

    Même si le film n'est pas, loin s'en faut, le meilleur de la Hammer, on ne peut s'empêcher de sauver quelques éléments intéressants dans cette suite : une année s'est écoulée depuis le précédent Dracula, prince des ténèbres. Le mordant comte, souvenez-vous, avait fini emprisonné dans l'eau glacée d'un torrent gelé. La scène d'introduction montre pourtant la découverte d'une plantureuse morte coincée dans la cloche d'une église, deux points rougeoyants ornant son cou. Situation très étrange d'ailleurs, car plus tard, on retrouve Dracula piégé dans la glace et ranimé par quelques gouttes de sang... La projection de l'esprit démoniaque de Dracula suffit-il à vampiriser ses victimes ? Mystère... Il faut savoir que la présence du comte sanglant était souvent ajouté a posteriori de la rédaction du scénario, et l'on voit là, à mon avis, une des énormes incohérences produites par ce fonctionnement. Le film montre par contre d'autres sujet de contentement, comme celui de faire d'un prêtre un serviteur de Dracula.

    Complètement muet dans Dracula, prince des ténèbres, Lee retrouve ici un peu la parole, pour quelques tirades bien senties. Il est également fort peu présent à l'écran, mais chacune des ses apparitions sont marquantes, notamment dans les fabuleux décors sur les toits de la ville, qui sont le théâtre de nombreuses déambulations nocturnes. La raison de ses sanglantes exactions est, disons-le, risible : remarquant à son retour que son château, exorcisé et aux portes barrées d'une croix chrétienne, lui est inaccessible, il réclame vengeance et tuera les responsables. Dracula dans un revenge movie, franchement ?

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    Christopher Lee et Veronica Carlson

    Le titre français du film, bien différents de l'original, met l'accent sur les atouts physiques du métrage, notamment en la personne de la généreuse Veronica Carlson, Hammer Girl dont c'est le premier film pour la firme. A ses côtés, la jolie barmaid Zena (Barbara Ewing) fait également partie du package sexy de la Hammer, même si elle a dû pour cela opérer un rembourrage généreux pour garnir son costume.

    La trame principale est très décevante, se concentrant sur l'histoire d'amour entre Paul, athée et serveur dans une taverne, et Maria, belle-fille de Monseigneur Muller. Elle n'est sauvée que par la sophistication visuelle de l'ensemble, qui se résument les décors de Bernard Robinson et la photo de Arthur Grant (un peu d'abus de la machine à fumée, toutefois !) ; notamment, les filtres colorés apposés sur les apparitions du vampire donnent à ces moments une note onirique bienvenue. Un plaisir visuel qui aurait pu être décuplé par une meilleur scénario...

    La Hammer est à un tournant de son histoire, misant désormais plus sur le côté érotique et sanglant de son cinéma ; pour promouvoir Dracula et les femmes, les publicistes s'essayent à l'humour, dimension totalement étrangère à la Hammer... Aussi étonnant que cela puisse paraître, cet opus mineur fut le plus grand succès de la firme !

    Disponibilité vidéo : DVD/Blu-ray - éditeur : Warner Home Video France

    Sources bibliographiques :

    The Hammer Story / Marcus Hearn, Alan Barnes, 2007
    L'antre de la Hammer / Marcus Hearn, 2012
    Les Dracula de la Hammer Films, in Fantastyka n°11

    D'autres critiques du film :

    Devildead
    DVDClassik

    dracula,vampires,suites de films,hammer film,60's,fantastique

  • Jurassic World (2015)

    Un film de Colin Trevorrow

    jw-1.jpgIl n'est pas étonnant qu'en 2015, le cinéma américain continue de capitaliser sur ses valeurs sûres, notamment les super-héros et les suites de films. Malgré cela, Jurassic World a tout de même mis longtemps à se monter, le dernier épisode remontant tout de même à quasiment 15 ans. Plusieurs événements, indépendants de l'économie du cinéma, ont effectivement retardé la production, notamment les décès de Michael Crichton, auteurs du roman original, et de Stan Winston, responsable des effets spéciaux, en 2008. D'autre part, différentes pistes de scénario sont envisagés au cours des années, ainsi que plusieurs réalisateurs. C'est finalement le quasi inconnu Colin Trevorrow qui obtient la confiance des studios. Ensuite, une pluie de records : meilleur démarrage de l'histoire du cinéma, le palier d'un milliard de recettes atteint en 13 jours, et finalement troisième plus gros succès au box-office à ce jour, rapportant la coquette somme de 1,6 milliard de dollars (tout cela sera balayé par Star Wars : le réveil de la force, me direz-vous). Au vu de son budget important mais mesuré (150 millions), Jurassic World est une très bonne opération financière, qui ouvre la voie à une nouvelle vague de suites. Mais est-ce pour autant un bon film ?

    Certes, certains plans à effets et toutes les créatures sont bluffantes, car on y croit. Chris Pratt (Owen Grady) est toujours un aussi bon choix de casting que dans Les gardiens de la galaxie (James Gunn, 2014). Les scènes de foule impressionnent comme dans tout bon film catastrophe qui se respecte. Mais les bonnes nouvelles s'arrêtent là, car La trame du film est tout bonnement calquée sur le premier épisode. Pire que cela, plusieurs plans sont quasiment repris à l'identique, soutenus par la même musique de John Williams (même si c'est Michael Giacchino qui officie sur le score). On assiste éberlués à un remake éhonté du premier Jurassic Park, et tout le monde n'a pas l'air de s'en soucier. Qui plus est, le personnage féminin interprété par Bryce Dallas Howard est antipathique au possible, sa romance avec Grady n'est pas crédible pour un sou en plus d'être totalement survolée.

    Comment ne pas se rendre compte que le schéma directeur est identique, et que, au final, on fait la même chose (chaque petite séquence renvoie à son modèle) en moins bien ? et surtout, comment cette pâle photocopie a engrangé tant de bénéfices ? Cela montre surtout que le modèle du cinéma hollywoodien de divertissement, une "industrie de prototypes", est devenue une industrie de produits en série, régit par des franchises réduits à l'état de marques. Le comble étant que ce film en particulier constitue profondément ce qu'il a l'air de critiquer (la rentabilité financière à tout crin, la tentation trop belle du bigger and louder...).

    Réalisée sans génie, cette suite pataude (même le 3, pourtant pas fantastique, aura ma préférence en comparaison) aura en plus eu une conséquence directe sur une autre saga cinématographique bien plus attendue : Trevorrow est désormais le réalisateur attitré de Star Wars IX... (MAJ : il s'agira finalement de J.J. Abrams)

    Disponibilité vidéo : DVD/Blu-ray/Blu-ray 3D - éditeur : Universal Pictures France