Un film de David Slade
Que le réalisateur de 30 jours de nuit s’attaque à Twilight aurait pu laisser espérer un film intéressant, à défaut d’être réellement bon. Les rédacteurs de Mad Movies s’en sont tenus là pour déclarer une flamme, trop directe pour être honnête, à cette Hésitation. Malheureusement pour nous, c’est la débandade qui nous a saisi dans la salle (pourtant magnifique) du Grand Rex.
Après un premier épisode foiré dans les grandes largeurs (taillé sur mesure, ceci dit, pour les bandes d’ados à coup de grandes déclarations romantiques, qui ne résistent pas à l’épreuve filmique), le deuxième épisode marquait, avouons-le, un mieux. Première scène de rêve bien troussée, dans ce champ de fleurs où Bella se voit flétrir alors qu’Edward garde la fraîcheur de sa (vieille) jeunesse. Même si ça se gâtait ensuite, on restait sur une impression que la saga cinématographique pouvait monter en puissance… Las. C’était sans compter ce troisième opus, indigent à plus d’un titre.
Tout d’abord, énigme du marketing infusée dans le scénario du film : la pseudo Hésitation de Bella, qui, entre le vampire Edward et le loup-garou Jacob, a visiblement du mal à choisir. La voiture d'Edward ou la moto de Jacob ? Une valse terriblement bancale tant on la sent forcée et tout sauf plausible. Rappel : au cinéma, une fois qu’un personnage déclare à un autre une passion si forte qu’il peut lui donner sa vie (le choix de Bella), on ne peut jamais, jamais, faire croire à l’audience que son avis peut changer sur la question. L’enjeu principal de cet épisode est dès le départ inexistant.
Surfant comme à l’accoutumée sur une vague adolescente, les personnages se retrouvent souvent face au ridicule achevé des situations auxquelles ils doivent prendre part (si, en littérature, des gars se baladant toujours torse nu ne posent pas problème, avec Twilight, ça se transforme en film de plage entre gangs rivaux). Je décernerais bien volontiers la palme à la scène dite "de la tente", dans laquelle Jacob-le-chaud viendra apporter du réconfort à Bella devant la tête déconfite du pauvre Edward, qui lui, est tout froid. Je la donnerais bien, si le film n’était pas caviardé dans son entier par des répliques tenant du Harlequin pour ados, à base de "J’te plais, hein ? je sais que je te plais mais tu ne le sais pas", ou quand Bella et son père ont un échange surréaliste de niaiserie sur sa virginité, qui aurait eu sa place dans une série télé soap de fin d’après midi.
N'y a-t-il pour autant rien à sauver dans le film ? Retenons le personnage de Jasper, effacé et en proie à ses pulsions vampiriques dans les précédents, qui s'affirme dans ce film-ci. Il en devient plus intéressant, recelant une force intérieure et une maîtrise jusque là mise à mal.
Chaque rebondissement surprend cependant par le manque d’enjeu, justement, dont ils font preuve. Le film pâtît ainsi de son statut d’épisode de transition, qui remplit les trous de son scénario faiblard (les vampires et les loups garous doivent s’allier, malgré leur haine mutuelle, contre des vampires encore plus méchants, au nom de la protection de Bella, objectif rappelé jusqu’à plus soif) avec du papier toilette : cheap, jetable, comblant juste le minimum nécessaire.
La grande baston finale, annoncée dès le début, n’est elle aussi qu’une publicité mensongère : torchée à la va-vite, les vampires ne saignant même plus une goutte. Tout cela sonne comme de bons vieux clichés ? Allez voir Twilight, et je vous assure que pour ça, vous ne serez pas déçus du voyage.
Bref, on a juste assisté à une sorte de non-film, de mauvaise série TV sans pub au milieu. Où rires gênés, moqueurs ou silence consterné m’ont convaincu que non, Twilight n’est pas pour moi. Ah… Attendez… On me souffle dans l’oreillette que les livres Twilight sont bien de la même veine… Une adaptation fidèle, en sorte… Un sentiment un peu bizarre lors de cette séance dans ce qui reste aujourd’hui la plus grande salle de cinéma d’Europe. La séance cinéma ultime, enfin !