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fantastique - Page 11

  • The Shadow (1994)

    Un film de Russell Mulcahy

    6158277245_08fc2a850d_m.jpgPerdu dans les pourtant rares adaptations de comics des années 90, The Shadow ne fait pas beaucoup parler de lui, si ce n'est en termes condescendants. Il est certain qu'il ne fait pas le poids face aux Batman (1989, 1992) de Tim Burton, son modèle évident. Lamont Cranston, playboy le jour, n'y est personne d'autre que le redouté The Shadow, revenant après 7 ans de voyages en Asie, chassant le crime sans répit -les plus informés auront flairé une ressemblance de plus avec Batman, le même prétexte scénaristique ayant été utilisé dans la série animée de Bruce Timm, ainsi que dans Batman Begins (Chistopher Nolan, 2005). D'aucun pensent, comme pour Batman, qu'il ne s'agit que d'une légende urbaine de plus. Le film ne manque pourtant pas d'atouts. Le Shadow est tout d'abord apparu comme héros de pièces radiophoniques, avant d'être adapté en bande dessinée. 

    Russell Mulcahy, le réalisateur de Highlander (1986), est à la barre et n'a rien perdu de sa patte si reconnaissable : un montage cut, des plans aériens et des cadrages aux angles extrêmes (contre-plongées exagérées, éléments qui semblent vouloir jaillir du cadre) qui offrent une belle illustration des périples super-héroïques. Entre ces envolées baroques, Mulcahy donne à voir un New-York années 30 inspiré de Batman. Il en a cependant les moyens, ne lésinant pas sur les costumes, riches en détails, les véhicules, les riches intérieurs (le Cobalt Club, L'Hotel Monolith), ... L'ambiance rétro est ce qui est le plus réussi dans The Shadow, ainsi que son parfum de pulp, qui s'il peut passer pour cheap, n'en est pas moins intentionnel. Les personnages sont un peu surrannés, les dialogues dépassent la ligne du ridicule ; c'est une des évidences les plus criantes du film. L'on y ressent aussi un flottement incessant, le spectacle oscillant sans cesse entre rêve et réalité, hallucination et émerveillement. Rien que la séquence du Cobalt Club, où Lamont Cranston (Alec Baldwyn) est subjugué par la beauté et la présence de Margo Lane (Penelope Ann Miller), est révélatrice de cet aspect. Et pour cause : l'hypnose, cet état de demi-conscience, est le pouvoir que possède Cranston / The Shadow. Embrumer les consciences et les persuader d'une réalité, là est l'arme du playboy contre le crime. La révélation de l'Hotel Monolith, caché en plein jour, est un moment poétique épaulé par la belle mélodie de Jerry Goldsmith.

    Là où le Shadow s'avère une plus grande réussite que Le fantôme du Bengale (Martin Wincer, 1996), jouant dans la même cour -il s'agit aussi de l'un des premiers super-héros, évoluant dans le même New-York des années 30), si ce n'est pour ces décors, réside bien dans sa belle bande originale. Pour l'occasion, le compositeur de La Planète des singes, Patton ou Chinatown, ou des meilleurs opus cinéma de Star Trek, se fend d'un score symphonique mêlant le classique à quelques arrangements électroniques, passant allègrement d'un thème fort et positif à une respiration plus sombre, évoquant la nature schizophrène du personnage. On retiendra aussi les chants des trompettes, sonnant telles des sirènes de police sillonnant un New-York infesté par le crime.

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    The Shadow a malheureusement des défauts, au premier lieu desquels on peut citer les prestations des comédiens, toutes décevantes. Alec Baldwyn, même dans sa période de lumière, reste bien fade, si ce n'est sa voix grave seyant bien à son alter-ego des ténèbres. Mais alors que dire de Sir Ian McKellen, cantonné à un second rôle inepte, et John Lone (pourtant très bon dans L'année du dragon), dans le rôle du méchant chinois, qui nous rappelle les temps désuets de Fu Manchu ? On dira que malgré tout, cela fait partie du charme un tantinet dépassé du serial tel que l'a imaginé Mulcahy. Tim Curry, l'éternel Frank N Furter du Rocky Horror Picture Show, nous offre quand à lui un moment totalement fou, atomisant l'air avec sa mitraillette, dans un hall désert. Ses yeux démesurés, bien utiles dans Ça, fichent la frousse, en même temps que les méthodes expéditives du Shadow (quand on vous dit que Batman n'est pas loin). 

    Si The Shadow est aujourd'hui relativement oublié, ce n'est pas sans raison. Son caractère délicieusement daté, sûrement perceptible dès sa sortie, aura eu raison de lui. Pourtant, l'on pense que cet univers dans lequel on nous entraîne est saupoudré d'une désuétude tout voulue et assez savoureuse ; un cocktail divertissant au parfum bis, attirant malgré tout notre plus grande sympathie. 

  • Ciné d'Asie : Détective Dee, le mystère de la flamme fantôme (2011)

    Un film de Tsui Hark

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    Le sieur Tsui Hark se fait plutôt rare ses temps-ci. Son dernier film, Seven Swords, est sorti depuis sept ans déjà, malgré sa participation à Triangle (Hark, Lam & To, 2008). C'est dire si son nouvel objet filmique non-identifié était attendu (au moins par nous). Jadis précurseur et maître d'une fantasy fantasque et survoltée (Zu, les guerriers de la montagne magique et sa suite), en passant par le film de super-héros (Black Mask, 1995) et le film historique, avec la saga Il était une fois en Chine, Il nous joue un bien beau tour avec son Détective Dee, personnage ayant réellement existé s'employant à résoudre les affaires les plus tortueuses. 

    An 690. La veuve du dernier empereur en date va prochainement accéder au trône. Des meurtres inexpliqués -les victimes prennent feu et décèdent dans d'affreuses souffrances- viennent perturber les préparation de la cérémonie, dont la construction d'un gigantesque bouddha. 

    Malgré des effets spéciaux peu convaincants (les décors numériques se révèlent constamment sous leur vrai visage, soit un artifice voyant), Hark s'empare du matériau de base pour l'intégrer intelligemment dans son œuvre. Ainsi, les instants fantaisistes et extravagants peuplant sa filmographie se retrouvent ici par bribes savoureuses (un cerf qui parle, un mystérieux prêtre qui vole et s'évanouit dans les airs), pour ensuite trouver une explication rationnelle, déterrée des décombres de la croyance et des superstitions par le réaliste Dee. Comme on a plaisir à se laisser emporter par ce flot de magie, de complots, de romance échevelée et de cadrages survoltés -la bataille entre Dee et le Grand Prêtre est ahurissante ! Les personnages, interprétés par un casting impeccable (Andy Lau, Tony Leung Ka Fai, Li Bingbing), nous emmène dans un théâtre d'événements aussi invraisemblables que touchants. 

    Les belles scènes de combat, d'une lisibilité de tous les instants grâce aux chorégraphies de l'excellent Samo Hung, participent à la narration et amènent des idée visuellement excitantes. Celui opposant Dee au pseudo-grand maître, dans les grottes utilise le décor à bon escient, dessinant l'incertitude et les difficultés d'un combat dans ces zones sombres. Retrouvant par moment la furie cinématographique de The Blade, Tsui Hark démontre que son énergie, sa soif de filmer est intacte. 

    Entre policier, film de sabre et fantastique, Dee nous offre un cocktail inédit, recelant aussi de touches d'humour -la relation entre Dee et la jeune fille-, certes gâché par quelques effets spéciaux mal gérés. Il n'en est pas moins un bon film, haletant, dépaysant, constituant un retour aux premières amours de Hark pou les personnages historiques et les contes d'épées. Pas encore un chef d’œuvre, mais un moment vraiment plaisant, qui fait plaisir à voir dans une production contemporaine globale peu enthousiasmante.

  • Triangle (2011)

    Un film de Christopher Smith

    5959082058_dc0453c204_m.jpgAprès l'horreur à l'italienne d'Argento et ses mouches bien mystérieuses, faisons un saut dans le temps jusqu'à nos jours, où l'on découvre une toute autre conception du genre horreur / fantastique, où les sensations ne sont pas générées par des visions cauchemardesques, mais plutôt sur la construction même de la narration. Ainsi, à l'instar d'un Inception, et encore plus de TimeCrimes ou d'un épisode de la séminale Quatrième Dimension, Triangle est attendu sur le terrain de sa structure même. 

    Difficile de parler de Triangle sans éventer son principe : celui d'un récit qui tourne sur lui-même, se répète, à chaque fois avec un changement de point de vue. Ce qui n'est effectivement pas sans rappeler le vertigineux TimeCrimes, que Smith confesse pourtant ne pas connaître. A cette structure en emboîtements, qui voit un groupe d'amis prendre la mer pour une ballade ensoleillée et anodine, se superpose un véritable film d'horreur. Surpris par le manque de vent et un phénomène météorologique anormal (ils tombent tout à coup en pleine tempête, faisant chavirer leur voilier), ils trouvent refuge dans un bateau désert. Le groupe d'amis se faisant rapidement tuer par un mystérieux individu. 

    La déambulation dans les couloirs rappelle irrémédiablement Shining de Kubrick (comme le souligne le clin d'oeil de la cabine 237), et la trajectoire du personnage principal est comme encadré par un fond de mythologie (celui de l'éternel recommencement), ce qui assoit bien le film, mais n'efface jamais vraiment deux ou trois erreurs de construction dramatique. D'abord, il est difficile de croire une seconde que Jess (Melissa George, bien meilleure que dans 30 jours de nuit) s'engage de son plein gré dans cet engrenage infernal, pas plus qu'elle tue accidentellement un de ses compagnons, en n'arrêtant pas de le seriner qu'elle ne lui veut pas de mal. Le déroulé d'une structure narrative aussi complexe a deux écueils : ceux d'oublier les personnages, ce qui n'est heureusement pas le cas ici, et d'autre part, d'enfermer les destinées des personnages dans des schémas préconstruits qui devront rester immuables. Là-dessus, Triangle accuse un milieu carrément flottant, les événements se répétant à trois reprises, et, bien que beaucoup d'éléments changent, l'on est que peu surpris... tant qu'on est sur ce fameux bateau.

    Ce qui fait finalement la réussite de Triangle, c'est de pousser dans ses derniers retranchements sa terrible logique. En effet, loin d'arrêter la boucle temporelle à la répétition de la première image du film, Smith laisse filer et développe encore plus le personnage de Jess, donnant à voir un des univers les plus pessimistes qui soient, où les humains ne sont que pantins, jouets d'un destin réglé pour l'éternité. Smith nous aura prévenu avec ces premiers long-métrages, et a continué avec le très bon Black Death : ses histoires sont noires, très noires. Et ça lui réussit ! Black Death et Triangle n'ont, malgré tout, pas connu de sortie en salles dans nos contrées. Nous ne souhaitons qu'une chose à l'avenir : que l'histoire ne se répète pas et que les prochains films de Christopher Smith sortent bien... au cinéma !

  • X-Men : le commencement (2011)

    Un film de Matthew Vaughn

    5909044021_c5998762c3_m.jpgQu'on se le dise : l'anglais Matthew Vaughn est le meilleurs réalisateur de film fantastique en activité ! Déjà derrière la réussite de Stardust, il nous livre avec ses X-Men des origines le plus jouissif film de super-héros depuis... Kick-Ass, qu'il avait réalisé en 2010. Pourtant, l'affaire était loin d'être entendue.

    Disposant de 13 mois pour boucler un film titanesque, du casting à la direction artistique jusqu'au tournage et à la post-production maousse (plus de mille plans à effets spéciaux), c'est à un véritable marathon que Vaughn s'est livré. Perfectionniste et attentif à mettre sa griffe sur le projet, il aura tourné et retouché le film jusqu'à la dernière minute. Et son travail passionné est diablement payant, son film s'inscrivant clairement comme le meilleur épisode de la saga... dont il était parti en claquant la porte quelques années plus tôt, lorsqu'il devait réaliser X-Men 3 (mis en boîte par Brett Ratner). Ironie, quand tu nous tiens, c'est Bryan Singer lui-même, réalisateur des deux permiers opus, qui est venu chercher Vaughn.

    Deux idées fortes hissent le film plus haut que le tout-venant des films de super-héros : premièrement, la volonté d'en faire un vrai film d'époque (la crise des missiles à Cuba fait office de toile fond, avec costumes, décors et accessoires ad hoc), et ensuite d'orienter le feeling du film vers le film d'espionnage à la James Bond ; la grande histoire croise les destinées particulières, dès la première séquence du camp de concentration. Décorum et péripéties ancrent le film dans des références qui, si elles ne sont pas nouvelles, clament leur originalité lorsque le sujet principal se cantonne aux  super-héros.

    Comme il l'avait précédemment prouvé avec Kick-Ass, Vaughn sait bien que plus un film se déroule dans un espace-temps fantastique, plus le film doit être à l'écoute de ses personnages. Ces derniers sont le coeur du film et ne sont nullement sacrifiés par l'action, tout de même bien présente. Eric et Xavier évoluent donc parallèment au fil des années, développant chacun une philosophie sur leur état de mutant. Il est clair que l'environnement familial (aisé pour Xavier, marqué par la violence et la mort pour Eric) joue un rôle prépondérant. Et, aussi surprenant que cela puisse paraître, les postures de chacun, bien qu'antagonistes, trouvent d'abord des points d'achoppement, pour ensuite lentement les éloigner. La progression de leur relation est extrêmement bien pensée, les séquences s'écoulant en désignant subtilement leur différence. La soif de vengeance d'Eric, on le sait bien, ne peut être étancher que par les extrêmes, tandis que Xavier, philosophe, prend du recul.

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    Le film n'est pas avare de séquences drôles, comme les affectionne Matthew Vaughn, n'hésitant pas à montrer les jeunes mutants pour ce qu'ils sont : des enfants en construction, pour qui le plus important, pour un temps, est de s'amuser. La séquence de la recherche des mutants, notamment, est euphorisante, et l'apparition clin d'oeil de Hugh Jackman est un sommet dont on aime à se le rappeler, longtemps après la projection.

    Michael Fassbender, dans le rôle d'Eric / Magnéto, est tout simplement exceptionnel. Chacune de ces apparitions laissent exploser son charisme, animal mais fragile, épaulé par la musique efficace d'Henry Jackman. Pour lui tenir tête, James McAvoy est lui aussi un très bon choix, tant on entre en empathie avec tous ses profils. Ainsi, quasiment tous les personnages s'en sortent sans caricatures, même si l'on peut reprocher à Kevin Bacon / Sebastian Shaw d'en faire un peu trop, dans la veine des méchants extravagants des James Bond avec Sean Connery (et January Jones lui rend bien ça, en blonde volcanique bien éloignée de son rôle dans Man Men). 

    Si, dans l'ensemble, les effets spéciauix tiennent la route, c'est tout de même dans cette partie que le film paie le tribut de sa chaotique création. Effets numériques par trop voyants, ou maquillages inégaux (l'armure de Magnéto, qui, si elle respecte scrupuleusement le look du comics, donne dans le mauvais goût), c'est là et seulement là, à notre sens, que le bât blesse. 

    Le voyage est en tous les cas fort plaisant, et l'on ne serait pas contre (pour un fois), revoir ses personnages campés tous admirablement. Et l'on se dit que, tout de même, le "retour aux origines" sied bien à ses super-héros souvent en manque de racines (psychologiques, sociales, ...).