Un film de Nicholas Meyer
Il y a longtemps, dans la même galaxie, j'avais subi le premier épisode cinématographique de la série Star Trek : le fait que Robert Wise œuvrait au poste de réalisateur, me laissait penser que ça ne devait pas être si mauvais. Bien mal m'en a pris, car deux heures durant, un ennui féroce, de ceux qui vous énervent, m'avait envahi. Ne connaissant pas l'univers touffu de Gene Roddenberry et tentant de dévorer tout ce qui ressemble de près ou de loin à de la science-fiction, je décidai récemment de m'y remettre avec ce numéro 2. Et cette fois, ça a pris.
Après un générique contemplatif nous faisant voyager aux confins de l'espace, le film commence par une séquence atypique, montrant une femme aux commandes de l'Enterprise, le vaisseau historique de Kirk et Spock. Il s'agit de la mimi Kirstie Alley, charmante avec ses oreilles pointues. On avait laissé le vaisseau dans les mains du vieillissant équipage des origines (le même depuis la série télé originelle de 1966) à la fin de Star Trek, le film ; or là un vent de jeunisme semblait souffler. Cette première séquence cachait un test pour les nouvelles recrues de la compagnie. L'épisode est ainsi marqué par une réflexion sur la vieillesse, Kirk le premier ayant l'impression tenace d'être dépassé, lui autrefois symbole de l'aventure à risques, aujourd'hui forcé de chausser ses lunettes pour lire, cantonné au rôle d'instructeur pour la génération émergente (bien qu'il s'agisse d'une promotion, sur le strict plan hiérarchique).
Parallèlement au questionnement de Kirk sur le sens qu'il peut encore donner à sa vie, resurgit du passé Kahn, homme que Kirk a autrefois laissé végéter sur une lointaine planète (vu dans un des premiers épisodes de la série, il est incarné dans les deux cas par Ricardo Montalban). L'ennemi, comme le héros, est vieillissant, mais fait montre d'une énergie certaine à l'exécution de sa vengeance. Sa tenue étrange, offrant un décolleté généreux, préfigure les combinaisons Fremen de Dune (David Lynch, 1984) ; le film est ainsi marqué dans son look par les années 80, offrant un aperçu de ce que seront les bad guys excentriques de Mad Max 2 (George Miller). Au passage, on observe la torture inventive et dérangeante imposée à des membres de Starfleet : des vers s'introduisent dans leurs conduits auditifs, transformant les opposants en de dociles agneaux prêts à offrir leur services.
Le cœur du film est une machine de terraformation, Genesis, qui permet de transformer n'importe quelle planète aride en oasis foisonnante. La démonstration de son fonctionnement occasionne par ailleurs une des premières séquences d'effets spéciaux de synthèse, réalisée par ILM, qui s'avère encore aujourd'hui tout à fait convaincante. Les plans composites montrant une partie de planète verdoyante participent aussi à rehausser un ensemble visuel autrement courant.
Le film revendique sa dimension serialesque, avec ses méchants caricaturaux, et le regretté Ricardo Montalban, habitué des séries (La planète des singes, L'île fantastique) offre tout son panache et sa démesure pour incarner un personnage si excentrique.
James Horner, qui signe la musique du film, y invente des mouvements qu'il reprendra dans Aliens (James Cameron, 1986) quelques années plus tard ; son accompagnement s'avère efficace, mais est surclassé par ses travaux ultérieurs.
Les relations Kirk / Spock trouvent dans le film une résonance particulière, concernant la trajectoire du Capitaine historique et pour la fin du film, qu'on ne dévoilera évidemment pas. La bonne tenue de cet ensemble encourage en tous les cas à la récidive dans cet univers, Nicholas Meyer (le très bon C'était demain, 1979, avec Malcolm McDowell en H.G. Wells) réussissant à donner corps à une dramaturgie limpide même pour les novices de l'univers, tout en rendant proche chacun des personnages.