Un film de Jimmy Sangster
Luxure pour un vampire : tout un programme pour Jimmy Sangster, plus reconnu en tant que scénariste à la Hammer Film (Frankenstein s’est échappé, Le cauchemar de Dracula, La revanche de Frankenstein, la sainte trinité Hammer en quelque sorte) que réalisateur au sein de la même firme. Pour son deuxième film à ce poste, il s’attelle à la suite de The Vampire Lovers, sorti l’année précédente, et donc aux personnages des vampires Karnstein. Toujours porté par le trio Tudor Gates (scénario - Harry Fine et Michael Style (production), le film offre quelques changements dans la continuité des personnages originellement créés par Le Fanu. Mircalla, auparavant interprétée par Ingrid Pitt, est cette fois incarnée par la toute danoise Yutte Stensgaard, et qui offre un tout autre regard sur la comtesse. Alors que Ingrid Pitt campe une lesbienne, femme forte qui fait plier les hommes à sa volonté par son regard hypnotique, Yutte lui oppose l’hétérosexualité (cependant relativisée par l’entourage d’un pensionnat de jeunes filles), sa blondeur et son teint diaphane, ses grands yeux bleus laissant entrevoir une fragilité toute nouvelle. Elle va s’exprimer dans le scénario par un amour (encore) contre nature avec un homme non vampire qu’elle va essayer de protéger d’elle-même. La love scene qui les voit s’embrasser langoureusement est d’ailleurs très belle, Mircalla semblant constamment hésiter entre mordre-tuer et embrasser-aimer, comme si ces deux dimensions co-existaient continuellement.
Les films Hammer, et particulièrement leur cycle vampirique, font la part belle aux créatures féminines, véritable scream queens qui peuplent de leurs atours avantageux les bandes d’exploitation de la firme. Ainsi, on les rapprochera des James Bond Girls, qui accompagnent, ou ornent, c’est au choix, les aventures du personnage principal. On notera que, dans cette trilogie Karnstein, les rôles s’inversent, voire fusionnent. La femme, autrefois victime ou simple complice, devient ici le bourreau, le personnage puissant. Elle renverse ainsi le traditionnel rapport de force maître / élève (car l’homme qui est éperdument amoureux d’elle n’est autre que son professeur). Les femmes submergent d’ailleurs le récit par leur nombre (l’armada du pensionnat), et par leurs responsabilités : le pensionnat est dirigée par un duo féminin qui se bat pour le pouvoir. Les hommes qui voudront combattre cette structure sociale seront punis de mort "par crise cardiaque" (l’inspecteur et le père de la jeune fille tuée par Mircalla), comme le justifiera le docteur bien spécial de la comtesse. Voilà qui en remontre au monde des vampires, d’habitude administré par les hommes. Lust for a a vampire fait bien suite à Vampire Lovers sur ce point, lui qui amenait le lesbianisme et la domination féminine tout en même temps.
A part cela, le film traduit la nouvelle orientation nudité oblige du studio ; ici, tout prétexte est bon à prendre pour dévoiler le corps des actrices : séquences dans le pensionnat, massage entre deux colocataires (mémorable passage du oups ! ta bretelle tombe toute seule !), re-naissance de Mircalla, bref tout (y) passe, et rien n’a de justification scénaristique : carton rouge...
Le padre vampire, qui apparaissait parcimonieusement dans Vampire Lovers, prend ici plus d’importance, l’acteur (Mike Raven) n’ayant été visiblement choisi uniquement pour sa ressemblance avec Christopher Lee ; lors des gros plans de ses yeux injectés de sang, c’est particulièrement flagrant ! Mais, malgré cette feinte gémellité, rien du charisme du pilier Hammer ne transparaît.
Pas mis en scène, mais doté comme à l’habitude de beaux costumes, et de décors "minimalistes" Lust for a vampire a ses bons côtés ; malgré tout, ses faiblesses (et son générique rose fluo digne d’un téléfilm érotique cheap) ne donnent pas vraiment envie de voir la suite que constituera Twins of Evil, alias Les sévices de Dracula par chez nous. Nous en serons pourtant, au moins parce qu’on peut y voir l’immense Peter Cushing !
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Lust for a Vampire (1971)
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Capitaine Kronos, tueur de vampires (1974)
Un film de Brian Clemens
Produit par une Hammer Film sur le déclin, Capitaine Kronos fait glorieusement partie des nanards de la firme anglaise. C’est à un scénariste télé reconnu -Brian Clemens, créateur de la série Chapeau Melon et Bottes de cuir, dont ce sera le seul film cinéma-, qu’échut cette réalisation, après avoir convaincu le patron du studio en écrivant le scénario de Docteur Jekyll & Sister Hyde (Roy Ward Baker, 1971). Clemens assure donc tout à la fois le poste de scénariste et de réalisateur sur Kronos.
Côté scénario, se sent le besoin d’originalité à tous prix, dans lequel un capitaine parcourt la lande désertique et vient en aide à quelques villageois paniqués par la mort subite de plusieurs de leurs voisins. Une mort bien étrange : il deviennent instantanément vieux, carcasses d’os dont la vie semble avoir été comme aspirée. Kronos chasse ainsi plus sur les terres du film d’aventures que du strict vampire flick, les principales figures imposées y étant absentes, ou si peu évoquées. La première chauve-souris apparaît à la 47ème minute, les crocs d’un vampire encore plus loin. Il est clair que le vampire du titre doit plus sa présence à un opportunisme commercial qu’à une volonté d’ancrage dans la mythologie vampirique.
Melting-pot improbable, le film aligne d’abord des références westerniennes -toutes les scènes de la taverne, incluant le coup classique de la pièce jetée dans le crachoir, vu dans Rio Bravo (Howard Hawks, 1959), ainsi que la bourse d’or qui glisse sur le comptoir comme la bonne bière mousseuse qu’attend le cow-boy éreinté. On y colle des éléments japonisants : Kronos manie le katana, qui lui permet des percées typiques, mais pas vraiment sanglantes... L’hémoglobine, de même que tout le production design (décors, costumes, véhicules, ...), a souffert d’un budget qu’on devine anémique. On découvrira d'ailleurs dans le cours sinueux du récit un personnage affilié aux Karnstein, famille vampirique ayant déjà été porté à l'écran par la Hammer, notamment dans The Vampire Lovers (Roy Ward Baker, 1970). A cette tambouille de genres s’ajoute le film de cape et d’épée, qui occasionne des joutes d’une maîtrise pitoyable -il faut avouer que Horst Janson, acteur télé germanique incarnant le rôle-titre, manque cruellement de crédibilité et de charisme, ce qui rend encore plus risibles ses phrases choc assénées à tout va comme s’il était un dur, un vrai. Lui qui se trimballe toujours torse nu à coup de "il est l’heure de livrer bataille !" nous gratifie ainsi de la désormais scène culte dite "des sangsues", dans laquelle sa seule expression faciale ne bouge pas d’un poil ! Le reste du casting est aussi peu inspiré (Shane Briant, croisé dans le morbide Frankenstein et le monstre de l’enfer), à l’exception notable de Caroline Munro, l’une des plus belle Hammer girl, dont la carrière au sein de la firme est assez limitée, vu qu’on ne l’apercevra que dans Dracula 73 (Alan Gibson) sorti l’année précédente en France. On a néanmoins pu apprécier ses formes généreuses dans le baroque et grand-guignolesque L’abominable docteur Phibes (Robert Fuest, 1971) ou encore le Bondesque L’espion qui m’aimait (Lewis Gilbert, 1977). Son rôle dans Kronos, dans lequel elle ne dit pas grand-chose, se rapproche d’une Nova dans La planète des singes, brune qui fait la moue et qui, ici, est juste bonne à s’accoupler avec le héros, ou encore servir d’appât à ce mystérieux vampire...
L’intrigue est ainsi construite sous une forme de whodunnit, l’idée étant de laisser planer le suspense sur l’identité de ce vampire. Suspense fort mal géré dans ce film sans rythme, que les frêles épaules de Clemens ont bien du mal a mener à son terme. Cadrages inexistants n’exploitant pas le pourtant beau décor (vide), montage mou, bref rien de très alléchant. On pourra apprécier, au mode second degré enclenché, ce syncrétisme mythologique dont Le pacte des loups (Christophe Gans, 2001) ou Van Helsing (Stephen Sommers, 2004) sont les représentants contemporains. Le film de Clemens est d’ailleurs sûrement le modèle caché de Van Helsing, Kronos ayant été envisagé au tout début comme le premier épisode d’une franchise, qui verrait ensuite notre héros affronter Dracula et Frankenstein. Ramener tout le bestiaire qui a fait la notoriété de la firme, en quelque sorte... Faut-il préciser que cette possibilité fut rapidement abandonnée ? -
Dossier (2/2) : Entretien avec un vampire (1994)
Voici la suite de la première note consacrée aux vampires du film de Neil Jordan.
Un humour couleur rouge sang
Scène charnière, la transformation de Louis par Lestat, vampire plusieurs fois centenaire, est positionnée en début de métrage, l'histoire ne perdant pas de temps à enchaîner les séquences signifiantes. Elle laisse cependant la place à une scène magnifique, retranscrivant bien, comme dan le livre, le réveil du nouveau vampire, ses yeux ne voyant pas la même réalité ; en témoigne, une statue qui le suit des yeux... Brad Pitt campe ce vampire à l'élégance glacée, un vampire trop humain. Sa transformation n'a pas été un choix, contrairement à ce que semble lui proposer d'abord ce fourbe et séducteur Lestat ; irrité par sa nature même, le fait de devoir tuer des être vivants pour subsister n'étant pas de son goût. Il s'évertuera à tuer toutes sortes de petits animaux -rats, pigeons, chiens- alors que Lestat se délecte de sang humain -la plupart du temps de jeunes femmes sans défense. Renforçant la caractérisation de son personnage, ce refus d'en attenter à l'humain, pour conserver un semblant d'humanité, offre finalement des moments de comédie très noire (la vieille enfarinée criant de tous ses poumons la perte de ses précieux caniches, exsangues, ou le paradoxe d'un vampire, cette créature invincible pouvant mettre à genoux toute vie, cantonnée à se rabattre sur ce que Lestat appellerait de la viande de second choix), de même la séquence, plus éloignée dans le film, d'éducation de Claudia, petite fille faite vampire par Lestat. Elle tue son professeur de piano -il s'effondre sur le clavier, comme pris d'un soudain endormissement- ou la couturière venue spécialement pour prendre ses mesures. Ces meurtres horribles, perpétrés qui plus est, par un enfant, berceau de l'innocence, sont à la fois d'une perversité absolue (l'usage, par Claudia, de sa nature enfantine, pour attirer les innocents) et décalés, de façon humoristique, par la façon dont le filme et le monte Jordan, épousant en cela le sentiment qu'éprouve la fillette. Elle, qui prend cette mascarade comme un jeu, dont elle serait, à chaque fois, la grande gagnante. Le sourire de la jeune Kirsten Dunst est, à ce titre, extrêmement ambigu.
L'homo parentalité
Évoquée dans le film (encore plus dans le livre), présente de façon sous-jacente, la relation incestueuse qu'entretiennent Louis et Claudia, constitue un autre angle d'attaque, donnant une bizarrerie sans nom aux déambulations fantomatiques du trio. La pulsion de meurtre, incarnant le désir, tout autant sexuel que mortifère, participe à cette ambiguïté jamais résolue. A ce premier duo, s'oppose la paire Louis / Lestat, traitée de façon clairement homosexuelle (l'air précieux et maniéré d'un Lestat aux longs cheveux blonds, Louis l'entretenant sans mot dire, les deux éduquant Claudia comme leur fille), apporte une couche signifiante supplémentaire, qui ajoutée à toutes les autres, font bien de Entretien avec un vampire beaucoup plus qu'un simple film fantastique utilisant le motif du vampirisme. Claudia, au fil des années femme prisonnière dans un corps d'enfant, aime réellement Louis, ce qui "justifie" la pulsion incestueuse, mais reste constamment dérangeante. Elle n'aura de cesse de chercher un modèle de féminité dont elle est dépourvue. Pour cela, elle figera cette beauté inatteignable, dans la mort -la servante- ou par le vampirisme -une belle femme au hasard, ici plus pour avoir un référent matriarcal.
Entretien avec un vampire, le film, exploite bien, sans le dénaturer, les pistes foisonnates du roman, qui offre un fantastique comme on aimerait en voir plus souvent : construction au cordeau, facettes multiples, interprétation incroyable (mention spéciale à Tom Cruise et Kirsten Dunst). Les sombres abysses vers lesquelles nous plongent les vampires sont sans fins...
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Dossier (1/2) : Entretien avec un vampire (1994)
Un film de Neil Jordan
Le réalisateur a eu le nez fin, au milieu de cette décennie 90, d'accepter de porter à l'écran le roman éponyme d'Anne Rice, qui adapte ici son propre récit ; Entretien avec un vampire reste aujourd'hui dans le cercle fermé des très belles fictions vampiriques du cinéma. Partisan d'une image léchée, Neil Jordan a notamment réalisé la marquante Compagnie des Loups (1984), conte macabre et gothique qui offre certains points d'achoppement avec cet Entretien ; malgré l'évidente réussite d'autres éléments de sa filmographie, on peut avancer sans peine que ce film de vampires reste aujourd'hui le sommet de sa carrière.Un fantastique littéraire
Ainsi, alors que Dracula (F.F. Coppola, 1992) a remporté un franc succès, et que, dans le même temps, Kenneth Brannagh réalise sa version d'un autre grand mythe fantastique, Frankenstein (1994), Jordan se lance, tout autant que Anne Rice, dans l'adaptation du roman culte de l'américaine, qu'elle écrivit en 1976. On remarquera que, de la même manière que les deux films fantastiques pré-cités, Entretien avec un vampire entérine une fidélité à l'oeuvre littéraire jusque dans son titre ; si Coppola met en avant Bram Stoker et Brannagh Mary Shelley -les deux titres originaux se lisant bien Bram Stoker's Dracula et Mary Shelley's Frankenstein, les réalisateurs s'effaçant devant la paternité originelle de chaque récit, Jordan appose un plus discret mais très clair sous-titre à son Interview with a vampire : The vampire chronicles. Cet ajout, reprenant le titre intégral de l'oeuvre d'Anne Rice, induit le récit comme étant la première pierre à l’édifice d'une oeuvre plus grande, appelée à accueillir une suite, ce qui n’est toujours pas le cas jusqu’à présent.
Mises en abîmesArmé de la plume érudite et assurée de la romancière, le film franchit un cap qualitatif et devient par là une adaptation très fidèle au texte d'origine. Utilisant le même procédé de mise en abîme, Louis le vampire narrant, à notre époque, ses aventures au micro d'un journaliste, le film y revient cependant moins que dans le livre. La relation journaliste (Christian Slater) / vampire (Brad Pitt) est cependant extrêmement intéressante en nous amenant sur les terres de la confrontation réalité / fiction, et de son impossible différenciation. A ce titre, une des séquences les plus réussies du film est consacrée à cette dichotomie, à savoir le théâtre grand-guignolesque des vampires parisiens, présidé par Armand (Antonio Banderas).
Des amateurs assistent à un spectacle très macabre dont tous les acteurs sont des vampires qui jouent ... des vampires -les différentes strates de la mise en abîme deviennent vertigineuses ! Le clou du show est le sacrifice d'une jeune femme, bien réel, appelée à être dévorée par la horde de vampires. La fiction se confond ici avec la réalité, les spectateurs, dégoûtés, hésitant eux aussi quant à la teneur réelle des événements dont ils sont témoins. Les vampires jouent également au magicien, leurs pouvoirs leur permettant d’incarner cette magie (par la lévitation notamment), là où la frontière entre le fantastique et le réel indiscernable. Cette séquence, hautement traumatisante par sa mise en scène macabre, les vampires se jetant littéralement sur la victime innocente en une nuée noire d'insectes assoiffés, illustre le côté sombre et malsain que se permet le film, la fidélité à l’œuvre, là encore, primant sur le véhicule à stars. On y comprend toute l'emprise, la transe, ici plus démoniaque que réellement séductrice, dans laquelle les vampires tiennent leurs victimes. On découvre aussi les vampires en tant que groupe social constitué (le monde des vampires, dans le livre comme dans le film jusque-là, étant réduit aux personnages de Louis -Brad Pitt, Lestat -Tom Cruise et Claudia -Kirsten Dunst), une confrérie hiérarchisée, organisée pour survivre -la tenue même du spectacle garantissant chaque soir leur ration aux suceurs de sang.
la suite ici -
Le baiser du vampire (1962)
Un film de Don Sharp
Chez la Hammer Film, il y a les cinéastes et les œuvres révérés, considérés comme majeurs, et les autres. Ainsi, Terence Fisher, Val Guest, John Gilling sont incontestablement les chefs de file. Don Sharp, lui, est défintivement un "autre", bien loin de cette sphère auréolée, malgré une indéfectible fidélité envers la firme, et de bons films à son actif. On lui doit ainsi Les pirates du diable (1964), les premiers Fu-Manchu (1965) et Raspoutine, le moine fou (1966), tous avec Christopher Lee dans le rôle-titre, LA star Hammer.
Avant cela, on donne au Don l’occasion de réaliser ce Kiss of the Vampire, en plein dans la vague des Dracula de maître Fisher, alors que Christopher Lee rechigne déjà à chausser les crocs une nouvelle fois pour ses macabres aventures pelliculées.
Et, hors continuité Dracula, on va alors assister à l’un des meilleurs crus vampirique de toute la filmo Hammer, pas moins !
L’introduction est classique : un cortège funèbre, des gens éplorés, puis, au loin, une silhouette solitaire qui se détache. Un plan rapproché nous le rend plus détaillé : c’est un homme âgé, observant la procession d’un œil anxieux. Les croque-morts font descendre le cercueil vers l’endroit de son dernier refuge, et notre homme est tout près : alors qu’on lui tend une pelle pour verser la première fournée de terre, il la jette violemment vers le cercueil, lequel ne résiste pas à la force du coup : défoncé, le corps gisant en son sein forme une flaque de sang d’un rouge envahissant. Les villageois sont horrifiés : cette réaction est, encore une fois, assez typique. Puis vient un curieux plan, qui zoome sur le cercueil éventré, pour finir en flou et transiter sur un nouveau plan, le visage d’une jeune fille, à l’intérieur du cercueil. De l’extérieur vers l’intérieur, cette transition est très bien amenée est pas si fréquente chez les Dracula et consorts, qui se bornent en général à l’aspect, certes photogénique, de l’extérieur du cercueil comme plan d’introduction (voir celle des Cicatrices de Dracula, 1970, typique). La vue de ce plan dans Kiss of the Vampire nous révèle la nature vampirique de la jeune personne, crocs dehors.
Après cette introduction marquante, se déroule une trame scénaristique pas si commune : un jeune couple en lune de miel tombe en panne au beau milieu des paysages sylvestres d’Europe centrale. Alors que l’on sent une présence scrutant leurs moindres déambulations, des aubergistes les accueillent dans leur maisonnée. Le jeune couple va alors être convié chez le renommé docteur Ravna. On note au passage le changement d’échelle sociale : de comte, le nouveau vampire (car oui, ce sera lui : Ravna, Dracula, la proximité sonore suffisant à tisser un lien entre les deux) passe à une autre étiquette. Après la première apparition d’un véhicule motorisé, le vampire nouveau est un docteur : un vent de modernité soufflerait-il sur le film ?
Lors de la première soirée passée chez ce bon docteur, la scène de séduction vampirique (passage obligé, tout de même) est effectivement différente des habituels regards -écarquillés et fixes- du vampire en titre. Ici, c’est la musique, un air de piano sombre et envoûtant, qui sert de vecteur à la fascination qui va s’exercer sur la jeune mariée, son mari ne suspectant de son côté absolument rien.
L’idéologie vampire défendue film est étonnante et originale, un esprit sectaire baignant le tout : habillés de blanc, de fiévreux adeptes attendent l’apparition toujours théâtrale d’un docteur Varna, au brushing par ailleurs toujours impeccable.
L’utilisation parcimonieuse des codes vampiriques (gros plans incessants sur les dents pointues, sous-texte sexuel évident), ainsi que l’arrivée tardive du tueur de vampires fait qu’on a plus l’impression de regarder un film qui utilise le thème du vampire comme rouage pour raconter son histoire, mais qui n’est pas centré dessus, ce qui donne une certaine fraîcheur pour les habitués des productions Hammer de l’époque. En 1962, rappelons que la firme n’a alors sorti que Le cauchemar de Dracula (1958) et Les maîtresses de Dracula (1960), réalisés tous deux par Terence Fisher -encore lui !
Enfin, la soirée masquée, toujours tenue chez Ravna, installe un climat très fantastique et baroque, à l’aide de masques grimaçants très graphiques. Vraie réussite, sans fausse note dont un beau final, ce Baiser du vampire est à voir séance tenante ! Oui, mais... il reste désespérément inédit en DVD français, et n’est disponible uniquement en import américain, sans sous-titres... Amis anglophiles, foncez !