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états-unis - Page 56

  • Ivanhoé (1952)

    Un film de Richard Thorpe

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    Digne film de chevalerie que Richard Thorpe réalise un an avant son autre classique Les chevaliers de la table ronde, toujours avec Robert Taylor (aucun lien avec Elizabeth), Ivanhoé conte les aventures de celui-ci, parti à la recherche de son bon roi Richard, dépossédé de la couronne d’Angleterre par son félon de frère, Jean.

    Les constantes du film de chevalerie sont toutes ici réunies, tant et si bien qu’on a l’impression de voir un frère jumeau aux Aventures de Robin des Bois (Michael Curtiz, William Keighley, 1938), chef d’œuvre incontesté du genre. Robin, de son véritable nom Locksley, est bien présent dans le film, mais seulement en tant que partenaire de Ivanhoé ; lui et sa troupe (on reconnaît frère Tuck entre autres) vont aider notre chevalier à destituer le Prince Jean. Chose étonnante, le personnage n’est jamais nommé par son appellation universelle de Robin des Bois, et ses compagnons le sont encore moins. Sûrement dans le but de ne pas perturber le spectateur sur l’identité du véritable héros de l’histoire, les scénaristes et le réalisateur n’ont-ils pas voulu mettre un nom beaucoup plus connu que celui de Wilfried d’Ivanhoé dans le film. Cela reste tout de même très étrange, car on a tôt fait de se rendre compte qu’il s’agit de la même histoire, sous un autre angle, où les personnages annexes (Richard Cœur de Lion, Prince Jean) sont les mêmes.

    Les passages obligés (tournois où l’arc est remplacé par la joute à cheval, duels à l’épée dans la plus grande tradition du genre) désignent une mythologie pure, faite de serments gardés et toujours tenus par les bons, et de traîtrises (un temps) impunies par les fielleux grimaçants. Mais l’esprit est là, débonnaire, et les acteurs portent bien cet idéal de pureté ou de malice. Robert Taylor est le seul, l’unique qui a persévéré pendant des années pour retrouver Richard Cœur de Lion. Il chante pour entendre une réponse, la suite de sa mélodie. Ce geste indique déjà combien le héros symbolise le héros classique dans sa pureté -et assume son origine romanesque via Walter Scott-, où dans un intemporel Moyen-âge sans nuage, des troubadours égayaient la vie des seigneurs avec chansons et drôleries. Pour le côté comique, Ivanhoé s’adjoint de Wamba, un esclave qu’il affranchit, et qui jouait auparavant le rôle du  bouffon ; libre, il en sera toujours un.

    L’histoire s’enrichit d’un triangle amoureux malheureusement sans enjeu car on sait bien que la droiture du héros empêche de rompre un serment préalablement fait à Lady Rowena (Joan Fontaine). Ainsi, la brune Rebecca (Elizabeth Taylor) aura un rôle plutôt ténu dans cette production hollywoodienne ; mais sa position est paradoxalement plus intéressante, valorisante que celle de sa rivale : elle est juive et en est fière, dans une lutte esquissée entre la chrétienté et le judaïsme ; l’ensemble donne d’ailleurs une bien meilleure image aux juifs qu’aux chrétiens. De plus, elle est experte en médecine "parallèle" -en cela c’est le personnage le plus moderne du film- car a fait son apprentissage avec une femme suspectée de sorcellerie : pour le Prince jean, ces informations sont suffisantes pour vouloir la faire mettre à mort au terme d’un procès truqué.

    Les décors et les costumes, magnifiés par un Technicolor flamboyant, façonnent le mythe de la plus belle façon, même si le souffle épique aurait pu être plus accentué. Au lieu de cela, la musique symphonique typique des productions hollywoodiennes de l’âge d’or est de tous les plans, ce qu’on peut regretter, mais participe en même temps au charme d’une époque qui, aujourd’hui, semble bien lointaine, telle le fruit d’un rêve éveillé. En l’état, Ivanhoé est un bon rejeton classique du cinéma de la chevalerie, porteur d’un certain idéal, à ne pas négliger par ces temps de morosité...

  • Permis de tuer (1989)

    Un film de John Glen

    3208608791_b15dcd0962_m.jpgPermis de tuer, réalisé par John Glen, alias le réalisateur attitré de la franchise dans les années 80 et grand spécialiste des scènes d’action, nous ferait-il, une fois encore, voyager dans ce monde étrange, peuplé de "je-veux-devenir-le-maître-du-monde" en puissance, d’armes chimiques, d’explosions multiples, de cascades irréalistes et surtout, de belles demoiselles ? Pas tout à fait, ou pas seulement. Cet opus de l’éternelle saga d’espionnage, tout en dérogeant à quelques-unes de ces règles, tient bien la route encore aujourd’hui, alors que d’autres épisodes plus récents ont terriblement mal vieilli (je pense aux Pierce Brosnan, sans exception).

     

    Pour situer mon approche par rapport à notre cher agent secret, il faut savoir que de tous, je ne peux plus regarder ce qui constitue la pantalonnade Mooresque, qui fait de Bond un dandy maniéré sortant des vannes très moyennes toutes les deux secondes. Dans cette optique, la personnalité que Timothy Dalton insuffle au personnage, toute en rudesse mais également emplie de fragilités, hisse sa performance au sommet de mon Bondomètre personnel. Dalton, félin, pousse l’humain sur le devant de la scène. Ses relations personnelles fondent son code de conduite. De plus, il apporte de belles nuances grâce à un jeu toujours impeccable, alternant retenue et éclats de violence. En totale rupture avec Moore, il dit adieu à l’humour, et bonjour à l’aventure la plus violente de l’histoire de la franchise avec Permis de tuer. Le film a d'ailleurs souffert de nombre d’interdictions que n’avaient jamais eu à déplorer les films précédents. De nombreux moments gore sont au rendez-vous, mais ce n’est pas tout : la scène durant laquelle Bond essaye de savoir si Pam Bouvier est de mèche avec l’ennemi, témoigne d’une violence verbale et psychologique impressionnante. Le personnage y gagne grandement en crédibilité, en proximité De même, l’objectif de la mission de Permis de tuer n’est pas, contrairement à la tradition, commanditée par le MI6, mais constitue bel et bien une vendetta personnelle durant laquelle Bond n’est plus Bond ; son statut d’agent secret et son fameux permis de tuer lui sont retirés. Cette dimension nouvelle offre un modèle plus subversif de Bond, plus tête brûlée, qui sera évidemment mis à profit dans le dyptique Casino Royale/Quantum of Solace et par le tenant du titre actuel, Daniel Craig.

    Le positionnement des James Bond girls, Pam Bouvier (Carey Lowell) et Lupe Lamora (Talisa Soto), est aussi bienvenu, s’engageant dans une dynamique de jalousie, formant avec Bond un ménage à  trois lors de certaines scènes détonantes autant qu’inhabituelles. De plus, le film laisse vraiment réellement à Bond le soin de choisir sa préférence, plutôt qu’une solution de facilité très souvent exploitée au cinéma (soit l’une des deux meure, a un autre amant, ou est la vraie méchante de l’histoire, bref).

    Le film étonne également par la place beaucoup plus grande qu’à l’accoutumée accordée à Q, assistant 007 sur le terrain. Il en ressort une certaine comédie, ce qui a toujours été le rôle privilégié de Q par delà les épisodes. La scène tordante dans laquelle il est déguisé en jardinier avec une grosse moustache et un balai rappellerait presque la folie de Clouseau pour les déguisements dans la Panthère rose ; las, la scène ne dure pas.

    La saga sait se renouveler, et ses choix sont payants sur ce film qui, 20 ans après, fonctionne toujours. Le rythme est enlevé, malgré une durée conséquente (2h07) ; les péripéties, nombreuses, auront néanmoins tendance à perdre le spectateur ; comment Bond, par exemple, arrive jusqu’à l’usine-couverture de Sanchez et pourquoi ce dernier, sachant que l’agent secret n’est pas où il devrait être, ne s’en méfie pas plus ? On dira que si Permis de tuer gagne à tout focaliser sur le Bond nouvelle formule -éprouvé avec succès sur Tuer n’est pas jouer (John Glen, 1987)-, on n’échappe quand même à la machinerie gigantesque qui rentre dans le cahier des charges plus traditionnel des anciens Bond, en vigueur depuis Opération Tonnerre (Terence Young, 1965). Machines incroyables, lieux paradisiaques un brin mégalo (mais alors, juste un brin), armées de seconds couteaux auxquels est réservé un sort peu enviable (mention spéciale à une irruption de ninjas), séquences d’action aussi démesurées que surréalistes (ici, au choix, poursuite de camions-citernes avec passage sur deux roues à la clé, risque de collision en vol camion/avion, et encore, Tuer n’est pas jouer est loin d’être le plus démonstratif dans l’exercice).

    Avouons-le, James Bond est le représentant quasi-unique d’un divertissement à échelle planétaire auquel on pardonne beaucoup de choses depuis le début (rappelez-vous quand même de Abondance Delaqueue, jeune fille qui accoste Bond, et à qui celui-ci répond : "ça vous vient de votre père, je pense ?", digne d’un American Pie). Un plaisir un peu honteux, une sorte de réalisation de fantasmes masculins variés qui fondent son succès public. Permis de tuer ne réussit cependant pas à être un grand succès à sa sortie, sûrement victime de ses écarts aux règles sus-citées. Malgré tout, le film tire sacrément bien son épingle du jeu et reste un épisode à part, marquant d’ailleurs la dernière participation de nombreuses personnes-clés de l’équipe, notamment Maurice Binder, qui réalisait ici son dernier générique et qui, grâce à son invention du fameux "gun barrel logo", avait défini l’image de la série dans son entier.

  • La dernière cible (1988)

    Un film de Buddy Van Horn

    3202596511_c387446478_m.jpgAlors, mon bon Buddy, raconte-nous comment tu est arrivé à faire un Inspecteur Harry qui ressemble à un Derrick (R.I.P.) sous perfusions d’éclairages fluo et de déviances grand guignolesques ? Comme je n’ai pas l’ami Buddy sous la main, je vais me charger de critiquer ce dernier Dirty Harry de sinistre mémoire, auquel j’avais su échapper jusqu’à la nuit dernière.

    Pour Eastwood comme pour Callahan, cette cible, même si c’était belle et bien la dernière, était le coup de trop ; il oscille péniblement entre paresse et grand-guignol, avec quand même deux perles, deux moments over the top que même le bus blindé du final de L'épreuve de force (dont on avait parlé il y a quelques semaines) n’arrive pas à devancer : une course-poursuite rendant "hommage" à Bullitt (Peter Yates, 1969) entre la voiture de Harry et une ... voiture télécommandée (au passage, faudrait que Buddy m’explique comment ce jouet peut rivaliser avec la conduite sportive de l’inspecteur) et un harponnage en règle du méchant tueur de l’histoire. Deux grands moments de rigolade si on est très bon public et si l’on oublie qu’on regarde Clint Eastwood, alias le dernier des grands acteurs et réalisateurs de sa génération.

    Le centre nerveux de l’histoire se la joue mise en abîme, avec Peter Swan, un réalisateur de film d’horreur et autres clips de hard-rock (interprété par Liam Neeson, qui décidément a touché à tout dans les années 80, entre le grand film d’aventure avec Mission (Roland Joffé, 1986), la fantasy avec Excalibur (John Boorman, 1981), le pionnier des films de super-héros actuels avec Darkman (Sam Raimi, 1990), le film de pirates avec Le Bounty). Van Horn pousse le vice à faire de La dernière cible un film de Peter Swan, plongeant ainsi dans le n’importe quoi le plus permissif ; oser reprendre le générique de Sudden Impact, alias Le retour de l'inspecteur Harry, c’est déjà un signe, mais calquer toute une scène (dialogues compris) sur un autre épisode de la série, c’est le summum : Harry a un nouvel équipier et il lui ressort la même rengaine : "mes équipier finissent soit blessés, soit morts, alors est-ce que ça te va ?" (phénomène qui va effectivement se vérifier). De plus, ce nouvel équipier est un expert en arts martiaux, ce qui nous donne droit à de graciles jeux de pieds qu’on pourrait croire sorti d’un Karaté Kid.

    Croiser au détour d’une scène un Jim Carrey fou furieux hurlant dans des éclairages fluo rappelant un clip de Cure (ou des Inconnus, je ne sais plus) résume bien ce qu’on peut penser du résultat : une catastrophe ou une bonne bidonnade. Ce bon vieux Callahan a perdu de sa superbe et c’est peu de le dire, balançant comme un automate ses expressions favorites, Swell (Magnifique !) en première ligne, ou sortant son colt à tout bout de champs : tout cela est un brin répétitif. Ajoutez à cela une charge contre l’invasion des médias dans la vie quotidienne aussi fine qu’un combat de catch entre deux beuglants décérébrés,  et le tableau est à peu près complet. On me dira, attaquer La dernière cible sur son échec artistique, c’est enfoncer des portes ouvertes : c’est vrai, mais ça défoule et c’est proportionnel à la déception d’un dernier épisode qui aurait dû être un chant du cygne en bon et due forme ! Alors, so long Harry !

  • Le village des damnés (1995)

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    Un film de John Carpenter

    Alors qu’un phénomène étrange se produit dans le petit village de Midwich -les habitants restent inconscients durant quelques heures-, plusieurs femmes se retrouvent enceintes. Les enfants ainsi nés semblent connectés par un même esprit, et sont d’une très grande intelligence ; de plus, leurs intentions à l’égard des humains ne semblent pas pacifiques...

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  • La terre des pharaons (1955)

    Un film de Howard Hawks

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    Hawks est un réalisateur qui semble avoir parcouru tous les genres cinématographiques sans exception, qui plus est en réussissant certains des films les plus renommés de l'histoire du cinéma : le film de gangster avec Scarface (1932), le western avec Rio Bravo (1959) ou La captive aux yeux clairs (1952), la comédie américaine avec L’impossible monsieur bébé (1938),  le film noir avec Le grand sommeil (1946) ou Le port de l’angoisse (1944), la comédie musicale avec Les hommes préfèrent les blondes (1953), et le péplum avec La terre des pharaons. L'évocation de ce palmarès a de quoi rendre jaloux tous les réalisateurs de la planète. Moi qui ne connaît pas ses westerns (oui, même Rio Bravo), j’en ai l’idée d’un homme de comédie avant tout ; les facéties de Cary Grant dans Allez couchez ailleurs (1949), forcé de se déguiser en femme pour aller rendre visite à celle qu’il aime, sont hilarantes, tout comme dans Chérie, je me sens rajeunir (1952). Mais la diversité sus-citée et son succès quasi-constant l’ont fait devenir un réalisateur très côté auprès des studios, qui lui donnent dès lors de grands moyens pour mener à bien ses nouveaux projets, comme c’est le cas avec celui qui nous intéresse aujourd’hui. De plus, son film bénéficie d’une technologie de pointe qui est encore assez jeune, le CinémaScope, qui a fait ses débuts avec un autre péplum, La tunique (Henry Koster, 1953). Le procédé met en valeur les scènes de foule et la profondeur de champ ; de plus, ce format plus large demande plus de longueur de décors pour le "remplir". Hawks l’a bien compris dans les scènes d’ouverture du film, en mettant en images la progression de milliers de figurants faisant route vers la demeure du pharaon pour construire la première pyramide d’Egypte. Bien que faisant montre d’une maîtrise déjà forte de ce nouvel outil, ces scènes ne m’ont pas parues réussies car on a l’impression d’assister à un défilé chorégraphié tel qu’on échappe à tout effet de réel ; de toute façon, il en va de même avec bon nombre de péplums et cette scène façonne la représentation de l’Antiquité dans le cinéma hollywoodien de l’âge d’or : tout y est très figé et distant, comme un livre d’images dont les pages s’égrènent devant nos yeux.

    Comment Hawks se tire-t-il de l’exercice ? La trame du film est simple (le pharaon Khéops passe son temps à préparer son passage dans l'au-delà et ordonne la construction de son mausolée, une pyramide) et n’offre que très peu d’intérêt. De même, les interactions entre les personnages ne sembleraient pas changer si le film était un récit contemporain, un film de chevalerie ou un polar. L’Egypte n’existe que dans le cadre d’un décorum interchangeable, non comme un monde à part entière. D’ailleurs, si certains plans font montre d’un certain gigantisme, la plupart du film est traité sous un angle plus intimiste, ce qui semble en désaccord avec la promesse d’une grande superproduction hollywoodienne. Nous ne sommes pas du tout dans un des grands films de Hawks. Malgré tout, certains aspects de La terre du pharaon ne sont pas inintéressants, comme cette fixation pour l’amassement des richesses que le pharaon ne destine qu’à entasser dans son tombeau ; la croyance de la vie après la mort est vraiment très ancrée dans ce personnage, beaucoup plus que chez le peuple comme l’indique bien la voix-off, "le pharaon imposant pour le confort de sa seconde vie une existence de misère pour des milliers d’égyptiens".  Les premiers temps de la construction paraissent étranges, le peuple semblant réjoui de sa mise en esclavage pour construire la pyramide, conscient d'une mission divine...

    D'autre part, l’astuce de construction d’une pyramide qui reste entièrement scellée une fois un mécanisme enclenché est bien vu et, à mon sens, plus impressionnant que toutes les scènes de foule du film. Hawks avait rencontré des égyptologues qui lui ont fait part des dernières découvertes, à l’époque, concernant la construction des pyramides, si bien que l’impression de réel tient la route, à ce moment-là.

    Du casting, moyennement convaincant, retenons tout de même le rôle de l’architecte, tenu par James Robertson Justice, qui offre une certaine ressemblance avec Peter Ustinov. Justice joue la figure du sage dans ce monde de croyances truquées (les dieux égyptiens prennent parole d’une façon très humaine, révélant une combine dont on ne peut savoir si le peuple y croit). Joan Collins, qui fera plus tard les beaux jours de Dynastie, est assez insupportable dans le rôle de la reine arriviste, qu’elle aurait pu rendre plus complexe. En définitive, un film dont on peut se passer, et qui constitue le pendant clairement mineur de l’œuvre de Hawks.