Un film de John Carpenter
Alors qu’un phénomène étrange se produit dans le petit village de Midwich -les habitants restent inconscients durant quelques heures-, plusieurs femmes se retrouvent enceintes. Les enfants ainsi nés semblent connectés par un même esprit, et sont d’une très grande intelligence ; de plus, leurs intentions à l’égard des humains ne semblent pas pacifiques...
Déférence envers une tradition fantastique que Carpenter prouve une nouvelle fois dès le générique du Village des damnés, en indiquant "adapté du scénario de 1960 écrit par...". Le film original étant adapté du même roman, Les coucous de Midwich, il aurait pu se contenter de citer la source. Le fait de préciser l’année au générique est très rare dans les remake, et de l’y faire figurer ici fait acte de cette continuité / révolution que Carpenter construit à travers toutes ses relectures. Carpenter effectue également une réelle appropriation du matériau de base, tels les titres de ses films prennent toujours la forme possessive, ici John Carpenter’s The Village of the Damned.
L’équilibre entre ces deux forces, respect et appropriation de l’œuvre, se retrouvent dans ce film-ci. Alors qu’il n’hésitera pas à reprendre certaines scènes telles quelles -la première manifestation du phénomène, où des hommes s’évanouissent, inconscients ; le prêtre qui met en joue un des enfants né de ces grossesses surnaturelles-, il va en inventer d’autres. L’apparition du phénomène va différer, totalement silencieux et indétectable dans le premier film, et ici perceptible à l’oreille : des murmures incompréhensibles qui font se réveiller le docteur Chaffee (Christopher Reeve, dans le rôle tenu autrefois par George Sanders) ; Le film de Carpenter s’aventure également sur le terrain de l’interruption de grossesse, certes inimaginable en 1960. Il est d’ailleurs étonnant que le même développement scénaristique lui ait été proposé dans le cadre des Masters of Horror : le scénario de Pro-Life (Piégée de l’intérieur) traite de l’avortement de façon on ne peut plus frontale, tandis que Cigarette Burns (La fin absolue du monde) est proche de l’histoire à tiroirs de In the Mouth of Madness (L’antre de la folie). Comme quoi Carpenter aime aussi à se répéter, montrant sa fixation pour certaines idées, et notamment pour le film Rio Bravo, qu’il ne cesse de réutiliser.
Une autre différence entre l’original et le remake réside dans le fait qu’un des enfants développe des émotions, ce qui n’est pas le cas des autres ; est-il pour autant si différents de ses camarades ? La nuance est là, mais Carpenter reste un cinéaste très manichéen, et dans ses films se combattent inlassablement le bien et le mal. A part ces quelques nouveautés et, bien évidemment, l’ajout de la couleur et du Cinémascope cher au réalisateur, rien de nouveau sous le soleil. Pourtant, le film est assez plaisant, jouissant d’un casting décidément sympathique sans être exceptionnel -Christopher Reeve et Kirstie Alley, secondés par Mark Hamill, Michael Paré (vu dans Philadelphia Experiment) et Peter Jason, un habitué du réalisateur (Prince des ténèbres, Invasion Los Angeles).
Sans être une réussite flagrante, mais étant bien meilleur que ce qu’on en dit, le film de Carpenter a également le mérite d’attirer notre attention sur le film original, dont je ne peux que vous conseiller la vision.
Commentaires
Comment Dark Star (l'avez-vous vu ?) peut-il être une parodie de Star Wars alors qu'il lui est rigoureusement antérieur (74 pour 77 !) ?!
Ce film de Carpenter cite certes 2001 et évoque aussi le Silent Running de Trumbull (pour l'hippie style), mais n'a que peu à voir avec la saga Lucas...
Mélangeage de pinceaux effectivement impardonnable... Peu de choses pour l'expliquer si ce n'est que je n'ai pas vu le film mais avait ce souvenir (inventé de toute pièces?!) d'après mes lectures sur le genre. Note pour plus tard : voir Dark Star et corriger cet écart... Sur ce, merci de cette intervention et au plaisir de vous lire, ici ou ailleurs !