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aventures

  • Gravity (2013)

    Un film d'Alfonso Cuarón

    10590136436_5e85dfd133_m.jpgCuarón est un cinéaste au parcours décidément étonnant : débutant la mise en scène par des contes pour enfants et une comédie remarquée (Y tu mam tambien, 2001), il enchaîne par un Harry Potter (le prisonnier d'Azkaban, parmi les meilleurs de la saga), un film d'anticipation qui accède instantanément au statut de grand classique (Les fils de l'homme, 2006). 7 ans après son dernier film, il débarque avec une aventure spatiale ébouriffante.

    Véritable défi aux effets spéciaux d'aujourd'hui, Gravity se présente d'abord comme le film high-tech par excellence. Simulation d'apesanteur, plan-séquences à répétition, c'est une prouesse technique. Mais pourquoi est-ce aussi une petite révolution, comme on a pu le lire ici ou là ? Car, à proprement parler, Gravity n'est vraiment un film, en tout cas pas dans l'acception la plus couramment usitée. Il s'agit en fait d'une sorte d'attraction, de "film dont vous êtes le héros", de "film pour Futuroscope" extraordinairement réussi. Expliquons-nous : la quasi-totalité du métrage se situe dans l'espace, avec deux personnages (interprétés par Sandra Bullock et George Clooney). Suivant un canevas aussi simple qu'efficace qu'une suite ininterrompue de catastrophes, le spectateur est littéralement au milieu du champ de bataille spatial, avec les acteurs. Les sensations, dès lors, sont viscérales, et dépassent souvent le regard légèrement distancié avec lequel on regarde habituellement un film. L'expression "être dedans" prend ici tout son sens.

    La performance de Sandra Bullock ensuite, assez inédite, est remarquable ; et, malgré le sentiment que l’amoncellement de péripéties en rajoute un peu trop (qui rappelle d'ailleurs la progression des jeux-vidéos), on ne peut qu'être happé par les événements qui semblent "nous arriver". C'est là, à mon sens, que la réussite du film est la plus évidente. Et c'est le premier film que je recommande à tous de visionner en 3D, la 2D risquant de faire perdre une bonne partie de cette immersion inédite. Je me demande d'ailleurs comment le film va s'en sortir sur nos écrans domestiques, aussi grands soient-ils... Non, on ne nous a pas menti. Gravity est une véritable aventure à la première personne, à ne pas rater au cinéma !

  • Ciné d'Asie : Goyokin (1969)

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  • La chair et le sang (1985)

    Un film de Paul Verhoeven

    7995817987_f80d423772_m.jpgL'éditeur Filmédia réédite le 19 septembre 2012 La chair et le sang (Flesh + Blood) en DVD et en blu-ray (exclusivité française!), un des tous meilleurs  films du réalisateur Néerlandais Paul Verhoeven ; malgré cela, il reste encore assez méconnu, encore aujourd'hui.

    La chair et le sang nous offre un tableau du Moyen-âge barbare, violent et sensuel, concrétisant la promesse de son titre. On y retrouve Martin, interprété par Rutger Hauer, le Roy Batty de Blade Runner en 1982, entouré d'une bande de mercenaires complètement allumés. Leur ancien frère d'armes, Hawkwood, les a trahi au profit du seigneur Arnolfini. Qu'à cela ne tienne, Martin et sa bande retrouvent les deux hommes et enlèvent la  belle-fille d'Arnolfini -interprétée par la toute jeune Jennifer Jason Leigh-, puis envahissent son château. Steven, un jeune homme érudit et passionné de science, à qui Agnès était promise, va tout faire pour la récupérer. L'esquisse du scénario ne dépareillerait pas dans la longue liste de films d'aventures moyen-âgeux qu'a pu produire hollywood durant son âge d'or : un preux chevalier vient arracher une princesse en détresse des griffes d'un bandit sans foi ni loi. Et pourtant, le film va à l'encontre de tous les poncifs du genre. Fini, les ciels radieux en Technicolor, les vilains grimaçants, les impeccables salles de banquets, les combattants virevoltant moulés dans leurs collants multicolores ! Au lieu de ça, le film table sur la peinture sans concession d'une époque sombre et cruelle, bâtie sur une succession d'ambiguïtés.

    Tous les personnages sont montrés sous leurs mauvais jours, les nobles et les religieux complotant, les mercenaires sont incultes et violents ; Steven, le jeune érudit, est le seul à n'être que l'incarnation de l'amour romantique par excellence... que le réalisateur tente à tout prix de désamorcer : le serment d'amour de Steven et Agnès se déroule au pied d'un arbre où deux pendus bien amochés sont en train de pourrir ! D'autre part, ce sont les méchants qui sont les héros de la chair et le sang, prenant la encore le contre-pied du film de chevalerie.

    De même, deux mondes s'opposent, symbolisés chacun par un des personnages : La chair et le sang, c'est le moyen-âge contre la renaissance, la croyance contre la science et la connaissance, Martin contre Steven. Au centre de toutes les attentions, le personnage d'Agnès est double, tout à la fois amoureuse de l'esprit de Steven et du corps de Martin : d'abord inexpérimentée, elle sera violée par la bande, puis ensuite, avec Martin, elle découvrira contre toute attente un plaisir inégalé. Leur scène d'amour dans un bain vaporeux, capte une puissance érotique incomparable, ce qui rappellera aux amateurs  que Verhoeven a plus tard réalisé Basic Instinct, avec là encore, une blonde incendiaire, Sharon Stone. On est bien loin de l'image vierge et diaphane de la princesse « classique ». Lors d'une tentative de sauvetage, une invention de Steven suscite même le rire, sûrement non intentionnel, tellement la grosse machine en bois qui s'avance devant la portez du château ressemble à celle qu'on a pu apercevoir dans Monty Python sacré Graal !

    On a sûrement là une des preuves des difficultés rencontrées sur le film, tant Verhoeven a perdu la bataille du contrôle sur La chair et le sang ; il s'est en effet vu imposer l'histoire d'amour entre Agnès et Steven par Orion films, alors que lui aurait aimé axé tout la dynamique sur la lutte entre les deux anciens frères d'armes désormais ennemis. D'un autre côté, Rutger Haurer, comédien fétiche du cinéaste, veut le beau rôle : il un beau début de carrière aux états-unis -Blade Runner en 82 avec Ridley Scott, Ladyhawke de Richard Donner en 1985, film dans lequel il a une rôle chevaleresque aux côtés de Michelle Pfeiffer- ; mais cela n'y change rien : son personnage est un bandit violent, Verhoeven et Hauer se brouillent et à ce jour La chair et le sang constitue leur dernière collaboration.

    Le film n'est pas non plus avare en violence de toute sorte ; la bataille qui inaugure le métrage, qui permettra à Arnolfini de retrouver sa cité, en est un bon exemple : membres arrachés, têtes scalpées, rien n'est vraiment épargné au spectateur. Plus tard, la peste jouera un rôle prépondérant dans le film, se propageant dangereusement dans la région. C'est un peu la marque de fabrique de Verhoeven, qu'on surnomme le Hollandais violent ; il réalisera deux ans plus tard son premier film américain, RoboCop, qui laisse là aussi quelques traces ensanglantées dans l'imaginaire des cinéphiles. C'est la violence et les excès en tous genres (sexe, amoralité) qui sont la cause de son départ des Pays-Bas, où il a pu tout de même réaliser de véritable perles ; on pense à Katie Tippel, l'odyssée d'une jeune femme qui, d'une pauvreté sans nom, arrivera à s'insérer petit à petit dans l'aristocratie ; ou encore à Soldier of Orange, un film de guerre très romanesque avec déjà Rutger Hauer dans le rôle principal. La chair et le sang est son premier tourné hors de son pays, en langue anglaise. C'est une véritable charnière dans la carrière de Verhoeven, qui œuvrera par la suite principalement aux Etats-Unis (il ne reviendra tourner dans son pays qu'au milieu des années 2000, pour le très beau Black Book). 

    La très belle musique de Basil Poledouris, dans la mouvance de son travail sur le magnifique Conan le barbare, est puissante et entraînante, participant à donner au fil sa réalité historique.

    Mélange détonnant, excessif et jouissif, La chair et le sang saura faire oublier ses quelques anachronismes, restant aujourd'hui un des plus grands films sur le Moyen-Âge : à (re)découvrir de toute urgence !

  • Sherlock Holmes : jeu d'ombres (2012)

    Un film de Guy Ritchie

    7168379893_982939caf6_m.jpgIron Man et Sherlock Holmes n'ont pas que leur comédien principal en commun : on peut désormais leur associer la grande déception que constitue leur piètre suite, après un premier opus assez enthousiasmant.

    On l'a dit, le premier Sherlock Holmes avait le mérite de l'originalité, tout en respectant certains aspects du personnage littéraire. Or, dans ce deuxième essai, le masque tombe : le réalisateur anglais a bien compris le sens du mot formule, recette ou encore redite. Au travers d'une confrontation avec son nemesis historique, le professeur Moriarty (Jared Harris, vu dans Mad Men et The Ward), Guy Ritchie recycle d'une part toutes les figures de son Sherlock Holmes de 2009 : la Holmes-vision à répétition (ni plus ni moins qu'un effet d'ultra-ralenti, déjà vue par exemple dans le premier Spider-Man (2002) de Sam Raimi, ou dans Matrix en 1999), des gags tout aussi récurents sur la relation à tendance homosexuelle entre Holmes et Watson, et surtout, une intrigue complexifiée à l'extrême, résolue en un tournemain avant même qu'elle ne se réalise. Cette accumulation, ce trop-plein confronté à l'inlassable répétition des gimmicks du premier film ont pour résultat... qu'on se fiche totalement de ce qui se déroule à l'écran !

    Pas fou, Ritchie connaît tout de même son Holmes-cyclopédie : il glisse de-ci, de-là, quelques références dont les connaisseurs ne seront pas dupes. La chute dans le vide de Holmes et Moriarty rappelle leur duel se soldant par leur disparition dans les chutes du Reichenbach, conté par Arthur Conan Doyle dans The final problem (1893) ; de même, la partie de l'histoire donnant la part belle à Mycroft Holmes, et à une soirée arrosée dans un cabaret est emprunté au beau La vie privée de Sherlock Holmes de Billy Wilder.

    Le talent de Moriarty, le "Napoléon du crime", est sous-exploité au possible, ainsi que le potentiel combat de titans qui pourrait avoir lieu. Si l'acteur en impose clairement, il ne peut que se débrouiller avec les rares lignes de dialogues qui lui sont accordées, au profit d'un esprit foutraque totalement à l'opposé du maladif Holmes littéraire. Ici, Robert Downey Jr. joue en roue libre une vraie folle passant son temps à faire le travesti au son d'une guitare tzigane déglinguée.  Ajoutons à cela des scènes d'action qui s'enchaînent non-stop sans se soucier le moins du monde d'une certaine cohérence, et l'on obtient un film tout à fait oubliable, conçu vraisemblablement à la va-vite suite au succès du premier opus. Les seconds rôles sont sacrifiés, à commencer par Noomi Rapace, en voyante tzigane, plus importante par son lien de parenté avec un des personnages-clés du film (son frère, en cheville avec un groupe d'anarchistes) que pour elle-même. De même, Irene Adler, personnage fémlinin miroir de Holmes dans le premier épisode, est éjectée purement et simplement dans la séquence pré-générique, morte hors-champs.

    Devant un résultat aussi misérable, on ne fera pas de demi-mesure : Sherlock Holmes : jeu d'ombres est un film ni fait, ni à faire, faisant retomber les bribes d'enthousiasme suscitées par surprise à la vision de la réinterprétation du mythe holmésien en 2009.