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thriller - Page 4

  • Sherlock Holmes (2010)

    Un film de Guy Ritchie

    4375339481_0613149e8a_m.jpgDire qu’on n’a jamais vu Sherlock Holmes comme ça relève d’un understatement tout british, ce qui est plutôt de circonstance. Revu et corrigé par Guy Ritchie, le réalisateur d’Arnaques, crimes et botanique (1998) et Snatch (2000), le plus fin des détective devient une action star à part entière, secondée par le bon docteur Watson, lui aussi plus hot que sa traditionnelle version vue jusqu’alors.

    Sherlock Holmes millésime 2010 est un buddy movie on ne peut plus classique, saupoudrée du style Ritchie : dialogues en forme de partie de ping-pong continue, rythme d’enfer -ici soutenu par une musique gitane au tambour battant signée Hans Zimmer-, mouvement d’appareils amples et rapides. Les déductions vitesse grand V du grand Holmes participent d’ailleurs à cette course contre la montre que semble s’être lancé le réalisateur. Le spectateur n’a alors pour lui que de suivre le tortueux chemin dans l’esprit de Holmes, restant pendu aux lèvres du détective qui lui dévoile ce qui s’est vraiment passé. Cela va tellement vite que, parfois, Ritchie doit revenir à deux fois sur la même séquence pour le spectateur accepte (Holmes en champion de boxe) ou comprenne (Irène sort de l’appartement de Holmes et Watson) la situation. Le film opère alors comme le révélateur des tours de magie de Holmes, ici vénéré comme un prestidigitateur. Héros moderne, invincible, Holmes devient dans le corps de Downey Jr. un vrai Iron Man in London, avec les mêmes particularités anti-héroïque (alcoolique, maladif, ...). Les traits de la personnalité de Holmes semblent ainsi disparaître derrière tout un attirail de bons mots, de vitesse à grands renforts d’action (par ailleurs tout à fait distrayant).

    Bon film comme pourrait l’être un Arme Fatale 5, Sherlock Holmes aurait pu prendre un autre héros pour personnage principal que cela n’aurait pas changé grand-chose. Inutile pour autant de bouder notre plaisir, le film se tient et est magnifié par la photo de Philippe Rousselot -La forêt d’Émeraude (John Boorman, 1985), Et au milieu coule une rivière (Robert Redford, 1992), Entretien avec un Vampire (Neil Jordan, 1994), Big Fish (Tim Burton, 2003). Avec une affiche prometteuse et un duo d’acteur qui s’en renvoient de belle (n’omettant pas, au passage, l’inévitable sous-texte homosexuel), le Sherlock Holmes de Ritchie, s’il n’est pas fidèle à son modèle, est un divertissement tout ce qu’il y a de plus plaisant.

  • Le crime était presque parfait (1954)

    Un film de Alfred Hitchcock

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    Il fallait y passer tôt ou tard, à ce film qui donne son nom à ce blog. C’est, aussi bizarrement, le premier Hitchcock chroniqué en ces lignes. On ne l’avait pas revu depuis un bon moment, je dirais même que cela remonte à notre programmation de ce film au sein d’un ciné-club universitaire, en Avignon, aux alentour de la fin 2003. Notre souvenir en était un film plaisant, mais sans plus.

    Adapté d’une pièce de théâtre de Frederix Knott, auteur déjà utilisé par Hitchcock pour La Corde (1948), Le crime était presque parfait a des similitudes avec ce même film. Il s’agit d’abord de la perpétration d’un crime parfait, mûrement réfléchi ; Tony Wendice (Ray Milland) prépare depuis au moins un an le meurtre de sa femme, tandis que La Corde voit deux hommes tuer un total inconnu, raison même, pensent-ils, de leur innocence. Ressemblance assez frappante aussi, avec L’inconnu du Nord-Express (1951), dans lequel Guy Haines (Farley Granger), tennisman, comme Wendice, se voit proposer un échange de meurtres, poursuivant toujours l’idée de la stratégie soi-disant parfaite de ce crime.

    Histoire de meurtre donc, dont la présentation est un modèle d’économie narrative : un plan nous montre l’adorable couple Ray Milland - Grace Kelly s’embrasser, prendre le petit déjeuner, et le plan suivant nous montre le même baiser... sauf que le partenaire de Kelly a changé. Robert Cummings a pris la place de Ray Milland, et Grace Kelly est vêtue de rouge au lieu du blanc auparavant. L’image du couple idéal est démontée, et l’on sait désormais que sous les sourires de façade se cache un échec, celui du couple. Grace Kelly a l’air de s’ennuyer, tout comme Ray Milland, qui aura consacré un temps non négligeable aux préparatifs de son plan. On s’occupe comme on peut...

    La première demi-heure est extrêmement bavarde, Wendice expliquant à un pauvre gars comment il a réussi à la piéger pour l’obliger à commettre le meurtre de sa femme. On pourrait se croire dans un épisode de Columbo un peu fade, mais la précision de l’explication, les dialogues aux mots si bien choisis, repris de la pièce, garantissent que l’on soit toujours menés vers un objectif clair. Le spectateur découvre ici, au fur et à mesure du premier récit de Wendice, comment il a échafaudé tout son plan. Avec quelle soin il a paramétré chacune des éventualités de l’affaire. C’est là, dans la différence entre l’extrême préparation et l’échec progressif de chaque action, que le film est intéressant. Une montre arrêtée, un meurtrier bien lourdaud, une improvisation continue de Wendice / Milland pour pallier aux ratés du plan, ... Tout s’emboîte finalement avec tant d’intelligence que l’intérêt du spectateur est continuellement renouvelé. Alors, même si Hitchcock ne compte pas ce film parmi ces réussites (voir le livre Hitchcock / Truffaut, à ce propos très éloquent), le public l’aura consacré comme un succès. Premier Hitchcock de Grace Kelly (qui jouera aussi dans Fenêtre sur cour (1954) et La main au collet (1955), il est tout de même honorable.

    Si le film n’a pas la maestria visuelle de certaines réalisations du maître, certaines séquences sont très réussies, notamment celle du meurtre, commençant par cette montre arrêtée, et l’agression en direct au téléphone, un moment très bien géré. Entendre les cris étouffés de la victime, sans pouvoir rien y faire, n’est-ce pas le comble de l’horreur ? Ce ne l’est pas pour Wendice, qui, avec un accent bien sado-masochiste quand même, a attendu ce moment pendant des mois. C’est presque avec délectation qu’il reste pendu au téléphone, ne pipant mot, dans l’attente de la preuve sonore de la réussite du contrat.

    Un film qui assure le minimum syndical, mais un minimum syndical d’Hitchcock ; ce qui reste toujours le haut du panier, question suspense !

    Source image : affiche du film © Collection AlloCiné / www.collectionchristophel.fr

  • L'enquête (2009)

    Un film de Tom Tykwer

    3940468174_028f5b3897_m.jpgLe réalisateur de Cours, Lola cours (1999) fait son bout de chemin aux États-unis. Après Le parfum, adaptation assez réussie malgré des séquences casse-gueule, il nous revient avec un thriller tendance parano, héritier des films politiques des années 70, sous-genre qui semble, aujourd'hui plus que jamais, refléter une réalité déformée par la désinformation et le double langage. Le fantôme commun à tous ses films, l'assassinat de JFK, flotte sur plusieurs séquences du film et notamment sur celle, quasi identique au drame, du meurtre du nouveau directeur de la banque IBBC. On a droit à une analyse de trajectoire directement inspirée des exploits des Jim Garrison à la commission Waren, et à la certitude de la présence d'un deuxième tireur, éternelle question officiellement éludée par la théorie de la balle magique défendue par cette même commission. Conformément à la thèse du complot et au destin d’Oswald, le premier tireur est d'ailleurs lui-même piégé et tué pour la cause.

    Ici, un duo d'agents d'Interpol enquête sur la mystérieuse disparition d'un de leurs collègues, pour remonter vers la fameuse banque aux ramifications tentaculaires. Illustre aînée de cette Enquête, Les hommes du président (1976) est cité de façon plus imagée à travers l'impressionnante fusillade finale, à l'intérieur du musée Gugenheim. La structure ovale, donnée par la perspective des étages du musée, lui donne l'aspect d'un réseau labyrinthique suggéré dans le film Pakula par le fameux plan de la bibliothèque du congrès en plongée, immense réseau dont Woodward / Redford et Bernstein / Hoffman, souris cherchant la clé du mystère Watergate, veulent dénouer les fils. Les cadres, de la même façon, ne cesse judicieusement de positionner l'homme constamment seul, perdu au milieu d'un vaste ensemble aux limites indéfinissables (halls immenses, voies de circulation, mégapoles infinies). Il doit ainsi trouver les limites, aller jusqu'au bord et les dépasser, pénétrer la zone interdite, seule détentrice possible d'une vérité.

    L'héritage est visible, l'hommage appuyé, ce qui enlève quelque peu de sa valeur au film. Ces vieilles ficelles, créant un suspense prenant, n'en font pas moins un agréable moment de cinéma, loin des films palôts du type L'affaire Pélican, pourtant réalisé par Pakula lui-même, qui ont essayé de marcher sur les traces de ces mêmes inspirations dans les années 90. Clive Owen est un acteur magnétique, l'air toujours inquiet, à qui ce genre de rôle sied particulièrement. Les fils de l'homme d'Alfonso Cuaron (2006) lui avait déjà donné l'occasion de parcourir, regard hagard, les cadres aux tonalités pessimistes d’un monde trop contrôlé. Naomi Watts, elle, reste étrangement un cran en dessous, trop proprette pour convaincre.

    L'enquête s'inscrit dans le même temps en relecture de notre époque immédiate, s'auto-désignant comme film de la crise. Le milieu des banques, pointé du doigt, est aujourd'hui logiquement légal cinématographique des laboratoires pharmaceutiques (The Constant Gardener, 2005) ou des partis politiques (A cause d’un assassinat, 1975). Sans faire preuve d’originalité, bien conscient du modèle de films qu’il convoque, Tom Tykwer signe donc là un honnête suspense.

    Source image : affiche du film © Sony Pictures Releasing France

  • Revenge (1991)

    Un film de Tony Scott

    3566748867_8f0d6d9ee0_m.jpgIl est amusant de voir à quel point certains films, pourtant calibrés et vendus tels des produits comme les autres, révèlent malgré tout des constantes chez des réalisateurs ; j’en veux pour preuve ce Revenge qui, mettant en avant un Kevin Costner charismatique en diable (c’était sa grande époque, juste avant son Danse avec les loups, Bodyguard et l'année du puissant JFK), propose par sa séquence d’introduction -un vol d’avions de combat-, une prolongation à Top Gun, réalisé par Scott quelques années auparavant. Le personnage de Cochran (Costner) peut tout à fait personnifier le Maverick de Top Gun, en fin de carrière. Les deux personnages ont d’ailleurs un caractère similaire et une voix française particulièrement proche -il s’agit de Michel Papineschi, doubleur officiel de Robin Williams et par ailleurs de John Shea / Lex Luthor dans la série Loïs et Clark : les nouvelles aventures de Superman.

    Outre cette première remarque, Tony Scott trousse un film étrange, qu’on peut sans mal qualifier de schizophrène. On y voit en effet s’opposer deux parties clairement distinctes.

    Dans la première partie, Kevin Costner s’amourache de la belle Madeleine Stowe, amour interdit car c’est la femme d’une sorte de parrain, autrement bon pote avec Costner. Cette première partie est vraiment à la limite du ridicule aujourd’hui, oscillant entre un esprit Harlequin (pas les bonbons, hein, la série de bouquins), je dis bien esprit car je m’attache juste à leurs couvertures incroyablement kitsch,  et une bluette digne d’un téléfilm érotique qui firent les chaudes soirées de M6. Le summum étant la scène "torride" en voiture décapotable, le Costner faisant presque claquer le string de la jeune femme quand elle lui monte dessus. Notez quel sens de la poésie étreint soudain les lignes de cette chronique ! Érotisme de bas étage donc, souligné au stabilo par une musique d’ascenseur, au synthé, toujours de la même eau. On se dit alors, pourquoi pas, ok, mais le film s’appelle Revenge, alors elle arrive quand cette vengeance ? Elle arrivera, mais il faudra attendre... attendre encore... et là, quand les deux tourtereaux sont pris sur le fait, ça commence !

    La fameuse vengeance du bad guy (Anthony Quinn, toujours vif) fait totalement bifurquer le ton du métrage : violent, viscéral, limite vigilante movie, la deuxième est aussi excessive dans les images chocs que l’était la première dans la guimauve. La jeune femme défigurée et un Kevin Costner tuméfié sont, il faut bien l’avouer, assez marquantes.

    La furie presque barbare de la deuxième partie emporte l’adhésion, mais le souvenir de la première, terriblement datée,  reste l’impression la plus prégnante qui se dégage du film. Mais peut-être que Tony Scott n’est pas ma tasse de thé...