Un film de Tomu Uchida
Wild Side Video nous fait découvrir des pans plutôt méconnus du cinéma asiatique avec le coffret Tomu Uchida, sorti en 2006.
Ce film-ci, narrant la vie pleine de péripéties de Jirozaemon, abandonné à la naissance à cause d’une "horrible" tache sur la joue droite, marque une belle réussite de son auteur.
La première partie du film s’étend à caractériser le handicap social de l’homme par rapport à sa marque disgracieuse ; malgré une réussite professionnelle sans conteste -il devient un prospère marchand de soie-, les qu’en dira-t-on ne cessent d’évoquer sa laideur, qui l’empêche, même adulte, de trouver une épouse. L’homme est donc accablé socialement par un défaut physique, malgré une qualité d’être qui ne fait pas de doute. Uchida, pour signifier l’isolement du personnage, compose des cadres symétriques, symétrie que le visage de Jirozaemon ne connaît pas. Sa mise à l’écart sociale s’appuie sur un détachement visuel, le fond et la forme s’accordant d'une bien belle manière. Alors que la majorité des plans font appel à une symétrie classique, donnant aux différents plans un éclat évident, le défaut de l’homme n’en ressort que plus.
La symétrie va ici de pair avec la beauté flamboyante d’un Scope couleurs extrêmement travaillé : les tons sont quasi pastels, procurant à chaque image le ton doux des estampes japonaises ; on retrouve ici un autre contraste, entre le velouté des couleurs et la tonalité sombre du récit, annoncé dès le titre ; on ne trompe personne, cette histoire est un drame.
Un drame car encore une fois, le film s’ingénue à opposer deux situations qui vont être le quotidien de Jirozaemon : alors qu’il est un marchand reconnu, faisant par ce biais partie de la bonne société, sa quête d’une épouse va l’obliger à fréquenter assidûment les bordels de Yoshiwara, où il tombe amoureux d’un prostituée, ancienne taularde qui s’est retrouvée là par obligation. S’oppose alors deux logiques, celle du travail -son entreprise de soie a besoin d’argent car les récoltes n’ont pas été bonnes- et celle du plaisir -la fille de joie veut bien l’épouser s’il lui permet de devenir première courtisane, ce qui demande des fonds importants.
Le film, fonctionnant continuellement sur des extrêmes contradictoires, est de fait très clairement construit. La trajectoire tragique du personnage principal, handicapé dès la première image, est terrible et s’expiera dans un final marquant. La sournoiserie de la jeune fille, aussi belle que vulgaire, répond à l’opportunisme des tenanciers des maisons closes, qui échafaudent sur le dos de Jirozaemon un plan pour lui soutirer encore plus d’argent. La force tragique du récit, accompagné par quelques fulgurances visuelles, est assez remarquable, surtout dans sa dernière partie. Avant cela, le début nous aura paru tout de même un peu long à se mettre en place. Une belle découverte pour un cinéma nippon toujours surprenant.
Dossiers - Page 17
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Ciné d'Asie : Meurtre à Yoshiwara (1960)
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Dossier : la cinéphilie et le DVD, partie 2
Continuons notre exploration de la cinéphilie et du DVD, commencée >>ici :
2. L’institutionnalisation française du cinéma
a. La Cinémathèque Française
Henri Langlois, avec l’aide de George Franju, crée la Cinémathèque Française en 1936. Il s’agit d’une association loi 1901, d’initiative privée mais soutenue par l’État, qui est son principal financeur (à hauteur de 80 %). Elle est le premier geste institutionnel de reconnaissance politique du cinéma en France. Elle a pour mission conservation et diffusion de films, qui représentent un ensemble de 40 000 métrages. La passion de Langlois et son initiative sont unanimement reconnues dans le monde cinématographique comme un immense pas en avant pour la reconnaissance de cette forme artistique.
La Cinémathèque Française est pour beaucoup dans la constitution du goût cinéphilique. La valorisation de ses collections par des rétrospectives, sa programmation et ses éditions sont sans égal. Sans la Cinémathèque, la génération des jeunes-turcs des Cahiers du Cinéma n’aurait certainement pas vu le jour…
b. Le Centre National de la Cinématographie
Le CNC est un organisme public créé dans l’immédiat après-guerre, en 1947. Il est censé encadrer la production cinématographique nationale et la recenser. Il n’institue cependant dans un premier temps que le dépôt volontaire des films par leurs ayant-droits -les producteurs le plus souvent-, dans le souci de les protéger juridiquement. Le recensement sera donc d’abord partiel car facultatif. Alors que le copyright sur les œuvres filmiques aux Etats-Unis existe depuis 1912 (pour des raisons économiques), le dépôt légal français date de 1977. Dès lors, tous les films sortis sur le territoire seront répertoriés et conservés.
D’autre part, le Service des Archives du film du CNC a été créé en 1969, après que Langlois ait été évincé de la Cinémathèque en février 1968. Ce pôle est un des hauts lieux de la restauration (environ 1000 œuvres par an), concernant les films bien sûr, mais aussi le non-film : affiches, scénarios, matériel publicitaire. Le cercle digne de restauration s’élargit. Le film, partie prenante dans ces autres dimensions, devient un véritable univers. Élément « solaire », il rayonne sur tous ses satellites qui forment finalement une galaxie-système indissociable.
Nous sommes au cœur de la cinéphilie, mise en perspective permanente, qui touche à tous les domaines du film. Ici, la cinéphilie se comprend comme besoin de savoir (et d’avoir) l’annexe pour mieux connaître le principal.La suite à télécharger >>ici
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Ciné d'Asie : Le bras de la vengeance (1969)
Cliquez ici pour accéder à la chronique du film de Chang Cheh.
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Dossier : la cinéphilie et le DVD, un autre regard sur le film
Inaugurons ici un nouveau dossier, constitué de notre mémoire d'études de 2005, revu et corrigé actuellement, qui décortique les rapports délicats entre l'idéal cinéphile et le dvd (faisons bref).
La cinéphilie est une affection, dit-on. Une passion obsessionnelle s’exerçant sur le film et le cinéma. Le statut de la cinéphilie pose beaucoup de questions, car repose sur cet objet constamment tiraillé entre création et rentabilité économique.
Le DVD fait partie de ce marché, où les étoiles et les récompenses se distribuent à l’aune des profits dégagés. Pourtant, le DVD est aussi bien d’autres choses. Comme transformer la vision du film, changeant l’expérience cinématographique en objet, l’immatériel prenant corps. Le DVD, sur de nombreux plans, révolutionne l’approche du cinéma et donc modifie les comportements cinéphiliques. DVD et cinéphilie ont beaucoup à voir, ils feront l’objet d’un rapprochement privilégié au sein de ce travail, notamment à travers l’étude des parutions Criterion, éditeur de DVD américain et cinéphile avant tout.La cinéphilie, rapport éminemment personnel au cinéma, se retrouve ainsi dans le DVD, reconstruisant comme on va le voir une cinéphilie en utilisant ses propres artifices.
A travers la naissance de la cinéphilie, on verra comment s’est constitué une véritable culture de cinéma. Le DVD s’annonce comme le support pensé pour le cinéphile. Concrétisant le film et la culture du cinéma, il instaure un rapport de connaissance à l’œuvre qui rappelle ce qu’on appellera l’idéal cinéphile.
Le cinéma a toujours compris, dans une approche psychanalytique, un penchant obsessionnel nommé fétichisme. Ce sera le troisième terme fort de l’étude, autour duquel nous ferons graviter la notion de collection.
La suite à télécharger >> ici (pdf, 27 ko)Rendez-vous chaque semaine pour suivre la suite de la réflexion...
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Ciné d'Asie : Un seul bras les tua tous (1967)