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  • L'Oiseau au plumage de cristal (1970)

    Un film de Dario Argento

    5546289886_be5666b764_m.jpgPour son premier film, Dario Argento met au grand jour ses inspirations, tout en leur insufflant un univers tout à fait personnel, déjà empli des obsessions qui feront toute son œuvre. S’inscrivant dans la tradition littéraire du giallo (polar à énigmes popularisé en Italie par les éditions Mondadori et leurs couvertures jaunes - giallo en italien), il y projette en effet le suspense d’Hitchcock et la narration toute en images et musique chère à Sergio Leone. Rappelons que Dario Argento, d’abord scénariste, a participé à l’écriture du scénario du cultissime Il était une fois dans l’Ouest (1968). De fait, il créera des scènes de meurtres très graphiques, poussées dans une gradation vers l’horreur au fur et à mesure des films, qui en feront une marque de fabrique de sa première période. Son virage vers le fantastique est très clairement marqué à partir de Suspiria (1977), et sa rencontre avec l’actrice Daria Nicolodi, passionnée par les sciences occultes.

    Dans L’Oiseau au plumage de cristal, premier opus de ce qu’on appellera la trilogie animale du cinéaste (avec Le chat à neuf queues et Quatre mouches de velours gris, tous deux sortis en 1971), Sam Dalmas, un écrivain, est témoin d’une étrange scène de meurtre dans une galerie d’art. Durant tout le film, il n’aura de cesse d’essayer, comme obsédé, de se remémorer un détail entrevu lors de cette scène, la clé de toute l’affaire. Cette scène est exceptionnelle car fondatrice du cinéma d’Argento sur le plan visuel, et matrice de l’obsession de ses héros pour un élément pourtant vu mais oublié : un voyage vers la mémoire retrouvée. On retrouvera la même problématique chez Suzy Banner dans Suspiria (1977) et surtout, David Hemmings dans Les frissons de l’angoisse (1975). Ce dernier n’est pas là par hasard, tant son rôle dans Blow-Up (1967) de Michelangelo Antonioni a directement influencé Argento. Comme Sam Dalmas, il n’est pas policier mais va tout faire pour y voir plus clair et élucider un mystère, une scène initiale dans laquelle tout est là mais où les yeux sont abusés, trompés.

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    Dalmas assiste de l’extérieur à la scène de meurtre se déroulant à l’intérieur de la galerie, comme enfermée dans un cadre rappelant l’écran large de cinéma, qu’Argento utilisera pour ses films les plus marquants, et plus encore une scène de théâtre, d’où un Fantôme de l’Opéra tout de noir vêtu semble rapidement s’échapper en coulisse. La lumière qui se dégage de la scène, incluant des statues imposantes et monstrueuses, en fait un moment onirique déconnecté de la réalité, tout à fait invraisemblable (comme commettre un meurtre dans une vitrine de magasin, au vu et au su de tous). La géométrie de l’endroit est également très étrange, la galerie étant séparée de la rue par deux parois de verre pouvant se refermer comme un sas -ce qui arrive à notre écrivain, rapproché trop près de la scène. Même à quelques mètres, Dalmas n’arrive pas à tout comprendre, et pour cause : la vitre offrant une isolation phonique, il n’arrive pas à communiquer avec la victime. Un sens lui fait toujours défaut. Ce mélange d’onirisme, d’invraisemblance spatiale et de violence se retouveront dans les films majeurs d’Argento.

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    S’en suit une enquête ponctuée de meurtres et de personnages excentriques plutôt effrayants (ici, le peintre) qui joncheront tout autant les autres films d’Argento. Fausses pistes, vrais coupables, tout s’emmêle au gré d’un récit mené classiquement. Notons que la scène de meurtre dans la cabine téléphonique, où le rasoir semble découper l’écran, n’est pas sans rappeler la matricielle scène de la douche dans Psychose (1960). Elle aura aussi marqué un grand obsédé d’Hitchcock, Brian De Palma, dans Phantom of the Paradise (1974) et surtout dans Pulsions (1980), où la scène de meurtre dans l’ascenseur offre des similitudes frappantes avec celle d’Argento. Un début tout à fait prometteur, à voir surtout pour sa magistrale scène inaugurale.

    Source images : DVD Wild Side Vidéo

  • Les Vampires (1956)

    Un film de Riccardo Freda & Mario Bava

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    Commencé par Freda et terminé dans l'urgence par Mario Bava suite à la défection surprise du réalisateur en titre, Les Vampires marque sans conteste une date dans l'histoire du cinéma d'horreur et d'épouvante. Considéré comme le premier film d'horreur post-seconde guerre mondiale, son esthétique gothique, ses personnages et son scénario ont influencé de nombreux cinéastes.

    Alors directeur photo sur le film, Mario Bava aura l'opportunité de réaliser la moitié du métrage en deux jours et demi, Riccardo Freda parti avec un retard conséquent sur le planning de tournage. Avec peu de temps devant lui et un casting réduit, il réorganise le film, et rien n'y paraît à l'écran, tant l'intrigue est cohérente. Un tueur, surnommé le vampire, laisse ses victimes exsangues, le seul point commun  : leur groupe sanguin. La police d'un côté, et un journaliste à l'affût du sensationnel de l'autre, vont mener l'enquête. 

    Leur pérégrinations les mène dans un château sinistre, magnifiquement éclairé par Bava, dévoilant des ombres envahissantes, des toiles d'araignées dans tous les coins, et qui offre une ressemblance frappante avec celui d'Eward aux mains d'argent (Tim Burton, 1991), jusque dans l'oiseau aux ailes décharnées à la base de l'escalier. Avec son savant fou et ses personnages tourmentés, il préfigure aussi le film de Georges Franju, le très beau Les yeux sans visage (1960), et toute une panoplie de films italiens gothiques à l'image du Moulin des supplices (Giorgio Ferroni, 1960). 

    Une comtesse, jeune et à la beauté glacée imparable, règne sur le château et poursuit de ses assiduités le journaliste, ce dernier lui opposant indifférence, sinon dégoût. On retrouvera le même type de personnage dans The Vampire Lovers (1970), production Hammer de Roy Ward Baker, le lien avec les vrais vampires aux crocs proéminents n'étant pas si lointain. Car, si le film de Freda et Bava lorgne dès son titre sur un sentier fantastique, il déjoue les idées reçues en choisissant une résolution qui n'appartient pas au strict plan vampirique.

    Une intrigue solide, donc, soutenue par un visuel inventif et qui montre peu les limites de ses moyens, si ce n'est quelques stock-shots et autres plans des rues de Paris, intégrés à la va-vite alors que le tournage s'est déroulé en Italie. Avec ces plans d'extérieur extra lumineux, à la limite de la saturation des blancs, et d'autres, où le noir de la pénombre a tendance à envahir le champ, Les Vampires oppose un monde diurne et l'autre nocturne, un monde d'en haut puis souterrain, ce dernier étant le domaine où tout est caché, préparé en secret, pour permettre au mal d'exister en plein jour, de se montrer au vu et au sus de tous sans danger. La peur sourde surgit d'autant mieux lors des rares scènes d'épouvante explicites, d'ailleurs épaulées par des effets de maquillages bluffants.

    Sans temps mort, utilisant au mieux une structure classique linéaire, Les Vampires est aujourd'hui un film toujours agréable à suivre, au mystère omniprésent et lancinant, comme dans un cauchemar dont ne sait pas si on s'est sorti. Le studio Titanus, producteur du film, renouvellera l'effort pour le vrai premier film signé de la seule main de Mario Bava, Le masque du démon (1960). Dix ans plus tard, c'est encore sous son égide que sortira le premier long métrage d'un certain Dario Argento, intitulé L'Oiseau au plumage de cristal... 

  • Expo Sciences & Fiction - aventures croisées à Paris : un must !

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    Appelons cela une "rétro-news", l'info n'étant pas de première fraîcheur, tout en restant dans le thème de l'exposition : depuis le 21 octobre 2010 et jusqu'au 3 juillet 2011, la Cité des Science et de l'Industrie propose, sur le thème Science et Science-Fiction, une exposition littéralement démentielle. Pour ma part, étant de passage récemment dans la capitale, j'ai été interpellé par l'intitulé, tout ce qui comporte les mots "science-fiction" ou "fantastique" m'attirant irrémédiablement. M'attendant à voir tout au plus quelques affiches de films et quelques menus objets "ayant servis sur des films", comme sobrement vanté sur les prospectus, quelle ne fut pas ma surprise lorsque, me frottant les yeux pour en être sûr, je me retrouve nez-à-nez avec la combi de Keir Dullea dans 2001, l'odyssée de l'espace (1968) dans la première salle ! A côté du costume, trônait fièrement les maquettes de vaisseaux du film de Kubrick, ainsi que de sa suite, 2010, l'année du premier contact, réalisé par Peter Hyams en 1984. Encore sous le choc, je pensais avoir vécu le climax de mon voyage... J'étais loin du compte, tant la suite n'a cessé de me transporté loin, là-haut, dans les étoiles.

    Au détour d'objet bibliographiques rares (manuscrits corrigés, éditions originales, prêtés par la Bibliothèque Nationale de France) et d'une belle scénographie (parois illustrées de pages de bandes dessinées, portes en forme de losange comme celles de Planète Interdite), la plus belle accumulation de trésors cinéphiles s'offre à mes mirettes ébahies. Ici, les costumes de Star Trek ; là, un vaisseau grandeur nature (!) ou la tenue impossible de Numéro 6, tout deux sortis de Battlestar Galactica, la série des années 2000. Puis, alors que je ne percevais déjà plus le quand ou le comment, que toutes les dimensions de l'espace se mêlaient dans mon cerveau déboussolé, surgissent les reliques de Retour vers le Futur : l'Almanach des sport et le Hover-Board du 2, la tombe de Doc Brown dans le 3... Point de non-retour. May-Day, May-day, circuits en surchauffe !

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    Dès lors, la collection s'agrandissant au fil des salles (costumes de Blade RunnerMatrix, Men In Black, Dune, masque de Greedo et maquettes de vaisseaux dans Star Wars épisode IV, tête de l'alien de Rencontres du troisième type, scaphandre de Alien, le huitième passager, l'appareil photo numérique fonctionne en mode rafale, mais le corps ne suit plus, c'est trop. Une grande partie de ce qui a fait mon amour au cinéma est là, ou presque. Des heures de souvenirs étalés là, dans quelques mètres carrés. Il aurait juste fallu la DeLorean volante, et j'étais bon pour les urgences. Plusieurs surprises dans ce best-of science-fictionnel : les costumes de L'Âge de Cristal, la présence dans les chronologies des films marquants de Event Horizon ou de Sunshine (on trouve même Planète Rouge, qui, même sans l'avoir visionné, ne semble guère avoir de louanges par ailleurs).

    Hagard, les yeux rouges, la bave aux lèvres tendance épileptique, le nord et le sud semblant s'être déplacés d'eux-même, j'arrive à me frayer un passage jusqu'à la sortie sans défaillir, ce qui se vit comme un exploit. Dehors, le temps semble s'être écoulé normalement, alors que je ne saurais dire combien de temps j'ai passé dans la bulle temporelle de l'expo. Il n'y avait pas tant de monde que ça et tous ne sautaient pas comme des fous à la vue des trésors amassés dans ces salles. Dehors, tout est calme. Je me dis que j'ai peut-être rêvé... mais mon APN me fournit la preuve tangible : tout ça existe bel et bien !

    Si le texte ci-dessus ne vous semble pas très clair, je n'ai qu'un seul conseil à vous donner : courez voir cette expo, et vous comprendrez...

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