Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

michael jackson

  • Moonwalker (1988)

    Un film de Jerry Kramer, Colin Chilvers & Jim Blashfield

    4688789678_e88243b7f4_m.jpgRessaisissons-nous du contexte pour aborder Moonwalker, le long-métrage de cinéma de Michael Jackson.

    L’album Bad, 3ème album solo de Michael Jackson sorti chez Sony, paraît fin août 1987. Véritable défi artistique pour l’artiste (principal compositeur du disque), ce dernier l’entoure d’une couverture médiatique sans précédent : il entamera quelque jours plus tard une tournée mondiale, publiera l’année suivante sa seule autobiographie, Moonwalk, un film sort sur les écrans à la fin de l’année 88, Moonwalker, et presque tous les morceaux de l’album seront exploités en singles. Tous ces éléments font partie d’un même mouvement, et Moonwalker de constituer à la fois une rétrospective artistique, une compilation de clips et une œuvre de fiction. Le film s’adresse en priorité aux fans, nombreux en cette fin 80’s.

    En pleine Jacksonmania, les spectateurs de l’époque découvrent tout d’abord une séquence tirée d’un concert du Bad Tour où Michael chante Man in the Mirror. Rappelons que le Bad Tour est la première tournée solo de l’artiste, dont les talents de danseur étaient déjà mondialement connus par ses clips illustrant l’album Thriller (le clip titre, immense) et sa prestation lors de l’anniversaire des 25 ans de la Motown, la maison-mère qui l’a vu débuter avec sa famille. Insérer cette séquence live au tout début est donc assez inspiré : d’une part, ceux qui n’ont pas pu assister aux concerts auront un aperçu du show made in Jackson, et la qualité de la séquence mettra ainsi tout le monde d’accord sur la présence incroyable de l’artiste sur scène ; Le moonwalker est en action, d’après son pas le plus célèbre (qu’il ne montrera qu’une seule reprise, lors de la séquence dédiée à Smooth Criminal). D’autre part, la séquence est tout de même ponctuée par des images d’archives, montrant les grands hommes qui ont pu faire changer les mentalité, inspirer le monde : Gandhi, Martin Luther King, Mère Térésa, etc., ceux qui "make a change" comme le dit le morceau qui illustre ces images. Si le choix de ce morceau est clair par rapport à son message (si on veut rendre le monde meilleur, osons nous regarder en face et changer nos habitudes et façons d’agir), il prend aussi les gens à contre-pieds par rapport à l’image de l’album Bad que le film illustre ; en effet, Bad, avec sa pochette montrant un Michael Jackson bardé de cuir, renvoie une image de méchant ; si elle ne s’applique pas vraiment à l’homme, elle convient bien par contre au style des morceaux de l’album, aux rythmes plus saccadés (The Way You Make Me Feel, Bad, Another Part of Me, dont le clip est aussi un extrait du Bad Tour) et aux instrumentations plus rentre-dedans que Thriller. En regard de ces caractéristiques, Man in the Mirror est a contrario un des seuls morceaux doux de l’album, en plus d’être le meilleur. La bête de scène qu’était Michael Jackson n’en ressortait que plus éclatante, forte de ce contraste. La séquence ne provient en fait non pas d’un concert, mais d’une multitude concerts de la période, véritable kaléidoscope du chanteur, à l’image du film entier.

    S’en suit une rétrospective haute en couleurs (et en musique, of course) du chanteur depuis la formation des Jackson Five. Des images aujourd’hui remplies de nostalgie, mais qui font tout de même un peu "trône doré", j’entends pas là une peinture un peu trop éclatante pour paraître réelle ; ceci dit, tel est le but : dessiner à grands traits une success story hors du commun. La suite, poussée par l’élan de ce montage, se révèlera inégale, patchwork improbable de séquences ne suivant pas un canevas précis : une version kid de Bad, le clip tourné par Scorsese pour Michael Jackson, dans lequel des enfants offrent un mimétisme parfait avec la version "normale", qui n’est d’ailleurs pas présente dans le film, le début de la séquence instaurant la confusion.

    Le glissement vers la fiction commence par la séquence du clip Badder, et se poursuit lorsque, à la faveur d’un écran de fumée ("c’est des effets spéciaux", nous indique Michael Jackson), le mini-Michael fait place au vrai, dans la tenue qu’il arbore sur la pochette de l’album. Une animation image par image rudimentaire va alors se mêler aux scènes tournées -rien à voir avec Qui veut la peau de Roger Rabbit, tourné la même année par le génial Richard Williams pour la partie animée-, Michael se transformant en lapin pour échapper à des assaillants belliqueux (une horde de touristes venus visiter les studios !). Le clip du morceau Speed Demon trouve ainsi sa source dans cette scène, le lapin figurant Michael tout du long.

    Sans transition, c’est un autre clip qui vient s’intercaler, celui de Leave Me Alone. On observe donc une alternance de séquences fictionnelles et de clips, sans rapport entre elles, d’où un aspect omnibus sans progression aucune. Alors commence le seul passage vraiment scénarisé du film, dans lequel Michael est aux pris avec le bad guy Mister Big (Joe Pesci), alias Lideo (private joke envers son manager de l’époque, Franck Dileo, dont Pesci arbore le même catogan un poil ridicule, tout de même). Si la séquence n’a que peu d’intérêt, elle marque par deux moments le meilleur du film. Tout d’abord une scène apparemment anodine, mais qui symbolise le paradis de Michael : un jeu avec un ballon de football sur les terres de Neverland, son ranch, avec des enfants (dont Sean Lennon, le fils de John). Entouré de fleurs et d’un ciel radieux, seuls au milieu de nulle part, le chanteur goûte l’unique moment de répit du film, quand partout ailleurs on ne cesse de le poursuivre, de lui tirer dessus, ... Intéressante scène presque mythologique.

    L’autre séquence remarquable, c’est bien évidemment le clip Smooth Criminal, hommage aux films noirs (et au Fred Astaire de Tous en scène, dont le chanteur reprend le costume). Les chorégraphies, l’ambiance, les cadrages en font le joyau de Moonwalker, et valent à eux seuls de se procurer le film (qui paraît ces jours-ci en blu-ray). Michael ne fera jamais aussi bien, si ce n’est aux cérémonies des Grammy Awards la même année, interprétant sur scène une version bluffante de The Way You Make Me Feel et surtout, un a cappella mémorable de Man in The Mirror qui restera dans les annales. D'ailleurs, cessons ici toute polémique : le film paraît aujourd'hui  avec son format d'origine. La report 4/3 que l'on connaît depuis des années n'est qu'une version démattée (caches enlevés) du format 16/9 1: 1.85 original.

    Après ces scènes incroyables dans le Club '30, le film a donné tout ce qu’il avait à offrir : des moments magiques, certes empêtrés dans un patchwork de scènes pas raccord (on sent le travail des différents réalisateurs successifs. Une pierre blanche dans la courte carrière cinématographique du chanteur.

  • The Wiz (1978)

    Un film de Sidney Lumet

    4402209360_6f28916046.jpg

    A l’heure de la sortie de This is it en vidéo, revenons quelques instants sur le premier rôle ciné de Michael Jackson.

    Pourquoi a-t-on envie de voir The Wiz ? Pour tenter le décalage de cette version noire du Magicien d’Oz (en fait transposition cinématographique du spectacle musical créé en 1975), pour la vitrine maison qu’en fait Motown -Berry Gordy en avait acquis les droits d’adaptation, et Quincy Jones a contribué à enrichir l’orchestration, interprété par la star Diana Ross-, ou pour la prestation de Michael, Jackson, fondatrice dans sa passion pour le cinéma ? Un peu pour tout ça en même temps, mais le déclic qui nous fait mettre la galette dans le lecteur pourrait bien être cette découverte d’une facette inédite de l’artiste le plus médiatique du XXème siècle.

    C’est d’un gros projet qu’hérite le réalisateur de Serpico et d’Un après-midi de chien (après que John Badham, réalisateur demandé par Berry Gordy, ne soit viré... pour avoir critiqué le choix de Diana Ross pour interpréter Dorothy, 16 ans dans le bouquin et 24 dans le musical). Pour rappel, la chanteuse de Supremes avait 34 ans à l’époque du tournage. Le show de Broadway ayant bien marché, les moyens sont mis sur la table. De grands décors, une belle figuration, beaucoup de danseurs, un travail musical de qualité... Le four n’en sera que plus dur : le budget sera à peine remboursé de moitié.

    Comment peut-on expliquer ce désamour ? Tout d’abord, la naïveté du message ne seyait pas forcément à la dureté générale et la dimension désabusée des années 70 aux Etats-Unis. Sûrement peut-on aussi avancer qu’un film composé d’un casting uniquement noir ne devait pas plaire à tout le monde, Le magicien d’Oz étant rentré dans le cœur des américains comme un véritable mythe fondateur de leur identité WASP ; alors qu’en fait, il s’agit exactement du même créneau en plus claustrophobique encore, qui est ici défendu (rappelez-vous de "On est jamais mieux que chez soi", leitmotiv aventurier s’il en est). Diana Ross surjoue en effet constamment les côtés dramatiques de son personnage, qui n’est jamais sortie de chez elle, faisant des yeux ronds et apeurés à tout bout de champs, avec la larme très facile. Seule la couleur change.

    Artistiquement, les partis pris de mise en scène de Sidney Lumet sont pour le moins étranges, cantonnant le plus souvent dans la position du spectateur qui regarde une pièce. Très statique, n’usant pour la plupart des cadres que d’une échelle de plan (le plan d’ensemble), la mise en scène pêche par une trop grande transparence. De plus, elle est vraiment mise à mal lors des séquences chorégraphiées, qui, si les mouvements dont elles sont constituées sont agréables et intéressant, ne sont aucunement mises en valeur par cette mise en scène.

    A la féerie du Magicien d’Oz de Fleming et les autres, est confronté un réalisme urbain qui frappe à chaque coin du cadre (parkings, métros, fêtes foraines sont les lieux clés de l’action). Cette distance, énoncée dans le musical puis reprise, ne joue pas non plus pleinement son rôle, trouvant ces limites dans des passages qui fleurent bon le Z (les piliers du métro qui s’en prennent au quatuor, les singes motards). Que dire des danseurs en strings dorés...

    Enfin, pouvons-nous parler de Michael Jackson, qui s’est visiblement amusé comme un petit fou sur ce tournage : sensible, le rôle de l’épouvantail dégingandé lui va comme un gant, citant à la volée des vers de Shakespeare, ou des leçons de vie sorti du panthéon littéraire dont il est lui-même constitué ; son cerveau fait de papier mâché. A 20 ans à peine, il délivre une très interprétation tellement évidente de charisme qu’il vole les scène dans lesquelles il apparaît, évidemment dominé par ses prestations dansées dans lesquelles il était déjà stratosphériquement supérieur. S’il est clair que le maquillage ne le met pas en valeur -ajoutant une pierre encore à l’édifice de ses multiples transformations-, cela semblait l’aider à se défaire d’un rôle qu’il avait à jouer, et ce 24h/24. Comme lorsqu’il était sur scène, s’acharnant à reconstituer un Barnum gigantesque, ce film constitue une belle cour de récré pour l’éternel enfant qu’il semblait être, et dans laquelle il ne fait aucun doute qu’il s’y sentait dans son élément, comme chez lui.

  • Michael Jackson n'est plus

    Smooth_criminal_video.jpgVous allez me dire, mais que vient faire Michael Jackson dans ces chroniques ? Plusieurs raisons me viennent à l'esprit, certaines plus personnelles que d'autres. Mais avant tout, on n'a rien compris si l'on pense que Michael Jackson n'était pas un homme d'images. L'inventivité de ses clips, à commencer par le mythique Thriller (qui a marqué la première incursion d'un artiste noir sur la chaîne américaine MTV). La variété de ceux-ci, brassant tous les genres (attrait marqué pour le fantastique, polar avec Smooth Criminal ou Bad, réalisé par Martin Scorsese, film d'animation avec Speed Demon, peplum pour l'égyptophile Remember the Time, sport avec Jam, et j'en oublie).

    Le cinéma était très important dans la démarche artistique de Michael Jackson, lui qui a toujours voulu se frayer un chemin vers les salles obscures sans vraiment y parvenir (qui se souvient de The Wiz, version noire du Magicien d'Oz avec Diana Ross en Dorothy, et l'on pourra dire sans peine que Moonwalker, film dédié à la promotion de son album Bad, est bien bancal, malgré quelques fulgurances. Mais certains de ses clips font clairement référence au processus de création cinématographique, à commencer par Liberian Girl, qui voit un défilé impressionnant de stars eighties, qui attendent tous la venue de Michael Jackson pour tourner un clip... La fin nous montre que Michael Jackson lui-même était derrière la caméra pendant tout ce temps ! Richard Dreyfus, Steven Spielberg -et son fameux plan-signature travelling arrière-zoom avant, Whoopi Goldberg, Danny Glover, Dan Ayckroyd, bref la totale. Son exigence de l'image parfaite l'engage à aller voir des réalisateurs renommés pour réaliser ses clips, que ce soit John Landis (Le loup-garou de Londres) pour Thriller, Spike Lee (Do the right thing, Malcolm X, La 25e heure) pour They don't care about us et même David Fincher pour Who is it ?, avant son passage au long métrage.

    L'énorme clip Black or White, conçu pour lancer la promotion de l'album Dangerous, est un tour du monde qui devient par là un panorama du cinéma, du western à la comédie Bollywood.
    Au-delà des images, c'est évidemment par la musique qui les accompagne (mélange de la soul noire et de la pop américaine, avec un soupçon d'avant-garde dans les arrangements musicaux, toujours au cordeau), épaulé par une voix unique, que Michael Jackson s'est fait une place dans l'Histoire du 20e siècle. Sans conteste plus grand showman sur terre, ses trouvailles dansées remarquables (le moonwalk restera son mouvement le plus marquant, devenant la signature d'un style fin, et toujours dominé par une dimension magique - voir son lean-over dans Smooth Criminal) survivront à tous ses successeurs ; bref, en même temps qu'il disparaît, avec lui s'efface un pan de l'histoire. Homme de tous les superlatifs, de tous les records (Thriller est l'album le plus vendu de tous les temps et, vu les ventes du monde du disque, le record ne risque  pas de tomber de sitôt), Michael Jackson semblait venu d'ailleurs. Un personnage de cinéma. So long, MJ !