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film biographique

  • Fleur du Désert (2010)

    Un film de Sherry Hormann

    4463638017_ef7641cf46_m.jpgLa réalisatrice américaine nous livre son premier film, avec ce biopic de Waris Dirie, fille d’un nomade du désert, devenue reine de podiums et des couvertures de magazines de mode. De son origine africaine, elle garde notamment la trace d’une mutilation inhumaine : l’excision. Le film est l’adaptation de l’autobiographie du top model.

    Curieux film, qui commence comme une comédie sociale anglaise, poursuit à la façon d’un documentaire presque choc (les scènes en Afrique), passe par une phase très Le Diable s’habille en Prada, et finit comme un biopic à message , du genre de Ray, voire d’un pamphlet à la Lord of War. C’est dire que le film n’est pas un, unitaire, mais pluriel. Pourquoi pas, si l’on ne ratait pas le sujet pour parler d’autre chose pendant la quasi-totalité du métrage. De la vie de Waris Dirie (encore loin d’être terminée en 2010, au passage), on retiendra certes le grand écart faisant correspondre la survie dans les terres arides de Somalie au clinquant faste, irréel et superficiel du monde de la mode ; faisant tout le sel de son parcours, surmontant le déterminisme de sa naissance, et des traditions auxquelles elle devait se soumettre. Quand elle n’a pas plus de huit ans, ses parents veulent la marier de force à un vieillard qui a payé le prix pour l’avoir : ce sera son déclic. Traversant le désert dans toute l’inconscience de ses jeunes années, pieds nus et sans aucune ressource, elle arrivera à se faire un chemin providentiel jusqu’à Mogadiscio, et deviendra d’abord femme de ménage en Angleterre.

    Si l’histoire est exemplaire et le message sur la vérité de l’excision en fait un film on ne peut plus légitime, le choc provoque par ses différentes réalités ne sont absolument pas traitées dans le film, mais juste mises bout à bout comme si cela allait de soit. Or, ce collage maladroit dessert tout à fait les enjeux profonds de son histoire. Les moments comiques, assez nombreux, paraissent rajoutés -certains ne dépareilleraient pas dans un Coup de foudre à Notting Hill- par rapports aux passages plus sombres où Waris découvre l’horreur de l’excision, confrontée à un monde où la plupart des habitants n’en ont jamais entendu parler. De même, les séquences de défilés et des séances photos posent un problème : comment Waris peut regarder l’objectif de la même façon que tous ces mannequins anorexiques qui assument totalement l’argent facile qui coule à flots, et l’image de femme-objet dont elle sont l’incarnation ? C’est un non-sens que de ne pas traiter le problème du décalage entre ces vies trop différentes, autrement que par la comédie hystérique (nous devons être les seuls à ne pas goûter à l’interprétation de Sally Hawkins, en roue libre). L’actrice qui l’incarne est par ailleurs d’une ressemblance frappante avec la vraie Waris Dirie, mais semble un peu trop artificiellement enjouée.

    Rien de frappant dans la valeur cinématographique des plans ainsi alignés, sans talent ni grand défaut ; la musique par contre, est assénée avec un lourdeur confondante dès la première image, malgré son beau thème. Un peu plus de nuances n’aurait pas été de trop. Enfin, c’est comme si le vrai thème du film, la lutte contre une pratique mutilatrice sans fondement, n’arrivait qu’à la fin, à quinze minutes du dénouement. La valeur cinématographique de l’œuvre est donc très diminuée, devant un sujet qui demeure nécessaire et profond. La légitimité d’en faire état par le biais d’une œuvre destinée au plus grand nombre n’est pas à discuter ; faite de cette manière, elle n’atteint cependant pas son but.

  • Gainsbourg (vie héroïque) (2010)

    Un conte de Joann Sfar

    4307679070_e983f149f0_m.jpgLa vie d’un musicien se prête bien au genre du film biographique, en cela que sa production artistique prend la place de bande originale. Ainsi donc, c’est la musique qui rythme la vie de celui-là même qui l’a composée. Comme les morceaux de Gainsbourg portent en eux une beauté mélodique assez irrésistible, de ce côté-là c’était un peu gagné d’avance. Et, l’on peut avancer sans crainte que la bande originale se promène toujours un cran au-dessus du film qu’elle illustre.

    Le jeune réalisateur prévient dès la séquence générique : nous allons assister à "un conte de Joann Sfar" lui qui aime tant cette forme d’expression. N’a-t-il pas remis au goût du jour Le petit Prince de St Exupéry, ou publié dernièrement un récit s’apparentant de façon évidente au genre ? Dès lors, toute considération donnée sur un film biographique traditionnel s’en trouve balayée : fini, l’objectif d’être au plus près de la vie de l’artiste, et bienvenue dans un monde qui tient beaucoup plus de celui du Sfar-auteur de bandes dessinées que de son réel personnage principal. Le générique d’introduction est ainsi un mini film d’animation, utilisant les dessins d’un Gainsbourg Sfarisé ; durant une bonne partie du film, un double-marionnette suit le chanteur à la trace, Juliette Gréco a un chat qui parle avec la voix d’Anna Mouglalis... Ce décalage fait rentrer l’histoire dans une atmosphère de fantaisie, dédouanant le réalisateur des attentes démesurées dont le projet a pu faire l’objet. Le Gainsbourg dessiné par Sfar est ce personnage de conte, avec sa face solaire, dont le monde adoube le génie, et sa part torturée, qui nourrit encore aujourd’hui les argumentaires destructeurs des réfractaires. Comment leur en vouloir ? L’homme n’est pas facile à cerner, pas facile à aimer. Le film, non plus.

    L’intérêt trop marqué de Sfar pour la jeunesse de l’artiste est révélateur de l’empreinte qu’il veut imposer, se servant du Gainsbourg peintre aux Beaux Arts pour garnir le cadre de ses propres créations. Pour autant, la période (et l’enfant, qui récite machinalement son texte) ne sont pas ben exploitée et n’ont d’autre utilité que de confronter par l’image le regard du Lucien enfant, et du Serge adulte.

    Le film se décline alors en un collage de scènes connues, où défilent les guests (nombreuses dans la vie de Gainsbourg), qu’on attend et par lesquelles on est que rarement transporté. J’ai personnellement vraiment accroché à la seule séquence d’introduction de Bardot - Laetitia Casta, qui reproduit un cadrage et un montage assez sixties - seventies, et qui seul parvient à (me) transmettre l’effervescence du moment. Pas de moments mémorables à part cela, sauf peut-être la scène marrante où le producteur (Claude Chabrol et ses gros yeux) découvre Je t’aime moi non plus, pavé dans la mare du bien pensant et des bonnes mœurs. La faute de goût étant tout de même atteinte par l’interprétation de Sara Forestier dans le rôle de France Gall, qui passe pour une demeurée handicapée mentale. Mais bon, c’est un conte, alors... Sfar se sent d’ailleurs obligé de s’en excuser à la fin du film, expliquant maladroitement qu’il est trop admiratif pour se mesurer à la vérité du mythe, et lui préfère le traitement du mensonge. Justification passe-partout qui ne suffit pas à justifier des faiblesses du film...

    Ni une vraie réussite, ni profondément mauvais, Gainsbourg (vie héroïque, ah bon ? Je ne voit pas le rapport...), au final, fait basculer l’aiguille du côté froid, à mon sens à cause d’un manque d’audace dans le choix des scènes narrées. Je ne parle pas de l’acteur principal, Eric Elmosnino, qui mérite tout de même une citation, tant le film, sans lui, aurait du mal à exister.

    Sans transition, à suivre prochainement : du Bis made in Hammer Film & Shaw Brothers !