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comédie - Page 2

  • Kaboom (2010)

    Un film de Gregg Araki

    8568289018_b20a3aa8a3_m.jpgSmith, sexuellement "undeclared" (comprendre : couche avec des filles comme des mecs), vivote sur le campus en compagnie de sa meilleure copine, une Daria en puissance. Le récit commence comme une comédie surréaliste, avec sa voix-off décalée et son esthétique acidulée. Mais sous cette surface vernie à l'artifice, se terre une chronique douce-amère des errements sentimentaux de ses protagonistes, qui rappelle un peu les BD indé américaines de Daniel Clowes (David Boring en tête). Comme chez Clowes, la tranche de vie vire rapidement à une enquête (qui sont les hommes-animaux qui apparaissent à Smith ?) flirtant avec le film de complot globalisé. Percutant les genres, Araki nous emmène à une terre d'entre-deux jamais évidente, difficile à prendre au sérieux ; comment être fun et étrange, dramatique et onirique ?

    Ainsi, Kaboom se pose un peu comme un gigantesque point d'interrogation narratif, qu'arriverait-il si... ma copine était une adapte de la magie noire, si mon père était membre d'un ordre secret, … Tellement déconnectée de la réalité qu'Araki semble malgré tout vouloir dépeindre, beaucoup de ces propositions bouchonnent l'empathie et l'intérêt du spectateur. 

    A un moment, on pressent que Araki a voulu réaliser un film d'envergure, avec sa galerie de personnages tous trempés dans une intrigue mondiale, une prophétie millénariste et ses grandes questions (jamais résolues). Puis, le film reste coincé par ses limites (budgétaires entre autres) et ses parti-pris (indépendant versus commercial). Il ne ressemble finalement à rien d'autre qu'à un film de Gregg Araki, avec ses obsessions et ses thématiques maîtresses. Un peu comme pour Wes Anderson et La vie aquatique, qui visait le film d'aventures et arrive à ... un film de Wes Anderson, atypique, dépressif et joyeux, dramatique et comique. 

    Kaboom est décevant malgré l'invention, le télescopage des genres et des personnages, car on se désintéresse petit à petit de ce qui se passe à l'écran, jusqu'à un final marquant un certain point de non-retour dans le n'importe quoi intersidéral. C'est dommage tant la première partie (la vie au lycée) est dépeinte avec verve et drôlerie.

  • Delirious (2007)

    Un film de Tom DiCillo

    5084242541_2b4fec9dec_m.jpgDelirious fleure bon le film indépendant dans toute sa splendeur, regard doux/amer sur le monde et personnages paumés inclus. Un SDF (Michael Pitt) s'acoquine avec un paparazzi (Steve Buscemi) et s'approche par le plus fou des concours de circonstance d'une star de la pop, Kharma (Alison Lohman). Des mondes si étrangers (survie, misère sociale confronté au luxe et à la célébrité) qu'en se rencontrant, ils font sauter aux yeux leurs similitudes plutôt que leurs différences. Baignant dans un naturel qui semble pratiquement non feint (il y a fort à parier que de nombreuses séquences furent directement improvisées sur le plateau), le personnage de Michael Pitt reste constant malgré son ascension. Le film veut gentiment égratigner au passage l'absurdité des situations, le monde du show-business, la bêtise des programmes télé formatés... Tout cela a l'air bien sympathique dit comme cela (ou pas).

    Mais Tom DiCillo, qui nous avait bien fait marrer avec Box of Moonlight (et la prestation habitée d'un Sam Rockwell faisant corps avec son personnage) paraît peu assuré dans ce  exercice d'équilibriste entre odyssée surréaliste, comédie douce-amère, et regard sur les coulisses du star-system. Au point que le résultat manque d'homogénéité, basculant selon les séquences entre clip de mode, récit tragi-comique quasi documentaire, et love-story contrariée. Soutenue par une bande son très hype (Dandy Warhols, Elvis Costello qui s'offre une prestation clin d'oeil, The Cloud Room...), Delirious applique sûrement trop littéralement son titre pour être pris au sérieux en tant que conte surréaliste, et aborde finalement son sujet avec une fausse décontraction trop poseuse pour convaincre. On ressent en effet devant cette accumulation de clichés un manque de sincérité, et de naturel, aussi paradoxal que cela puisse sembler. Trop prévisible, la trame narrative est loin de passionner, en dehors des numéros d'acteurs toujours excellents de Steve Buscemi et Gina Gershon. Un faux film à la cool, destiné à faire sourire les bobos new-yorkais et autres, qui manque cruellement de point de vue :  comment passe-t-on du SDF à la star des médias ? On ne sent aucun mouvement, aucun regard critique, quand tout se termine en happy end. Essai raté pour le réalisateur du récent documentaire sur The Doors, When You're Strange.

  • Mort sur le gril (1985)

    Un film de Sam Raimi

    crimewave.jpgAu sortir du succès d’Evil Dead, Raimi choisit la voie de la diversification avec la comédie loufoque qu’est Crimewave ; du cinéma cartoon co-écrit avec les frères Coen, dans le style du furieusement barré Arizona Junior. C’est bien simple : vous vous rappelez la séquence Tex Avery du restaurant dans The Mask (Chuck Russell, 1994) ? Etirez-la sur 1h30, rajoutez deux méchants grimaçant comme les compères cambrioleurs dans Maman, j’ai raté l’avion, secouez le tout avec un mélange de Jim Carrey et de Matthew Broderick dans le rôle principal (il s'agit en fait du comédien Reed Birney), et vous obtenez ce ticket pour montagnes russes qu’est Mort sur le gril.

    Les Coen au scénario, Raimi à la réalisation : le film hérite des deux paternités. Résumer le scénario n’est pas très important, tant il est accessoire ; Sam Raimi signe un film uniquement visuel, où les gags ne dépendent pas directement des acteurs mais plutôt de la façon dont ils sont filmés.

    Rami signe un chassé-croisé cartoonesque, à base de travellings avant à toute allure, de champ/contre-champ en ping-pong, tout en éclairages psychédéliques. Sur le rythme d'une rumba endiablée, on y fait des ronds de fumée en forme de danseuse affriolante (passage en image par image qui rappelle la séquence de la danse macabre en stop motion dans le premier Evil Dead), un méchant évite de peu les assiettes qui lui sont lancées à la figure, on joue à se faire coincer la main dans la boîte à gants -et on trouve ça drôle, en plus! -, bref, Crimewave, c'est un festival d'idées à la minute filmé avec une énergie - hystérie? - créatrice rare.

    La musique joue donc un rôle important, même si ni Joseph LoDuca, compositeur de la musique d'Evil Dead, ou Danny Elfman (Darkman ou encore les Spider-Man) ne sont de la partie. Rythmée, frénétique, enjouée, elle fait montre de l'artifice cinématographique, tout comme les décors en carton-pâte, souvent vides. Les quelques personnages de l'intrigue sont seuls à l'écran, se croisant sans cesse, à l'exception notable de la scène de bar. C'est dans cette configuration que se déroule la meilleure scène du film, où l'héroïne, pour échapper à son massif assaillant, ouvre les portes d'une exposition sur la sécurité et les caméras-mouchards -dont le héros est l'installateur. Devant elle se dressent alors une multitude de murs et de portes, donnant l'impression de se prolonger à l'infini, déconnecté de la réalité du dehors. Elle va donc passer les portes une à une, valsant à chaque fois entre les parois, dessinant un solo dansé mémorable. Elle est suivie par une caméra semblant être libérée de toute contrainte, dans un travelling latéral continu. En plan de coupe, l'affreux bestial offre un contrepoint parfait, tout en force brute, défonçant les murs les uns après les autres... Jusqu'à une porte blindée heureusement solide. L'espace de cette séquence nous aura transporté ailleurs, jusque dans un couloir indéfini hors du temps et de la réalité, déjà bien altérée, du film.

    Préfigurant certains aspects du très beau Darkman (l'hystérie des plans cartoon, appliquée ici au traitement plus tragique de la figure du super-héros), Mort sur le gril est, ne serait-ce que sur la foi de cette séquence, à découvrir de toute urgence. De plus, quand on commence son film par des nonnes lancées à toutes blindes dans une vieille voiture, de nuit, le film qui en découle ne peut pas être tout à fait mauvais... Encore que.

  • Zoolander (2001)

    Un film de Ben Stiller

    4574088770_2de3ddeb64_m.jpgParmi la vague de comédies ouvertement débiles dont les Etats-Unis nous abreuvent depuis des années, Zoolander a une place à part. On avait parlé il y a quelques temps ici même du plus récent Ron Burgundy, présentateur vedette ; et, à l’instar de ce dernier, Zoolander est toujours aussi délirant visions après visions.

    Initialement créé pour la chaîne VH1 (qui produit le film, et offre le décor réel de sa cérémonie de remise des prix pour de la poilante première séquence), le personnage de Derek Zoolander, top model au QI d’un abricot sec, se retrouve mêlé à un complot visant à assassiner le Premier Ministre malaisien, qui veut revaloriser les salaires des travailleurs des ateliers textiles.

    Les scénettes s’enchaînent dans une succession hystérique, dures à suivrent pour les zygomatiques : la désormais culte bataille d’essence, le défi-défilé (arbitré par David Bowie sur Beat It de Michael Jackson), le complot sur le mannequinat nous ramenant aux heures des assassinats plus marquants (JFK et consorts), en passant par un combat break-dance et même une citation provenant de 2001, l'odyssée de l'espace, le film réussit son objectif 90% du temps ; pour le reste, on note un passage en cure de jour et un retour au source très minier un peu longuet.

    Si les scènes en elles-mêmes sont importantes, telles des mini-sketchs qui tentent d’en faire plus au fur et à mesure que le temps passe, le film ne serait pas grand-chose sans les acteurs, et en premier lieu un immense Owen Wilson dans le rôle du top model Hansel. Le spot de présentation qui lui est consacré aux VH1 Awards donne le "la" pour la suite, dans un narcissisme qui s’ignore, vraiment très drôle. Sa confrontation dans la boîte de nuit (à coup de Who are you tryin' to get crazy with, ese? Don't you know I'm loco?, citation tout droit sorti d’un morceau de Cypress Hill -merci à Nico, au passage, qui me l’a fait découvrir), suivi du défi-défilé, puis de la visite de son antre (des nains, un sherpa, un samoan et un gros tatoué participant à une orgie d’anthologie), c’est à son personnage que l’on doit les meilleures scènes. Mugatu (Will Ferrell) est aussi un énorme personnage, qui parodie à peine l’image que l’on peut avoir des créateur de mode, avec sa Déglingue, inspirée du mode vestimentaire des SDF et des "putes fumeuses de crack", tout cela bien avant Brüno de Sacha Baron Cohen.

    L’impressionnant défilé de guest stars -Winona Ryder, Billy Zane, Paris Hilton, Victoria Beckam, Natalie Portman, Donald Trump, Claudia Schiffer et sûrement beaucoup d’autres restés inconnus sous nos latitudes- participe à cette euphorie renouvelée, autant que le tsunami de marques connues qui fait du film un étonnant décalque psychédélique de la réalité.

    Tout se tient dans un ensemble de séquences très logiquement mises bout à bout, à l’aide d’un découpage parfois très cut dont MTV s’est érigé en modèle -Stiller ayant par le passé animé une émission sur la chaîne ; rappelons que, quelques années auparavant, Ben Stiller réalisateur nous avait aussi donné un Disjoncté bien meilleur que ce que ses critiques laissent à penser. Même si l’on a tendance à voir une sauce un brin trop rallongée, Stiller a la bonne idée de ne pas faire traîner les choses. Sans une ou deux scènes inutiles, on était proche d’un petit chef d’œuvre de comédie.

    A voir aussi :
    La légende de Ron Burgundy, présentateur vedette
    H2G2, le guide du voyageur galactique

  • Présentateur vedette : la légende de Ron Burgundy (2005)

    Un film de Adam McKay

    "Ce film est basé sur des faits réels"

    4283772897_577315de93_m.jpgRon Burgundy est un maître, que dis-je, un roi à sa juste place dans son fauteuil de présentateur vedette sur Channel 4. Coiffure impec’, la moustache brossée et la langue bien pendue, il règne en seigneur sur une équipe et une chaîne toute acquise à sa cause. L’arrivée d’une jeune ambitieuse terriblement sexy va mettre un vrai bazar dans ces rapports de force...

    Produit par Judd Apatow et portant sa marque de nouvelle comédie américaine contemporaine, au même titre que 40 ans toujours puceau (Judd Apatow, 2005), En cloque, mode d’emploi (Judd Apatow, 2007) et Sans Sarah, rien ne va (Nick Stoller, 2008), La légende de Ron Burgundy nous semble pour l’instant le plus réjouissant de tous. Le décalage évident provoqué par "la légende" adaptée de "faits réels", établit la tension qui animera le film dans son entier, entre classiques séquences de comique de situation, et dérapages aux tonalités fantastiques, très cartoon. Le film en profite pour se moquer de tous ces films qui, adaptés de faits réels, sont sensés toucher les spectateurs plus qu’une "banale" création de l’esprit. Ici, les amateurs de vie réelle vont être servis ! Ce découpage sépare le film en deux parties qui, si elles s’entremêlent parfois, laissent voir une première partie sans incursions fantastiques nettes, mais pose cependant des références forte au cinéma de genre (le western, lors de la première confrontation entre les deux équipes TV concurrentes).

    La bataille des ours, le règlement de comptes westernien, le changement de costumes très Superman de Burgundy, ou son appel à l’aide d’un coquillage qui résonne sur toute la planète et toutes les espèces vivantes trousse un  récit où tout peut arriver, au sein duquel on est constamment surpris par les nouvelles trouvailles comiques. Cette tension sera menée jusqu’à son terme et, à l’instar de tous ces films basés sur des faits réels, les personnages verront leur vie future être déclamée par une voix-off monocorde, fixant chacun dans un arrêt sur image caractéristique... Le réalisateur n’en néglige pas moins son scénario qui, s’il est basique, offre des possibilités qu’il se permet de prendre au vol. Notamment, le machisme avéré dans des années 70 qui ne sont pourtant pas si lointaines...

    L’ancrage de l’époque est ainsi déterminant : machisme des consciences, décalage entre look kitch et ridicule aujourd’hui, top absolu de la mode dans ces années 70. La jeune femme -Christina Applegate, remember Mariés, deux enfants- est la plus moderne de tous les personnages, celle qui a un temps d’avance sur le temps, la seule dénonçant à la fois la misogynie ambiante et la coupe ridicule du King Burgundy, devant ses médusés collègues.

    Cet ancrage donne également un vrai cachet cinéma à l’ensemble : soin des costumes, références cinéma continues, y compris dans des tics de mises en scène sympathiques. Elle sert l’humour omniprésent : son équilibre et le tempo des séquences est très certainement dû à une grande part d’improvisation très payante. Misant sur des comédiens friands de l’exercice, on assiste à un marathon de l’humour, certes parfois lourd, constellé de phrases immédiatement cultes, sans temps mort. La tonalité générale, si elle est un peu too much, fait surtout la part belle à des gags de gamins, très naïfs, comme si les personnages avaient tous six ans... Encore une fois, le décalage entre les agissements puérils et leur nature démonstrativement macho fonctionne à merveille. Les coups de fils bidons, la séquence du parfum à l’essence de panthère, la drague de la jeune femme -Burgundy sortant ses muscles flasques oints et son altère, insistant qu’il vient de faire mille levées-, tous les gags sont sur cette longueur d’ondes, tous payant. C’est dire si l’on en a pour son argent !

    Une très bonne comédie contemporaine, tirant ses origines dans Mary à tout prix ou Zoolander ; ce qui donne toutes les raisons pour voir la comédie plus récente d’Adam McKay, Fragins malgré eux, doté d’une excellente réputation.