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2000's - Page 7

  • Collateral (2004)

    Un film de Michael Mann

    4177773215_07c8b6cbb2_m.jpgCinéaste talentueux, bien qu’un brin surestimé (Public Enemies n’est pas, à mon sens, ce chef d’œuvre moderne que tant de critiques s’évertuent à porter aux nues), Michael Mann aime le polar, et nous les rend bien. Sous influence thriller (Le sixième sens, 1988), son approche est toujours esthétiquement marquante, et nous vaut une expérience unique. Cela va comme un gant à ce Collateral majestueux, avec ses ambiances de nuits chaudes à LA.

    Le mystérieux Vincent (Tom Cruise) prend un taxi pour une virée nocturne bien particulière ; cinq arrêts, autant de contrats à exécuter. Son conducteur, complice malgré lui, est un rêveur déçu qui va expérimenter une véritable leçon de vie. Ce duo improbable forme un buddy-movie étrange et fascinant, où la ville forme un troisième personnage à part entière. La palette chromatique du film, assez rare, oscille entre les marrons, verts et violets, capté par un prototype de caméra  numérique, la Thomson Viper modifiée. Là se joue l’intérêt majeur de Collateral : on sent Mann en terrain d’expérimentation constant, façonnant des plans qui saisissent, avec la sensibilité particulière de l’objectif, les teintes de la nuit telles que le perçoit l’œil humain. Voir un quasi-désert est aussi en total décalage avec la ruche bourdonnante que devient Los Angeles en plein jour, donnant des allures westerniennes dans la jungle urbaine où se joue le duel entre deux personnalités antagonistes. A ce titre, la séquence qui voit Max (Jamie Foxx), le conducteur de taxi, ne pas stopper sa voiture malgré le dépassement de feux rouges, est symptomatique : il ne percute à aucun moment une autre voiture, bien que la tension soit présente à travers le regard du Vincent passager, perdant son calme pour la première fois.

    Mann signe une balade, très musicale et très tendue, laissant souvent une large place à l’architecture de la ville. Au-delà du visuel, la prouesse de l’enchaînement des plans est une sensation d’espace et de localisation très exacte, tant on a l’impression de savoir à chaque moment où est qui. Les plans aériens, où ceux au sol en contre-plongée, se lient à la perfection ; parfois, Collateral fait penser à cet excellent jeu d’action qu’est Grand Thieth Auto. Si on pousse plus loin les corrélations, les ressemblances sont frappantes : un trajet en voitures, des arrêts fréquents (qui rappellent les stop aux cabines téléphoniques dans les premières versions), des coups de feu, ... Les éléments du décor étant aussi importants que les acteurs qui y évoluent.

    Tom Cruise, y est méconnaissable. Perruque blanche, sourcils grisonnants, barbe... affublé de ce look, il n’a jamais joué comme cela : voix grave et sérieuse, corps monolithique, un prédateurs resserrant ses griffes sur des proies perdues d’avance. Magnétique, philosophe et toujours très concentré, préparé à tout et semblant invincible, il donne l’impression d’un lion. Ses réflexions profondes le font, de même, planer au-dessus du reste de la population. Et pourtant... il n’est qu’un exécutant, tueur à gages tenant ses ordres de plus haut. Tom Cruise donne dans ce film sa plus grande performance, avec La Guerre des Mondes, réalisé la même année, où il était, dans un autre registre, absolument bluffant.

    Dernier point, la musique, omniprésente, donnant le rythme des séquences, éclairant ça et là l’état d’esprit des personnes en présence, semblant sortir de la radio du taxi driver. Mann a toujours donné une importance prédominante à la musique, qu’on peut entendre dès Sixième Sens, jusqu’à Miami Vice et Public Enemies (où il reprend à son compte l’esprit d’un Bonnie & Clyde). Il trouve ici le liant indéniable d’une fable des temps modernes, prédateurs contre proies dans le désert de la civilisation.

    A lire aussi : la critique du film (bien différente) sur Nightswimming et chez Dr Orlof

  • Jusqu'en enfer (2009)

    Un film de Sam Raimi

    4174522513_01265a6dbc_m.jpgAh, on l’attendait, ce film du renouveau, du réalisateur des Spider-Man (mais surtout de la trilogie Evil Dead et de Darkman !) ; Jusqu’en enfer s’annonçait alors comme un retour aux sources vers les contrées horrifiques qui avaient fait la renommée du cinéaste américain. Retrouve-t-on la maestria d’un Evil Dead dans son nouvel opus ?

    Drag Me To Hell (son titre original) se pose sur les bases on ne peut plus classiques des films de malédiction ; la personne maudite ne va cesser, dans ces films, d’être tourmentée à chaque coin de rue (parking ?) par une menace sourde, immatérielle mais bien réelle -du moins pour le spectateur.

    La séquence d’introduction, sauvage en diable, nous met les pieds dedans avec une force indéniable. La manifestation de cette malédiction est personnifiée jusque dans les mouvement brusques et inattendus d’une caméra survoltée, rappelant la fameuse shaky cam chère à Raimi. La séquence amène à la présentation du titre, tellement bis, Drag Me To Hell remplissant tout l’écran de sa macabre invitation.

    Puis vient la suite. Alison Lohman incarne un agent de banque guettant sa promotion, se prenant en pleine face (et c’est le cas de le dire) cette bonne vieille malédiction, par une gitane qui n’obtient pas son report pour le paiement d’un crédit. L’ambiance musicale entretient d’ailleurs, avec ses accents gypsy et son instrumentation traditionnelle, la filiation avec le feeling forain, et effectivement, on se croirait dans une fête foraine, un circus freak (bien propret quand même). S’enchaînent donc moult séquences survoltées, à la manière du plus old school des trains fantômes, avec cependant un net penchant pour la régurgitation régulière de liquides physiologiques tous plus dégueus les uns que les autres (comprenez : amis de la bave et du vomi verdâtre, soyez les bienvenus, vous êtes ici chez vous !). L’insistance carrément too much du réalisateur sur ces moments bien crades nuit à la cohérence de l’ensemble, surtout que la pauvre actrice s’en prend vraiment trop, tout en ne réagissant pas plus que ça à cette accumulation hors du commun.

    Côté casting, parlons-en : la série B que nous pond l’ami Raimi n’est en aucun cas relevée par ses acteurs de second plan (remarquez, c’est plutôt cohérent), Lohman et Justin Long ne semblant pas vraiment à leur place. Seule la vieille (Lorna Raver, jusqu’ici coutumière de séries télé) est véritablement flippante. Le scénario qui se déroule péniblement sous nos yeux est un des plus prévisibles jamais vus, jusque dans son dénouement attendu. Sans conteste, on attendait bien mieux du film de Raimi, qui se rapproche plus, au final, de ses dernières productions sans envergure -The Grudge en tête- plutôt que de ses bonnes péloches passées.

    S’il remplit le cahier des charges au niveau des sursauts de l’auditoire, l’ensemble fait figure de série B de luxe, photographiée sans talent et où, certes, la caméra fait quelques bonds, mais... ça ne me suffit pas. Décidément, après un laborieux Spider-Man 3, Raimi doit reconquérir son titre de grand cinéaste contemporain du Fantastique. Y arrivera-t-il ? J’ai bien peur que ce n’est pas en ajoutant un énième suite aux aventures de l’homme araignée qu’on puisse être convaincu...

    Source image : affiche du film © Metropolitan FilmExport

  • La Route (2009)

    Un film de John Hillcoat

    4164985021_021d666ec1_m.jpgDoté d’un titre simple, court et sans connotation si ce n’est une annonce de road-movie, La route est, de même, un film âpre, dont la brutalité vous saute à la gorge dès les premiers instants. On nous montre l’errance d’un père et son fils, tentant de survivre sur les ruines du monde, menacés par des gangs cannibales sillonnant un paysage désertique.

    Même si les films post-apocalyptiques commencent à se multiplier en ce début de vingt-et-unième siècle, rien n’est semblable à cette Route, qui fait ressembler les humains à des individus déjà morts, au teint terreux, et rapprochent le film d’un fantastique très marqué par le thème des morts-vivants. Allant ceci dit bien plus loin, le film ose montrer ses personnages en vrais SDF, tant par leur nature sédentaire et instable, que par leur apparence (amoncelant les couches de vêtements, devant se couvrir de sacs plastiques, manger tout ce qu’ils trouvent, ...). Tout cela, car la vie n’est plus ce qu’elle était : c’est de survie qu’il est désormais question, pour tout le monde. La peur est un pain quotidien et pousse le père (Viggo Mortensen, cadavre magnifique) à des actes terribles au nom de sa protection et, plus important, de celle de son fils. Paradoxalement, il tient dur comme fer à se revendiquer du clan des gentils, comme il le répètera à maintes reprises au fiston ; pour le spectateur cependant, la distinction n’est pas si commode, quand parfois elle n’a même plus lieu d’être. La correction que va infliger le père à un pauvre ère comme lui, ayant dérober leurs affaires laisse froid dans le dos. Elle est néanmoins le fruit de cette peur dont les personnages ne peuvent plus se défaire.

    L’univers détruit et sans vie est rendu avec une belle force, les plans d’ensemble laissant voir la terre désolée, aride et vidée, où tout est mort, y compris toutes forme végétale. Les teintes désaturées, désespérément grisâtres, sur lesquels les personnages ne sont plus que masques de mort grimaçant, dessinent la morne survie qui attend tous ceux encore en vie ; elles tranchent avec les couleurs des quelques flash-backs du père, aux couleurs chaudes, offrant le rêve d’un monde semblant totalement étranger à celui-là. Les causes du cataclysme ne seront pas évoquées, mais là n’est pas l’intérêt : c’est là, cela s’est passé, il faut faire avec. C’est le choix que n’a pas pu faire la femme (Charlize Theron), et qui scelle à mon sens la destinée du duo père/fils ; si la mère avait pu rester avec eux, ils auraient peut-être pu mieux vivre toutes leurs horribles péripéties. Car La route est aussi un film d’horreur, la séquence dite de la cave répondant aux canons du genre, rappelant les canons des films de zombies. L’homme y est un loup pour l’homme, comme depuis la nuit des temps, mais d’une façon bien plus animale et directe que celle à laquelle on ne s’habitue toujours pas aujourd’hui. Comme pourra le dire le père, l’humanité a disparu.

    Traumatisant, le film l’est à plus d’un titre, tout comme doit l’être le roman de Cormac McCarthy dont il est tiré. Réussi, on peut l’avancer sans peine, tant l’oppression et l’horreur sont constamment prégnantes. Ce qui m’a le plus terrorisé, c’est au moment où je me suis dit : à partir de quand le monde du film va devenir notre monde ? Et c’est, je vous le garantis, la pire pensée probable que le film nous assène, comme un coup de poignard entre les omoplates.

  • X-Men Origins : Wolverine (2009)

    Un film de Gavin Hood

    4157595426_77ce94f6ed_m.jpgComme on a pu en discuter chez Robbie Movies (qui a récemment chroniqué ce Wolverine), on a du mal à s’empêcher de regarder certains films, malgré l’échec artistique cuisant dont semblait souffrir ce retour aux Origines. Dès qu’on a un tant soit peu de fantastique ou de science-fiction à se mettre sous la dent, nous répondrons quand même toujours présents !

     

    Que dire donc, sinon la confirmation d’un film qui semble avoir été mal fait de bout en bout. Premier blockbuster du Sud-Africain Gavin Hood (Mon nom est Tsotsi, 2006, Détention Secrète, 2008), on peut se laisser aller à penser qu’il n’a pas pu avoir les coudées franches sur ce film extrêmement attendu. En effet, on oscille entre des dialogues confondant de bêtises dignes d’une voix-off de bande-annonce (-Et tes plaques ? -J’en veux de nouvelles. -A quel nom ? -Wolverine !), loin d’un jeu assez fin comme a pu en insuffler Robert Downey Jr. dans Iron Man (Jon Favreau, 2008), et un scénario globalement inintéressant ; visiblement adapté de l’arc Arme X (de Barry Windsor-Smith), il est pourtant très côté chez les connaisseurs, et fait s’étaler péripéties convenues sur réactions ridicules (surtout lorsque le film essaye de jouer la carte de l’humour, lors de la découverte de ses nouvelles "griffes" par Logan / Wolverine, ou pendant un match de boxe complètement à côté de ses pompes). Wolverine n’est pas vraiment un personnage qu’on pourrait qualifier de drôle.

    Le savoir-faire technique est malgré tout présent, et on nous sert des images léchés d’un Hugh Jackman tout en muscles (le marcel revient à la mode !). Malgré la déferlante pléthorique de super-héros, le potentiel fantastique n’est que rarement exploité, et on a l’impression terrible que les personnages sont là pour remplir des cases de scénario à tour de rôle (tiens, on a besoin de liquider des gardes surarmés ? enlevons le bandeau des yeux de Cyclope, il va tous nous les dézinguer ! Un personnage en mauvaise posture ? Untel peut utiliser son pouvoir génial !).

    La préparation du final, qu’on pouvait attendre avec une certaine impatience (mais pas pour les mêmes raisons), est incroyablement bâclé : le combat entre l’arme X et l’arme XI se révèlera assez plat, malgré une bonne idée du lieu de la bastonnade. Ce n’est pas l’apparition clin d’œil du professeur Xavier, qui lie le tout avec la trilogie cinématographique des X-Men, qui nous en donnera pour notre argent.

    On ne pourra, à la rigueur, que retenir la séquence pré-générique, avec un Logan enfant, où la lumière est intéressante, assez inquiétante, et donne une ambiance particulièrement étouffante à la scène. La séquence générique se laisse aussi regarder, avec les aventures de Logan à la guerre. Pas besoin d’aller plus loin, vous pouvez appuyer sur Stop.

  • The Box (2009)

    Un film de Richard Kelly

    "Any sufficiently advanced technology is indistinguishable from magic"

    "Toute technologie suffisamment avancée est indiscernable de la magie"

    4117370083_b7bd4340f5_m.jpgVoir un nouveau film de Richard Kelly relève personnellement d’une gageure, tant son Donnie Darko (2001) m’avait marqué en salles, il y a maintenant quelques années. Dès les premières minutes, la sensation d’assister à un moment indélébile de ciné, avec ce travelling circulant autour de Jake Gyllenhaal assis sur le bitume, était évidente. Ayant pour l’instant zappé Southland Tales (plus pour sa non-distribution en salles que ses critiques mitigées), j’étais plutôt fébrile en entrant dans la petite salle qui projetait The Box près de chez moi.

    L’incipit pose directement l’histoire en deux minutes (un couple, années 70 ; une boîte avec un bouton ; si tu appuie, gagne 1 million $ et quelqu’un que tu ne connais pas mourra), révélant instantanément son origine (un récit court de Richard Matheson, digne de la mythique Quatrième Dimension, d’ailleurs prise comme base d’un épisode de sa séquelle en couleur des années 80). Niveau ambiance, on est en présence d’un véritable film d’époque aux détails subtils, les seventies s’exprimant dans l’éclairage (un léger voile blanc occasionnant des halos autour des personnages, qui m’a rappelé Carrie (Brian De Palma, 1976), les couleurs -des orange-marrons délavés, surtout au tout début- les costumes et les coiffures. Le décor est bien planté, je retrouve pour le moment le prodige de Donnie Darko.

    Le scénario choisit la piste science-fictionnelle / mystique au lieu de l’interrogation psychologique et éthique induite par le postulat de départ. Le mari (James Marsden) est ingénieur à la NASA, a un rêve déçu, tandis que la femme (Cameron Diaz), professeur, est brisée dans son corps (handicapée à la jambe). La décision qui est prise (uniquement par des femmes : soit, elles seules ont le courage de faire ce qu’il faut, ou alors, ce sont elles qui précipitent le destinée funeste de l’humanité ; le film, sur ces deux possibilités, choisit son camp) amènent à un dérapage fantastique et mystique, à l’image de la fameuse phrase d’Arthur C. Clarke reproduite en exergue. Cette phrase leitmotiv est le paradigme de tout le film, et met en évidence une tension entre sciences (phénomène expliqués par les lois physiques) et sacré (expliqués par le dogme religieux et la foi en celui-ci), plus que fantastique. Les symboles sont nombreux et beaucoup ont remarqué dans The Box une relecture à peine masquée de la genèse. Deux dogmes s’opposent donc, comme souvent dans le cinéma de fantastique ou de science-fiction (rappelons-nous du très bon Prince des ténèbres de John Carpenter).

    Si, dans sa première partie, l’intrigue sait être littéralement captivante par ses étrangetés (personnages qui débitent des phrases qu’ils ne devraient pas être sensés connaître ou même avoir l’audace de balancer, bizarreries visuelles), épaulée par une mise en scène posée, tout cela totalement en adéquation avec un certain cinéma américain de la conspiration des 70’s, la seconde, partant un peu dans tous les sens (à partir de la séquence de la bibliothèque), déconcerte -ce qui reste une très bonne chose-, mais rend diffus un scénario qu’on aurait apprécié plus tendu. Deux films semblent se confronter ici, dans un combat des plus schizophrènes.

    L’explication finale, assez convenue, aurait sûrement gagnée à être plus nébuleuse et amenée moins frontalement. Le dernier acte fait aussi baisser la tension de façon significative,  et on déplore que tout ce mystère soit achevé de façon simpliste.

    Certaines choses sont cependant diablement excitantes, notamment le fait que toutes les personnes appuient sur le bouton, à chaque fois que l’occasion leur est présentée. Tout le monde prend le risque d’un dommage majeur pour un gain qu’ils estiment immanquable.

    Ne pouvant être considérée comme une franche réussite, The Box montre que Richard Kelly peut encore nous épater, mais qu’il doit savoir faire le tri dans le(s) film(s) multiple(s) qu’il nous propose.

     

    Disponibilité vidéo : Blu-ray / DVD - éditeur : Wild Side Video