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2000's - Page 2

  • Un film, une séquence (1/2) : V pour Vendetta (2006)

    La révélation de Finch

    "Tout défilait devant mes yeux... une longue suite
    d'événements qui m'a projetée dans le passé... bien avant Larkhill.
    C'était comme si je pouvais voir tout ce qui s'était
    déjà passé... et tout ce qui allait bientôt se passer."

    Inspecteur Finch 

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    La grande réussite de V pour Vendetta (BD comme film) est de jouer avec la temporalité de la narration, multipliant les allers-retours dans le temps et les sous-intrigues ; le film débute par l'exécution de Guy Fawkes, révolutionnaire anglais qui manqua son attentat contre le Parlement de Londres en 1605. Le spectateur découvre ensuite les incidents qui ont frappés l'Angleterre quelques années auparavant, et le sacre du dictateur Sutler (John Hurt). Puis, dans un futur proche, V (Hugo Weaving), un être mystérieux affublé d'un costume de Guy Fawkes, entend faire renaître l'idée de la révolution. Il veut rappeler aux anglais les conditions étranges qui ont présidé à l'élection d'Adam Sutler à la tête du pays, devenu alors un Grand Chancelier tout-puissant. 

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    La séquence qui nous intéresse se situe au début du dernier acte du film ; elle dure 4 minutes, de 1h40' à 1h44', et contient pas moins de 150 plans -soit un tous les 80 centièmes de secondes ! Elle commence par la pose d'un domino par une main toute de noir gantée, celle de V. Presque un an s'est écoulé depuis que V a commis son attentat, la destruction du Palais de Justice Old Bailey ; à son appel, cette date anniversaire doit voir les citoyens se rassembler devant le Parlement. Après une longue enquête, l'inspecteur Finch et son assistant sont dans l'impasse, et V pose la dernière pierre de son plan.

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    L'objectif principal de la séquence est de montrer toute l'ampleur des actes de V ; il distribue à la population de Londres des costumes de Guy Fawkes (dans un des nombreux jeux de miroir du film, ici entretenu avec une première action au début du film). Des trains entiers acheminent la marchandise vers des "centaines de milliers" de foyers. V est le maître d’œuvre d'un plan global dont lui seul a la clé. Débute alors un montage particulièrement astucieux, qui accélère de façon brusque et virtuose le rythme du film. Un plan est souvent complété par un autre, dans une situation différente : alors qu'une fille va ouvrir après une sonnette à sa porte, c'est Finch que l'on voit ouvrir au transporteur. Plus loin, c'est un vandale, criant "Anarchy in the UK !", qui finit la phrase de Finch, "That's what he wants" ("C'est précisément ce [que V] veut").

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    En quelques secondes, plusieurs jours s'écoulent, mettant en regard Finch et l'assistant d'un côté, et les rues agitées de Londres, de l'autre. A un autre moment, "[V] nous connaît mieux qu'on ne se connaît nous-même" résonne sur les images montrant le premier ministre Creedy acceptant le pacte de V ; ce dernier ayant effectivement pressenti que Creedy accepterait son marché. Les paroles sont parfois en avance sur l'image, résonnant avant même que son orateur ne se montre (comme quand Sutler menace de faire arrêter "tous ceux qui portent un masque", la potentielle victime et son bourreau virtuellement présentés dans le même espace-temps). Les points de vues, déjà, sont multiples ; la temporalité, elle, est respectée, les événements s'enchaînant logiquement et implacablement, dans le grand plan d'ensemble de V, figuré par la construction minutieuse d'un parterre de dominos, la pose de chaque nouvelle pièce scandant la séquence, comme dans la BD. La cadence régulière d'un mécanisme d'horlogerie tapisse le paysage sonore de la séquence, participant ainsi à conférer au plan de V une nature pensée, programmée et inarrêtable.

    Puis, Finch raconte à son assistant sa virée nocturne au complexe médical abandonné de Larkhill, qui constitue le cœur de cette séquence extrêmement complexe. 

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    Dans un premier mouvement, constitué d'accélérations puissantes et de temporisations, Finch décrit son sentiment : au milieu des décombres, dans la nuit, il a une révélation, au sens religieux du terme. Le temps et l'espace s'entrechoquent et se mêlent dans un maelström d'images de ce que l'on a déjà vu (l'arrestation de Guy Fawkes, le baiser échangé par deux jeunes femmes, la rose caractéristique laissée en signature des meurtres, entre autres), et d'autres qui sont inédites et prophétiques, issues de la suite du film : V pris sous le feu d'agents gouvernementaux -évoquant clairement les agents de la Matrice contre Néo, ici dans un retournement de situation qui ne manque pas d'ironie-, Finch et Evey devant le métro rempli d'explosifs, ... La vision de Finch, si elle est prophétique, est aussi omnisciente : il voit des événements auxquels il n'a pas assisté et se voit lui-même, illustrant  un point de vue global qui le dépasse.

    La suite ici

    Sources images : captures d'écran issues du DVD © Warner Bros

  • Jeepers Creepers (2001)

    Un film de Victor Salva

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    Une sœur et son frère doivent passer l'été chez leur parents. C’est le garçon qui s’occupe de la ramener au bercail. La première séquence, en plein cagnard sur une route au milieu de nulle part, on assiste à une discussion anodine dans la voiture ; au second plan déboule à toutes berzingues un camion d’un autre âge. Cette figure menaçante est bien mise en valeur, paradoxalement, par le flou de l'arrière-plan Menace indistincte, le camion apparaît dangereux au spectateur bien avant qu'il fasse le même effet aux personnages. Le côté massif de l’engin rend cette scène très efficace, et on pense d’emblée au chef-d’œuvre du genre, Duel (Steven Spielberg, 1971). 

    Un bolide anonyme aux proportions gigantesques qui se rue sur de pauvres gens qui n’ont rien demandé, voilà qui n’est pas nouveau mais qui produit toujours son petit effet. Ensuite, la découverte des activités suspectes du danger de la route (réduit à une silhouette pas vraiment engageante) continue à faire monter la tension. Cet espionnage furtif est bien rendu par le cadrage utilisé : imprécis, comme pris sur le vif, il cite expressément Massacre à la tronçonneuse. La photo, travaillée mais assez naturelle, joue pour beaucoup dans cette évocation d’un endroit improbable, où les policiers peuvent côtoyer les diseuses de bonne aventure, les barmans, les poivrots de service et le spécimen du jeune-en-détresse. On a ainsi droit à une bonne partie du film complètement réussie ; le monstre est déviant comme c'est pas permis, passant son temps à poursuivre ses victimes pour... sniffer leurs sous-vêtements ! 

    Dès que le monstre apparaît à la lumière, dès qu’on peut bien le voir et le cerner, alors disparaît justement cette tension, cette peur de l’inconnu. Le film devient alors moins efficace. En effet, le maquillage du monstre n’est pas si mal, mais pour nous impressionner encore plus que sa silhouette tapie dans l’ombre, il en aurait fallu beaucoup. Il ressemble alors étrangement à un croisement entre le djinn de Wishmaster (Robert Kurtzman, 1997) et le méchant de Spawn (Mark Z. Dippe, 1997), autant de références qui, cela va sans dire, ne sont pas de la meilleure eau. Décevant également, cette histoire de musique qui provoquerait la mort de quiconque l’entend : c’est ce qui est bien mis en avant, dans la bande-annonce. Ici, rien de tout cela, le thème est juste abordé, et ne concerne de toute façon que le héros. Qu’à cela ne tienne, ça faisait bien longtemps qu’une série B estampillée horreur ne nous avait autant foutu la trouille. 

    Ce qui impressionne dans ce métrage, c’est l’évocation des rapports frère-sœur, traités correctement dans ce genre-ghetto qu’est le film d’horreur. Ce n’est pas un vague clin d’œil, un trait d’humour, mais une psychologie souterraine qui participe à la crédibilité des actions perpétrées par le tandem. 

    Une dernière chose, clin d'oeil presque invisible, hisse le film au niveau des grandes réussites du genre ; au début du film, es deux protagonistes principaux ont pris l’habitude de composer des mots, des expressions avec les plaques d’immatriculations des voitures qu’ils croisent. La leur : SVM 421... comme Save Me. Ces deux-là étaient faits pour souffrir !

  • Star Trek (2009)

    Un film de J.J. Abrams

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    Quand on en vient à parler de Star Trek, on peut utiliser l'expression de série culte. Créée au milieu des années 60 par Gene Roddenberry, un ancien aviateur, elle ne remporte pas un succès public flagrant, passant à deux doigts de l'annulation pure et simple à la fin de chacun de ses trois saisons. Plus que son décorum flashy souvent kitsch (destiné à éprouver les toutes nouvelles télévisions couleurs du public américain), c'est la philosophie de la série qui donne à Star Trek toute sa valeur. Le vaisseau Enterprise et sa "mission d'exploration de nouveaux mondes étranges" est pacifique, poursuivant le but de l'amélioration de la connaissance, de l'ouverture d'esprit et du dépassement des clivages (sociaux, intellectuels...). Une mission humanitaire. Les relations inter-personnages deviennent des symboles, comme le trio de tête de l'Enterprise, Capitaine Kirk, qui incarne l'action, Monsieur Spock, la réflexion et Leonard "Bones" McCoy, l'humanité pour un ensemble qui cherche constamment son point d'équilibre. Parlant des problèmes de son époque tout en faisant voyager le spectateur vers des terres inconnues et fantastiques, la série a gagné ses fans sur la durée, lors de rediffusions.

    Vaisseau-amiral de la Paramount, Star Trek et sa mythologie sont depuis exploités sous les formes les plus diverses (série animée, films de cinéma, nouvelles séries télévisées, romans, jeux, ...), avec un résultat forcément inégal : pour une trilogie de films assez réussie -Star Trek II : la colère de Khan (Nicholas Meyer, 1982), Star Trek III : A la recherche de Spock (Leonard Nimoy, 1984), Star Trek IV : Retour sur Terre (Leonard Nimoy, 1986)-, on a droit à un film en dessous de tous les standards de qualité (et d'un ridicule absolu), Star Trek V : l'ultime frontière (William Shatner, 1989). Après plus d'une décennie sans nouvelle sortie cinéma, Paramount décide de tourner un redémarrage de la saga, procédé très en vogue ces dernières années (Casino Royale, Batman Begins, X-Men : le commencement, La planète des singes : les origines, tout bientôt The amazing Spider-Man et... encore un nouveau Batman, après le Dark Knight Rises de Christopher Nolan). Bien pratique, le reboot permet de repartir d'un nouveau pied, garder "l'essence du culte" en biffant les éléments trop datés. Et Paramount de donner les clés de l'Enterprise à J.J. Abrams, homme de télévision (Alias, LostFringe) ayant donné à une autre série, Mission : Impossible, son numéro 3 en 2006. L'homme de la situation en quelque sorte, aimé des geeks (qui sont peut-être les seuls à aimer Star Trek en France).

    Que fait J.J. Abrams de Star Trek ? Eh bien, on a l'impression qu'il gomme plus d'éléments qu'il n'en conserve ; d'abord pour faire de son film un teen-movie.

    Revenant à l'enfance de Kirk et Spock, il en fait des rebelles (l'un est une tête brûlée que rien n'arrête, l'autre un jeune garçon coincé entre ces origines humaines et vulcaines). Kirk court toutes les filles, boit comme un trou, tandis que Spock, bien que plus réservé, n'en a pas moins une puissante détermination. Ce rajeunissement ne va pas sans certaines conséquences, la plupart mauvaises pour la franchise : des séquences totalement improbables, montées dans une hystérie permanente, visent à appuyer de façon bien trop démonstratives les caractères des personnages (le film démarre sans qu'on sache de quoi il s'agit à bord d'un vaisseau assiégé dans lequel une femme accouche en urgence de celui qui deviendra Kirk ; le même Kirk, quelques années plus tard, fait une course contre lui-même dans le désert au bord d'un précipice à ciel ouvert, une aberration topographique). Uhura se retrouve au milieu d'un triangle amoureux entre Kirk et Spock (quelle aime, trait que l'on retrouve par petites touches dans la série originale), dans une écriture aux ressorts de sitcom (Kirk couche avec la colocataire d'Uhura lorsque celle-ci rentre à l'improviste ; Simon Pegg joue un Scotty déconneur, sympa mais qui semble plus échappé de Spaced que de Star Trek), saupoudrée d'effets de pyrotechnie aussi grandioses que vains.  Bref, J.J. Abrams nous mitonne un space-soap opera.

    La force thématique de Star Trek disparaît donc sous un déluge d'effets et de complexes jeux temporels faisant des clins d'oeil au fans. Ainsi, si l'on a le bonheur de retrouver Christopher Pike, permier commandant historique de l'Enterprise, ainsi que Leonard Nimoy dans une émouvante interprétation de son personnage fétiche, et Zachary Quinto quand même très bien dans le rôle, ce sera bien tout ce qu'il y a à sauver dans les 2h de ce (pour l'instant) dernier voyage du plus beau vaisseau de Starfleet. Et, même si William Shatner n'est pas un foudre de guerre question jeu d'acteur, le remplacer Chris Pine, inexpressif au possible, n'était pas non plus une si brillante idée... Mieux vaut se revoir un bon épisode de la série originale (par exemple Planète des illusions, et la tenue out of this world d'Andréa !) plutôt que ce remix qui n'a plus grand chose à voir avec le projet originel de Roddenberry.

  • Star Wars : The Clone Wars (2008)

    Un film de Dave Filoni

    images?q=tbn:ANd9GcTF52IDUqGqRMESyFQTt8J6GWaEYmWlsjigbS9-S664nwUoDZTPXjZyJaMOAprès avoir revu il y a peu la prélogie Star Wars, je me suis intéressé à la série d'animation proposée par George Lucas, décidément très occupé à faire fructifier son coup de génie de 1977 (la ressortie prochaine de l'Episode I en 3D allant dans le même sens). Force est de constater qu'au début, ce n'est pas si simple.

    Pour illustrer la guerre des clones, qui se déroule principalement entre les épisode II (L'attaque des Clones) et III (La revanche des Sith), Lucas offre en 2003 au réalisateur Genndy Tartakovsky (Samurai Jack) la possibilité de donner vie à ces affrontements pour une série en 2D de trois saisons au format très court (un épisode dure trois minutes !). Son nom : Clone Wars. Le style graphique est particulier, on devine un budget a minima, mais la mise en scène est dynamique et donne dans le Star Wars pur jus pour les fans en attente de l'Episode III. Ils y découvrent pour la première fois à l'écran le général Grievous, figure maléfique de La revanche des Sith, ou Ventress, apprentie du comte Dooku, qui donne à Anakin sa cicatrice au visage. La série s'arrête à l'exact moment où commence l'Episode III, quand Obi-Wan et Anakin Skywalker viennent secourir Palpatine, prisonnier du comte Dooku (Christopher Lee).

    Plusieurs années plus tard, Lucas, pas si fier de la série de Tartakovsky (peut-être estime-t-il ne pas y avoir laissé suffisamment sa griffe), relance la machine pour une nouvelle série, Star Wars : The Clone Wars (notez la légère différence d'appellation), au but similaire. Le scénario est par contre entièrement inédit, et l'aspect viseul sera assez différent, proposant un rendu 3D en images de synthèse. Lucas  encadre totalement le projet avec Lucasfilms, crédité comme créateur et producteur. Et, pour lancer en fanfare cette nouvelle franchise estampillée Star Wars, les premiers épisodes s'offrent une sortie cinéma à l'été 2008, sous la forme d'un film de 1h40.

    Alors que la guerre des clones fait rage, Anakin Skywalker se voit assigner une apprentie en la jeune personne de Ahsoka Tano. D'abord encombré par sa novice, il va apprendre à l'accepter. Devant cet arrière-plan psychologique, le film nous emmène sur les terres désolées et familières de Tatooine, et plus précisément dans le palais de Jabba le Hutt. Bien embêtée, la grosse larve verte a perdu... son bébé ! qui l'a kidnappé ? En mission diplomatique, Anakin et Obi-Wan vont s'évertuer à démêler les fils d'une affaire moins claire qu'il n'y paraît...

    Deux choses sont évidentes à la lecture de ce résumé : 1/ l'intrigue est absolument ridicule et 2/ on comprend pourquoi Lucas a voulu tenter une sortie cinéma pour ces épisodes pilotes. En effet, ils sont centrés sur des éléments très familiers du fan de Star Wars, et même de tous ceux qui ont déjà vu un épisode de la saga. Tatooine, ses étendues désertiques et ses deux soleils, l'immonde Jabba, C-3PO et R2-D2 sont des repères que le spectateur a plaisir à retrouver. Ils constituent néanmoins des éléments relativement inédits du fait de leur traitement graphique (une 3D rudimentaire pour les personnages aux têtes cartoony malheureusement peu expressives) et de leur traitement narratif : on en apprend plus sur l'antre de Jabba - un ancien monastère piraté -, les stratégies militaires et les négociations politiques sont au centre des enjeux.

    Devant une tenue visuelle toute relative (les personnages sont sommairement animés, seuls les décors et le design sonore, en grande partie hérités de la saga, sont valables sur grand écran, on serait tenté de dire que ces épisodes auraient du rester l'apanage de la télévision où ils seraient passés sans trop de problèmes. La relative vacuité de l'intrigue, en plus de son non-sens (un bandit comme Jabba aidé par deux des meilleurs Jedis de la République ? Pour retrouver son bébé ? Hmm...) fout tout par terre. Dès lors, même si les séquences d'action sont réussies, le "film" ne peut pas emporter la pleine adhésion de son public. Ce qui est bien dommage, tant les épisodes suivants de la première saison sont bien mieux lotis en terme de scénario. Le visuel, lui, reste du même acabit ; il a ses détracteurs, je trouve personnellement que l'esprit Star Wars est bien présent ici. Voir briller un sabre laser, un vaisseau silloner l'espace vers des planètes multiples et variées, entendre la déclamation caractéristique de Yoda ou C-3PO, dans le cadre d'une série télé où la trame narrative s'étend sur plusieurs épisodes, ça me va tout à fait. Le "film", beaucoup moins. Mais ne vous y trompez pas : il s'agit là du pilote de la série... qui n'est pas présent dans le coffret de la saison 1 !

  • Ciné d'Asie : Battle Royale (2001)

    Un film de Kinji Fukasaku

    6271929926_d71ae46b87_m.jpgDans un futur proche, suite à la constatation d’une trop grande délinquance chez les jeunes, une classe de troisième, sélectionnée au hasard, va se retrouver sur une île déserte afin de participer à Battle Royale, un jeu où out le monde doit s’entre-tuer. Le seul moyen d'y réchapper est d’être le seul survivant au bout de trois jours. Dans ce contexte, que deviennent les amitiés, et encore plus les haines, les jalousies ?

    Avançons d'abord que le concept, d'une force peu commune, n’est malheureusement pas utilisé jusqu’au bout ; cependant, si on a voulu du choc, on est servi. Les élèves ont leurs armes, donnés par les autorités en présence. Ils sont très (trop?) rapidement prêts à se tuer les uns les autres. Ils captent vite le but du jeu, paniquent aussitôt ; Kitano, en prof implacable, mais aussi désabusé, est magistral.

    Ce qui marque, c’est la force du message, mis en images très brutalement.  Le pays, marqué depuis ses origines par le culte de l’excellence, est le seul où le suicide représente le plus fort taux de mortalité chez les jeunes.  Une fois ces données en tête, le film n’apparaît plus alors que comme une extension de la réalité. L’île représente le Japon à échelle réduite, et les étudiants sa population. Au centre du microcosme, les passions, les haines, les rancœurs se transforment en un double monstrueux, la pulsion de mort.  

    La violence crue est aussitôt désamorcé par toutes sortes d’artifices : l’introduction d’une possible histoire d’amour et la fameuse superposition de la musique classique sur des scènes d’horreur. 

    La charge subversive de ce film (Fukasaku filme l’échec de son pays) est incomparable. Le décompte des décès est imparable, précis et cruel. Cela accentue la banalité de la mise à mort dans le contexte créé par le scénario.  

    Quelques scènes sont réellement inoubliables, et pour longtemps : l’exposé de Kitano dans la salle de classe, le gunfight dans le phare, une déclaration d’amour dramatique, … Présidé par une air lancinant de révolte qui gronde, le film reste aujourd'hui aussi fort qu'à sa sortie, brutal et désespéré.