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70's - Page 17

  • L'épreuve de force (1977)

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    Un film de Clint Eastwood

    Clint Eastwood réalise L'épreuve de force (The Gauntlet) en 1977 ; L’inspecteur Harry en est alors à un troisième épisode qui n’a plus grand chose à voir avec le concept de base (le personnage devient limite comique), et Ben Shockley - Eastwood, personnage principal de L'épreuve de force, symbolise un peu le nouveau Harry. Dans cette histoire de transfert de prisonnière qui tourne à la mission-suicide, nombreuses sont les similitudes entre l'inspecteur Harry et Shockley, policier alcoolo et négligé ; au début du film, son collègue lui demande de faire attention à sa tenue et au moins, de se raser. On se souvent d'une réplique similaire dans le premier Inspecteur Harry, où c'était sa coupe de cheveux qui était pointée du doigt. Ici, toujours aidé d’une petite fiole de whisky, il est utilisé par ses supérieurs pour faire capoter un procès, ces derniers pensant qu'il n’arrivera jamais à mener à bien sa mission. C’est vrai qu'il n’est pas aidé par la prisonnière, une jeune femme irascible qui le met en garde contre les dangers du transfert ; les policiers, pourris, ne l'aident guère, allant même jusqu'à lui tendre une embuscade dans la maison isolée de la prisonnière. Première scène over the top : une armada de policiers fait un véritable carton en prenant pour cible l'habitation, qui finira, criblée de balles, par s’effondrer. On est dans la surenchère la plus totale en ce qui concerne les fusillades, qui s’offriront un bouquet final lors d'une ultime séquence surréaliste.

    Enchaînement non-stop de course-poursuites (en voiture, à moto, en bus !), de rencontres louches et d’une violence sèche digne du film noir lors de la narration que Gus, la prisonnière, fait de son viol, le film s'inscrit également dans la veine d'un western moderne, avec ces étendues désertiques à perte de vue. La façon dont le couple doit affronter les épreuves, se préparant un véritable char d'assaut pour la séquence finale (2ème séquence énorme) rappelle les duels au six-coups chers à la mythologie de l’Ouest, avec en prime un éloge à la détermination et au dépassement de soi. Shockley, tête brûlée, est un personnage que la vie a perdu en route, et qu'il va retrouver grâce à la prisonnière. Sondra Locke, qui avait déjà tourné pour Eastwood dans Josey Wales et qu'il retrouvera aussi pour Le retour de l'inspecteur Harry, est intéressante dans l’expression de sa nervosité et de son regard halluciné ; elle exprime bien toute l’urgence et la démesure, voire l'absurdité de la situation.  L'association des deux tempéraments, assez antinomiques, donne certaines scènes de disputes assez réalistes. A l'époque, ensemble dans la vie, le couple se doit ici de finir par bien s'entendre... Doté d'une réalisation classique qui met vraiment en valeur les lieux désolés comme les atmosphères plus urbaines, L'épreuve de force fait figure de road-movie déjanté en même temps qu'actioner bourrin, témoin d’une époque où les films d’actions assumaient au premier degré leur côté too much.

  • Morts suspectes (1978)

    Un film de Michael Crichton

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    A la suite d'opérations bénignes sous anésthésie générale, de jeunes patients sombrent dans un état de mort cérébrale. Une chirurgienne va alors essayer d’en savoir plus…

    Michael Crichton, auteur de romans de science-fiction qui nous a quitté récemment, s'est démarqué par quelques tentatives dans la réalisation. Diplômé de la Harvard Medical School et producteur historique de la série Urgences, la médecine est clairement son domaine de prédilection. Pour preuve, le très honnête thriller médical Morts suspectes (Coma), sorti en 1978 avec l’appui d'un casting sympathique ; Michael Douglas, Geneviève Bujold, Richard Widmark et des apparitions d’Ed Harris -encore avec des cheveux- et de Tom Selleck -déjà avec sa moustache.

    Adapté d’un roman de Robin Cook, lui aussi spécialiste du domaine médical, le film nous entraîne, avec le personnage de Susan (Geneviève Bujold), dans les méandres du monde médical. Crichton emploie toutes les ressources nécessaires pour faire de l'hôpital hautement anxiogène un enfer, dans lequel la confiance nécessaire du patient vers le médecin est mise à mal par les plans démoniaques de l’autorité en place. Devant la pauvreté du décor hospitalier, peu photogénique, Crichton arrive à créer un réseau labyrinthique de couloirs et de salles toutes semblables (à l'image des chirurgiens et de leur uniforme réglementaire), participant à la claustrophobie et la paranoïa qui s’installe dans l’esprit du spectateur. Les individus y sont tels des souris de laboratoire, essayant de trouver la sortie, ou la résolution des comas inexpliqués. Une sorte de fil d’Ariane inversé (Thésée s’en sert pour sortir du labyrinthe et ainsi échapper au Minotaure, ici son utilisation vise à pénétrer le système, mais dans la même optique salvatrice) va alors guider Susan, de salles d'amphis jusque dans les tuyauteries et autres réseaux électriques, au cœur d’un secret inavouable. De même, la salle 8 symbolise le centre névralgique de l'hôpital, concentrant toutes peurs, tous dangers. On retrouvera une configuration analogue avec la chambre 237, centre maléfique d’un Overlook Hotel tout aussi tortueux dans Shining (Stanley Kubrick, 1980).

    Certaines séquences parviennent à s'ancrer durablement sur la rétine : on pense à une poursuite dans une salle frigorifique où des corps congelés sont pendus comme des morceaux de viande dans une boucherie, ou la visite d’un centre de soins high-tech, dans lequel les patients sont maintenus horizontalement à un mètre du sol, dans un ambiance assez futuriste. On aime donc que Morts suspectes atteigne son objectif, ne laissant pas de répit au spectateur, délivrant un spectacle haletant secondé par des acteurs bien présents et un score efficace du grand Jerry Goldsmith : mission accomplie.

  • Katie Tippel (1975)

    Un film de Paul Verhoeven

    783079katie.jpgLes débuts du réalisateur Paul Verhoeven en Hollande restent aujourd’hui mal connus, camouflés par les films de sa période américaine, plus célèbres -RoboCop, Total Recall, Starship Troopers- qui l’établissent comme un homme de films hollywoodiens à gros budgets, ayant une préférence pour les récits de science-fiction. Ses premiers films donnent à voir un visage très différent, plus modeste et proche de la vie quotidienne, notamment via Katie Tippel, que l’on peut redécouvrir grâce à l’inestimable coffret DVD édité en 2004 par Metropolitan.

    Katie Tippel est une jeune femme issue d'une famille pauvre qui se débat pour survivre. Ses conditions de vie sont déplorables, sa famille est d'une bêtise crasse mais Katie, étrangement, semble échapper à ce déterminisme. Sa soif de vivre, son refus de se soumettre et sa foi -peut-être inconsciente-  en son destin évitent au film tout misérabilisme. Inlassablement, elle enchaîne des épreuves terribles (viol, coups, tromperies) et les boulots avec le sourire. La bande originale, enjouée, et la photographie, lumineuse et colorée -travaillée par le futur réalisateur Jan de Bont- soulignent cet état d'esprit. Le sujet du film est le destin, mais aussi l’innocence ou plutôt le refus de la perte de l’innocence, joué avec un naturel confondant par la solaire Monique Van de Ven, qui retrouvait Verhoeven après son rôle mémorable dans son précédent film, Turkish Delight. La scène du viol de Katie illustre ce propos : alors que Katie joue à créer des ombres chinoises avec les mains, le sexe de son patron apparaît lui aussi en ombre chinoise à ses côtés. Katie ne peut s'empêcher de rire devant le comique de la situation -avec le spectateur-, mais va subir un viol ; une fois cela passé, elle s'enfuit et jette une pierre dans la vitrine du magasin, puis part en riant. Geste de révolte d’enfant, jetant toujours un regard innocent, étonné, amusé devant les situations les plus extrêmes. A ses côtés on retrouve un tout jeune Rutger Hauer (La chair et le sang, Hitcher) débordant de charisme.

    Adapté d’une histoire vraie ayant fait le tour de la Hollande à la fin du XVIIIème siècle, Katie Tippel est un cri d’espoir, qui démontre déjà tout le talent de Verhoeven, qui ne recule pas devant la cruauté et qui traque l'animalité des comportements humains ; la face cachée mais toujours présente (voir l’excellent Black Book pour s’en convaincre) d’un grand réalisateur.