Un film de Jonathan Frakes
Galvanisé par la réussite artistique et commerciale de Premier contact, Rick Berman propose à Jonathan Frakes de réaliser un nouveau Star Trek, qui porte à neuf les adaptations cinématographiques des séries TOS et TNG. Dans celui-ci, la Fédération colonise de nouveaux espaces, implantant des populations sur de nouvelles planètes, et découvre le secret d'un petit groupe, les Ba'ku : leur planète leur permet de rester jeunes à tout jamais. Afin de pouvoir exploiter cette fontaine de jouvence, ils doivent être déportés afin d'en faire profiter le plus grand nombre. Leurs ennemis jurés, les Son'a, sont à la manœuvre, avec l'appui de la Fédération qu'ils maintiennent dans l'ignorance de leur motivation réelle. Les So'na ont également une longévité importante, mais uniquement grâce à de fréquentes interventions chirurgicales -qui rappellent la torture de Ida Lowry dans Brazil (Terry Gilliam, 1985). La recherche de la mystérieuse alchimie produite sur la terre des Ba'ku les rapproche du personnage de Soran dans Star Trek : Générations, lui aussi obsédé par la quête de l'immortalité.
Comme souvent, Trek se veut une parabole sur le monde contemporain : ainsi, Terre Inconnue faisait explicitement référence à la catastrophe de Tchernobyl. Ici, la stratégie de génocide voulue par les Son'a rappelle les heures douloureuses de la tragédie du Rwanda en 1994, lorsque le gouvernement rwandais, composé de Hutus, décida de réduire à néant la population Tutsis. La consonnance même des noms des peuples dans Insurrection ne laisse pas de doute sur la transposition des événements. Dans la fiction, le commandant Picard n'hésite pas à défier l'autorité : ainsi, lui et son équipage iront protéger la population Ba'ku contre les directives de la Fédération, en signe de véritable rébellion, pour participer à l'Insurrection du titre. Il faut dire que l'équipage a eu la chance de découvrir la qualité de vie des Ba'ku, qui ne souffre d'aucune contre-partie dérangeante, comme c'est souvent le cas dans les mythologies de science-fiction. Effectivement, la découverte du lieu de vie des Ba'ku peut faire penser dans un premier temps à Justice, épisode issu de la saison 1 de Star Trek : The Next Generation ; la découverte d'un véritable jardin d'éden -à l'allure assez torride pour une production tv de l'époque- où la valeur ultime est le plaisir cache en réalité un pénible secret : des mises à mort régulières décidées pour protéger leur environnement. Un bien bel environnement figuré par le cadre idyllique du lac Convict, dans le Sierra Nevada, qui inonde l'écran de son bleu azuré : une certaine idée du paradis.
Si la terre des Ba'ku est un reflet du Paradis chrétien, Picard se pose en Sauveur et guide le peuple à la façon de l'exode biblique. Un récit fort en symbole donc, qui ne s'empêche pas pour autant des notes d'humour à répétitions. Et, si certaines sont réussies (la tresse de cérémonie de Picard au début, ou l'esquisse d'un pas de mambo par le même Picard, rajeuni par la force régénératrice de la planète-, d'autres tirent en longueur, à l'image d'une chanson poussée par Data, ou ses enfantillages sur la planète Ba'ku.
Si la thématique est claire et louable, sa mise en forme pêche un peu dans cet opus : des détours scénaristiques sont tirés par les cheveux (le So'na se rallie un peu vite à la cause défendue par Picard, et la façon d'arrêter le méchant Ru'afo - F. Murray Abraham - s’embarrasse de trop de prétextes techniques, le fameux "tech talk" dénoncé par Ronald D. Moore dans les commentaires audio de Générations et Premier Contact). Pour autant, il restera deux excellentes utilisations d'artefacts science-fictionnelle dans ce film : l'un, le Holodeck, qui permet de créer un environnement virtuel à bord de l'Enterprise, apporte un excellent coup de théâtre dans le dernier acte, bien mieux senti ici que dans le pourtant excellent Premier contact. Dans une moindre mesure, le concept des pistolets télétransporteurs, qui met à mal l'échappatoire des Ba'ku, est aussi une trouvaille qui renouvelle l'imaginaire de la saga. Les effets spéciaux sont par ailleurs omniprésents dans le film, Insurrection étant le premier Star Trek à n'utiliser que des effets intégralement en images de synthèse. Elles proviennent en partie du studio Blue Sky, connu aujourd'hui pour ses films d'animation, comme L'âge de glace (Chris Wedge & Carlos Saldanha, 2002).
Finalement, Insurrection n'est pas un si mauvais Star Trek, mais pâtit d'un manque de cohérence générale, réactivant la malédiction des chiffres impairs dans la saga, les opus 3, 5 et 7 étant les plus faibles -mais avantage inégalable au V : l'Ultime frontière, nanar effectivement ultime issue de la mythologie Star Trek.
Peu de temps après le succès public de 
Après le désolant cinquième épisode (L'ultime frontière), Paramount décide de mettre en chantier le dernier film incluant le casting original de la série télé : Shatner / Kirk, Nimoy / Spock, Kelley / McCoy, ... Il est clair que terminer sur le souvenir embarrassant (litote) du film réalisé par Shatner aurait été une erreur. Le retour de Meyer à la réalisation est également une nouvelle appréciable, tant sont deuxième épisode (
L'histoire de la naissance cinématographique du film, tirée de la série de science-fiction humaniste de Gene Roddenberry, est sans nulle doute plus passionnante que le film qui en a résulté. Souhaitant porter la mythologie Star Trek à l'écran dès le milieu des années 70, Paramount mise d'abord sur un projet de long-métrage, Star Trek : Planet of the Titans, dans lequel l'équipage du vaisseau Enterprise était opposés à leur ennemis classiques, les Klingons, autour d'un peuple antédiluvien, point d'origine de tous les autres, les Titans. Au détour d'un voyage dans le temps, l'équipage de Kirk se retrouvaient à incarner ces fameux Titans. Envisagé jusqu'au alentours de 1977 puis annulé, le projet laisse la place à une nouvelle série télé, baptisée Star Trek : Phase II, qui ira beaucoup plus loin dans sa phase de pré-production, le casting, scénarios et les storyboards ayant été produits (quelques-uns de ces derniers ont été utilisés dans la série Star Trek : The Next Generation). Quatre semaines avant le début de la production, la série est elle aussi annulée, mais le succès de Star Wars au cinéma ne peut laisser les exécutifs de Paramount insensibles. Un des scénarios écrits pour la série mort-née fut donc l'idée de départ de ce Star Trek : le film, qui est le seul de la série cinématographique à avoir été envisagé en indépendant, sans fin vraiment ouverte pour la suite des aventures. Intituler le métrage Star Trek : le film, fait d'ailleurs augurer d'un dernier baroud d'honneur, la conclusion de la série sur grand écran. Qui aurait pu imaginer que presque 50 ans après la série, un nouveau film serait encore en préparation ?